La France sous l'occupation. Salut à toutes et à tous, salut Ingrid ! Salut Hugo ! Bon, aujourd'hui, ou plutôt au moment où on publie cet épisode, on est le 18 juin et le 18 juin c'est une date importante dans l'histoire des Français puisque c'est l'appel du général de Gaulle.
Donc on va vous expliquer un peu plus tard dans cet épisode de quoi il s'agit Mais ce qu'il faut savoir, ce que vous avez besoin de savoir maintenant c'est que dans cet épisode, on va parler de la France pendant la Seconde Guerre mondiale et en particulier la France sous l'occupation
Oui, parce qu'entre 1940 et 1944, comme vous le savez sûrement, la France a été occupée par l'Allemagne nazie. Et aujourd'hui, dans la mémoire collective française, on a tendance à célébrer beaucoup ceux qui résistaient contre ces occupants. Et le général de Gaulle est une figure importante de cette résistance. Donc,
Dans les informations aujourd'hui, aujourd'hui en tout cas au moment où vous écoutez cet épisode, vous verrez peut-être beaucoup de choses sur l'appel du général de Gaulle sur cette figure très importante. Et nous, dans cet épisode, on avait envie de donner une image un peu plus, comment dire ?
complète, nuancée, voilà, de ce qu'il s'est passé réellement en France à ce moment-là. Oui, parce que c'est vrai que dans les pays anglo-saxons notamment, on entend beaucoup l'inverse. Donc, on entend que les Français ont collaboré, qu'il n'y a quasiment pas eu de résistance. Donc, on a un peu ces deux sons de cloche. Son de cloche, c'est une expression pour dire deux opinions différentes, deux avis différents.
avec en France on célèbre nos résistants et puis dans certains pays, notamment les pays anglo-saxons on entend plutôt que les français ne se sont pas beaucoup défendus pendant cette seconde guerre mondiale donc vous vous demandez peut-être comment c'était concrètement la vie en France à cette période-là c'est ce qu'on va essayer de vous expliquer dans cet épisode Musique
Pour commencer, on va faire le point sur ce qu'il s'est passé au tout début de l'occupation, c'est-à-dire comment est-ce qu'on en est arrivé là. Alors, en septembre 1939, Hitler a envahi la Pologne et à la suite de ça, la France et le Royaume-Uni ont déclaré la guerre à l'Allemagne.
Mais ensuite, il s'est passé quelque chose d'un peu bizarre, ce qu'on appelle la drôle de guerre. Alors, drôle de, Hugo, tu peux nous expliquer cette expression ? Oui, alors vous savez qu'il y a certains adjectifs dont le sens change en fonction de leur position, s'ils sont placés avant ou après le nom.
Donc c'est le cas avec l'adjectif « drôle » Quand « drôle » est placé avant le nom il n'a pas le sens de « amusant », de « rigolo » mais plutôt le sens de « bizarre, étrange » Donc quand on dit « la drôle de guerre » ça veut pas dire que c'était une guerre amusante Par définition, il n'y a pas vraiment de guerre amusante mais c'était plutôt une guerre bizarre Alors pourquoi cette guerre était bizarre ? Eh bien parce que les soldats français étaient
Ils étaient préparés à combattre des millions de soldats D'ailleurs, ça faisait des années que les Français se préparaient à une nouvelle guerre avec l'Allemagne Ils savaient que ça allait arriver Et pour ça, ils avaient décidé de construire la ligne Maginot
Alors ça, par contre, c'est quelque chose d'assez drôle maintenant quand on en parle parce que ça n'a pas du tout fonctionné Mais en fait, la ligne Maginot, c'était une ligne de fortification qui était construite sur les frontières est de la France pour les protéger en cas d'invasion Ça, on avait commencé à construire cette ligne en 1928
donc bien avant le début de cette guerre et on pensait que grâce à cette protection, grâce à la ligne Maginot l'Allemagne ne pourrait pas à nouveau nous envahir qu'on serait tranquille Les Français étaient vraiment rassurés par cette ligne Maginot
Mais Hitler a trouvé le moyen de passer par un autre endroit où la ligne n'était pas encore totalement construite. Donc finalement, cette ligne Maginot a été totalement inefficace. Oui, il est passé par des montagnes que les Français pensaient infranchissables. Et finalement, les Allemands ont réussi à passer. Et donc, en mai-juin 1940, comme ça, d'un coup, de manière totalement surprenante, les Allemands envahissent
entrent en France et ils arrivent à Paris. Ce qui fait que dans la population française, il y a une panique. Il y a beaucoup de Français qui fuient vers le sud. On appelle ça l'exode. 8 à 10 millions de civils qui s'en vont, qui se déplacent et qui vont être des réfugiés dans leur propre pays.
Le gouvernement aussi s'enfuit, il va à Bordeaux et celui qui est le chef du gouvernement, on appelle ça un président du conseil à l'époque, il décide de démissionner et de confier le pouvoir à un militaire, le maréchal Pétain. Et donc face à cette situation, alors que tous les civils sont paniqués, les hommes politiques ont deux positions qu'on va vous expliquer.
Oui, deux positions qui sont incarnées par deux hommes aux profils totalement différents à part qu'ils sont tous les deux militaires Donc le premier, c'est le maréchal Philippe Pétain qui a 84 ans et c'est un héros national, un héros de la Première Guerre mondiale Il s'est notamment illustré pendant la célèbre bataille de Verdun
Et c'est quelqu'un qui est très populaire en France. Alors lui, le maréchal Philippe Pétain, il veut que les Français gardent un commandement en France, qu'ils gardent le contrôle de la France. Et pour garder ce contrôle, il est prêt à cohabiter avec les nazis. Très vite, il se rend compte que, ou en tout cas, lui, il pense que
l'armée française n'a aucune chance de résister à l'armée allemande donc dans un discours le discours du 17 juin un jour avant le général de Gaulle lui, il invite les Français les soldats français à cesser le combat
Parce que même si l'armée allemande est arrivée jusqu'à Paris il y a encore plus d'un million de soldats français qui sont mobilisés qui ont leurs armes, etc. qui attendent les ordres mais Pétain les invite à ou plutôt les encourage à arrêter le combat et quelques jours plus tard, le 22 juin il signe l'armistice avec Hitler C'est le cœur serré que je vous dise aujourd'hui qu'il faut cesser le combat
Et les conditions de l'armistice ?
font que la France est découpée en deux. Il y a une zone occupée dans le nord, donc Paris, Lyon par exemple, se retrouvent dans la zone occupée, là où il y aura des militaires allemands pour contrôler la sécurité dans la rue.
Et puis, il y a une zone libre, une zone qui a une police française, qui garde les panneaux de circulation en français, etc., etc.
Et le maréchal Pétain, lui, il installe un gouvernement à Vichy, une ville qui se retrouve exactement au milieu entre les deux zones. Parce qu'il faut savoir, et ça c'est quelque chose que moi-même, avant de préparer l'épisode, je ne savais pas, que le maréchal Pétain va être le dirigeant de toute la France administrativement. Donc même s'il y a une zone occupée,
occupés avec des soldats allemands dans le nord, reste que l'administration en général de toute la France des deux zones est sous le commandement du maréchal Pétain.
Exactement, et c'est pour ça qu'on appelle ce gouvernement le régime de Vichy Et globalement, c'est souvent le terme qu'on utilise pour parler de la France sous l'occupation La France, pendant la Deuxième Guerre mondiale, était dirigée par le régime de Vichy C'est le nom de cette petite ville qui se trouvait entre les deux zones
Alors vous vous demandez peut-être pourquoi Hitler a décidé ce découpage entre d'un côté la zone occupée et de l'autre côté la zone libre Pourquoi il a décidé de laisser une zone libre aux Français ?
Eh bien, parce que Hitler avait besoin des ressources économiques de la France Il avait besoin que les Français continuent à travailler cultiver les champs pour avoir de la nourriture à produire dans les usines pour avoir des armes Et donc, il a
que la meilleure stratégie pour ça, c'était de laisser aux Français l'illusion d'avoir un gouvernement et d'avoir cette zone libre, même si, évidemment, ce gouvernement de Pétain était très... comment dire... il n'était pas complètement libre parce qu'il devait répondre aux
Oui, et c'est pour ça d'ailleurs que les nazis ont décidé de séparer la France en deux et de contrôler seulement une partie puisque le nord, c'était la partie qui était la plus intéressante militairement et économiquement. Ils se sont dit que s'ils contrôlaient le nord, les ports, les grandes villes, etc., ce serait bon pour leur grandeur.
et que si les Français avaient un espèce de semblant de liberté dans une autre zone, ce serait aussi bon pour éviter la rébellion. Oui, parce que comme vous le savez, l'armée allemande se battait sur plusieurs fronts en même temps, à l'ouest, à l'est, etc. Ils avaient besoin de beaucoup d'hommes, donc Hitler ne pouvait pas se permettre de laisser des centaines de milliers de soldats pour contrôler le territoire français.
Donc ce découpage en deux zones, c'était quelque chose qui l'arrangeait, quelque chose qui était plutôt dans son intérêt. Et donc, on vous avait dit qu'il y avait un deuxième homme. Évidemment, c'est le général de Gaulle. Alors là, on est sur un tout autre profil. De Gaulle, à l'époque, a
50 ans, c'est un militaire qui n'est pas très connu, il vient juste d'être nommé sous-secrétaire d'état à la défense et il avait un rôle de négociation avec le Royaume-Uni, c'est-à-dire qu'il faisait beaucoup d'aller-retour entre Londres et la France pour organiser la guerre.
Et donc, face à la nomination de Pétain comme président du conseil, puis face au discours de Pétain qui annonce l'arrêt des combats, le général de Gaulle décide de fuir à Londres. Il a déjà des contacts, donc il trouve un bateau et hop, il va à Londres. Et là, il va commencer à installer un gouvernement de résistance.
Et ce gouvernement de résistance, il commence avec le fameux appel du 18 juin. L'honneur, le bon sens, l'intérêt supérieur de la patrie commande à tous les Français libres de continuer le combat.
Là où ils seront et comme ils pourront. Rappelez-vous, le 17 juin, c'est le moment où Pétain décide d'arrêter les combats. Eh bien, le lendemain, en réaction, le général de Gaulle lance un appel. Cet appel, aujourd'hui, il est hyper connu. Les Français parlent au français, etc. On a vraiment tous cette...
audio en tête, mais à l'époque, évidemment, il n'est pas beaucoup, beaucoup entendu. De Gaulle, il est vu un peu comme marginal, illégitime, il est un peu seul contre tous. Mais tout de même, au fur et à mesure des mois qui vont passer, son appel va être rediffusé et ça va lancer donc le mouvement de résistance qui va s'appeler la France Libre.
D'ailleurs, il faut pas confondre avec la zone libre dont on vous a parlé juste avant qui était en France Non, la France libre, c'est ce mouvement géré par De Gaulle depuis le Royaume-Uni Et donc De Gaulle se déclare chef d'un gouvernement en exil et ce gouvernement, évidemment, il n'est pas reconnu par le régime de Vichy mais par contre, il est reconnu par les Britanniques
Et on a parlé de ce fameux appel Vous vous demandez peut-être comment il a été diffusé En fait, il était diffusé depuis Londres via la BBC et une station qui s'appelait la station Radio Londres donc qui était émise à Londres mais en français, à destination des Français avec un programme, une émission que tu as mentionné, Ingrid qui s'appelait « Les Français parlent au français »
qui n'était pas beaucoup écouté au début de la Seconde Guerre mondiale, mais au fur et à mesure du conflit, de plus en plus de Français ont commencé à l'écouter en cachette, en secret, parce qu'évidemment, c'était interdit par les autorités françaises. La France se retrouve donc sous le régime de Vichy, un régime qu'on appelle aussi l'État français,
puisque le maréchal Pétain, à qui donc sont confiés les pleins pouvoirs, décide de supprimer la notion de République française et de la remplacer par l'État français. D'ailleurs, je fais un petit clin d'œil à un de nos auditeurs qui m'a écrit une fois dans les commentaires qu'il trouvait ça bizarre qu'on dise l'État français parfois pour parler de la situation française.
parce que ça lui faisait penser à l'époque de Pétain. Et c'est vrai que maintenant, j'arrive à comprendre cette confusion. Et donc, le maréchal Pétain instaure dans toute la France un régime qui est bien différent du régime qui existait avant. C'est-à-dire que déjà, c'est un régime
Il va s'opposer à la République, s'opposer au parlementarisme et s'opposer à la démocratie. Au contraire, il prône ce qu'il appelle une révolution nationale. Il concentre tous les pouvoirs, exécutifs, législatifs, judiciaires, et il gouverne sans assemblée.
Et puis, il y a un culte de la personnalité. Pétain est omniprésent. On le voit sur les affiches dans la rue, on le voit dans les journaux, les petits-enfants apprennent des chansons à sa gloire, etc., etc.,
et il est montré comme une figure paternelle, autoritaire. Oui, c'est vraiment un retour à un régime très conservateur. Et il y a Pétain qui est cette figure d'autorité ultime. Et puis après, à tous les niveaux de la société, d'autres figures d'autorité qui sont censées assurer le contrôle de l'opinion publique et de l'ordre social.
Donc il y a un retour aux traditions, un retour à l'Église qui sont remises, on peut dire, au centre du discours national. Et le symbole le plus visible de tout ça, c'est que la devise française est changée. Ce n'est plus « liberté, égalité, fraternité », mais maintenant c'est « travail, famille, patrie ».
le travail parce qu'il y a une valorisation du monde paysan et des artisans Donc on préfère les paysans plutôt que les ouvriers des usines parce que les ouvriers étaient politiquement plutôt du côté socialiste voire communiste Donc ça, évidemment, ça ne plaisait pas du tout à Pétain Au contraire, donc, dans les discours, dans la propagande c'est vraiment la figure du paysan qui est valorisée
On se méfie aussi des grandes villes, de la modernité urbaine Au contraire, on dit : "Le top du top à cette époque, le mieux, c'est vraiment la vie rurale"
On remet aussi la famille au centre des valeurs avec le rôle traditionnel de la femme Donc la femme, sous le régime de Vichy, a un seul rôle c'est celui d'être une bonne mère Elle ne doit surtout pas travailler, elle doit rester au foyer rester à la maison
Il y a aussi une politique nataliste, donc on encourage les Français à faire des enfants parce qu'il y a besoin évidemment de renouveler la population Et puis la dernière valeur, patrie, donc c'est le patriotisme, un fort nationalisme mais ce qui est un peu paradoxal, c'est que ce nationalisme encourage une collaboration avec l'Allemagne plutôt qu'une résistance
Et ces trois institutions, le travail, la famille, la patrie, sont trois lieux où il y a beaucoup de hiérarchie, où il y a beaucoup d'autorité. Donc avec les patrons et les employés, le père, la mère, les enfants, le président avec les citoyens. Voilà une question de dirigeants qui peuvent avoir du pouvoir sur ceux qui sont employés.
Et ça, c'est vraiment une organisation qui est très importante pour le régime de Vichy. Et d'ailleurs, même à l'école, on retrouve cette hiérarchie avec beaucoup d'autorités, des maîtres, des instituteurs sur les enfants, avec les enfants qui doivent écrire.
qui doivent avoir une discipline très stricte. Et tout ça, bien sûr, est promu dans les médias avec un fort contrôle de la presse, de la radio, du cinéma, où on met en avant ces valeurs et les citoyens doivent obéir. Ils ont d'ailleurs beaucoup d'interdictions, ils ont un couvre-feu, ils ne peuvent pas circuler comme ils veulent et ils doivent eux-mêmes
eux-mêmes respecter la hiérarchie des soldats ou de la police qui sont dans les rues. Oui, parce que comme on l'a dit un peu avant, en zone occupée, il y a des soldats allemands qui contrôlent, qui assurent aussi le contrôle de la population un peu partout. Et en zone libre, c'est la police qui s'occupe de faire respecter les lois de ce nouveau régime autoritaire.
Alors ensuite, quelque chose de très important concernant le régime de Vichy et ses valeurs, c'est que c'est un régime qui est très important.
excluant, c'est-à-dire qui va exclure de la société civile certaines communautés, donc notamment les communistes, les étrangers, à l'époque il y avait par exemple beaucoup d'immigration italienne, les homosexuels, les tziganes, etc. Et bien entendu, vous imaginez les
puisque dès le début, le régime de Vichy est antisémite. En fait, plus globalement, la France de l'époque est très antisémite, et ce depuis longtemps. On avait par exemple eu l'affaire très importante et médiatisée Dreyfus en 1899 qui avait montré ça. Et Hugo, tu avais fait un épisode sur le sujet de l'antisémitisme, non ?
Ouais, j'en avais parlé, j'ai regardé avant, c'était dans l'épisode 61. Donc on va pas vous refaire toute l'affaire Dreyfus ici parce que c'est un peu long, mais si ça vous intéresse ou si vous voulez vous rafraîchir la mémoire, j'en parle dans l'épisode 61. Donc oui, comme tu l'as dit, la France n'a pas attendu d'être envahie par l'Allemagne pour devenir antisémite. C'est quelque chose qui existait beaucoup en France dès le XIXe siècle. Il y a aussi...
Une illustration de ça, c'est un groupe qui était assez influent, un groupe d'extrême droite qui s'appelait l'Action Française. Et même avant la Seconde Guerre mondiale, l'Action Française rejetait le régime de la Troisième République et réclamait un État qui exclut les Juifs. Je précise que l'Action Française existe encore aujourd'hui et a encore des membres actifs.
actifs aujourd'hui. Et donc, voilà, c'est dans ce contexte que le maréchal Pétain arrive au pouvoir et très vite, il met en place carrément des lois et une administration qui rejette les Juifs. Il le fait donc sans pression de la part des Allemands. Ça, c'est quelque chose qui est important, qu'on oublie parfois, en tout cas en France, dans notre mémoire collective.
Et dès octobre 1940, il y a une promulgation d'un statut des Juifs.
Les Juifs se retrouvent recensés, fichés, ils n'ont plus le droit d'exercer certaines professions. Les enfants juifs ne peuvent plus aller à l'école publique. Les familles sont souvent expulsées de leur logement. On les spolie, ça veut dire qu'on leur vole des choses, notamment des œuvres d'art par exemple, qu'ils pouvaient posséder. Et bien sûr, dans les médias,
Il y a une propagande antisémite qui est massive.
Ouais, et ça c'est vraiment important de le souligner le fait que ce ne sont pas les nazis qui ont imposé ces lois antisémites en France en tout cas pas dès le début le régime de Vichy a vraiment été proactif en la matière et ils ont commencé à adopter des lois dans ce sens dès qu'ils ont eu le pouvoir avant même, comme tu l'as dit que les nazis leur demandent de...
Et ça va plus loin, puisqu'il participe carrément à la solution finale. Donc la solution finale, je pense que peut-être tout le monde sait ce que c'est, mais...
C'est l'idéologie d'extermination de la population juive. Et on sait qu'il y avait des camps d'extermination en Allemagne. Ce qu'on sait moins, ou peut-être qu'on raconte moins en France en tout cas, c'est qu'en France, il y avait un système...
Pour attraper les Juifs, il y avait des camps de transit, notamment le camp de Drancy qui est assez connu et qui sont des endroits où on enfermait, où on internait les Juifs avant de les envoyer en train vers Auschwitz et d'autres camps de la mort en Italie.
Le régime de Vichy a organisé ce genre d'opérations qu'on appelait des rafles. Donc une rafle, c'est une arrestation massive et qui on arrêtait pendant ces rafles ? Évidemment, les Juifs. Donc ces opérations avaient lieu en collaboration avec les nazis afin d'envoyer les Juifs dans les camps à l'Est.
Alors, bon, ça c'est un sujet un peu délicat, on en a reparlé récemment dans les médias mais il y avait certains historiens, politiciens qui ont dit par la suite que le maréchal Pétain discriminait seulement les Juifs étrangers et non pas les Juifs français Mais en fait, ça a été démenti par la suite
notamment dans une rafle qui a marqué l'histoire la célèbre rafle du Veldiv Donc le Veldiv, c'est l'abréviation pour le vélodrome d'hiver C'était comme une sorte de stade avec des courses de vélo qui se situaient à Paris Donc cette rafle du Veldiv, elle a eu lieu les 16 et 17 juillet 1942
C'est les Allemands cette fois qui ont exigé des autorités françaises l'arrestation de 40 000 juifs français Bon, l'État français n'a pas réussi à remplir cet objectif mais ils ont quand même arrêté 13 000 juifs dont beaucoup qui étaient français
Et c'est finalement la plus grande rafle de toute l'histoire occidentale.
Elle a été faite avec des trains de la SNCF. Et ça, c'est quand même assez fort. La SNCF, c'est encore la société qu'on utilise aujourd'hui pour les trains. Donc symboliquement, c'est un peu dingue. Et il y a eu moins de 100 survivants, uniquement des adultes. Donc notamment ces 4000 enfants que l'État français a décidé de livrer. Ils sont tous morts.
Et pour la petite anecdote, moi, j'ai su il n'y a pas longtemps que mon grand-père, qui lui-même était un enfant à Paris à cette époque, avait vu. Il ne savait pas ce qui se passait. Mais il m'a dit « Ah oui, je suis passé en vélo et j'ai vu toutes ces personnes qui attendaient devant le vélodrome. » Et après, on a su que c'était une rafle de Juifs. Et donc, waouh, quand il m'a dit ça, c'était… Ça fait quelque chose. Ouais, ouais, ouais.
Oui d'ailleurs on n'a pas expliqué exactement quel est le rapport entre le vélodrome d'hiver et cette opération Donc en fait ces 13 000 juifs ont été arrêtés un peu dans tout Paris Ensuite ils ont été parqués, ils ont été enfermés dans ce vélodrome d'hiver pendant deux jours
sans eau, sans nourriture, dans une chaleur atroce parce qu'on était en juillet Et après ça, ils ont été mis dans des trains et ils ont été expédiés vers les camps de la mort Et c'est vrai que c'est intéressant ce que tu dis avec ton grand-père parce que c'est un peu à cette époque, en 1942, que l'opinion publique
commence à changer de camp, on pourrait dire, parce que jusque-là, beaucoup de Français avaient confiance dans le maréchal Pétain. Ils pensaient que le maréchal Pétain avait pour objectif de sauver la France en collaborant avec les nazis. Et là, l'opinion publique commence à se rendre compte de ces rafles, de ces exterminations, et commence à perdre un peu la confiance qu'elle avait dans le maréchal Pétain. Oui, parce que même si la France était très antisémite,
Il y a quand même un pas énorme entre vouloir exclure de l'administration les Juifs et participer carrément au camp d'extermination. Et avant 1942, beaucoup ne savaient pas vraiment ce qu'il se passait. Ils ne pensaient pas forcément qu'il y avait toute cette organisation d'extermination. »
Et si vous êtes intéressé, il y a un film qui s'appelle La rafle, qui est assez récent, qui doit dater d'une dizaine d'années peut-être, même pas, et qui raconte spécifiquement la rafle du Veldiv. Donc oui, l'opinion publique commence un peu à
a tourné, a changé en 1942 mais le régime de Vichy aussi, il commence à se durcir parce qu'à partir de 1942, la zone libre disparaît donc toute la France commence à être occupée et le régime de Vichy décide d'approfondir encore sa collaboration avec les autorités nazies et pas seulement le maréchal Pétain mais aussi
Oui, Pierre Laval, on voulait absolument citer son nom, même si on n'a pas le temps d'en parler beaucoup, parce que dès le début, c'était un homme politique qui était en faveur de l'alliance avec les nazis.
C'est lui qui était le chef du gouvernement à partir de 1942, justement au moment où les choses se sont durcies. A partir de 1942, c'est la Gestapo, la milice hitlérienne nazie qui contrôle les citoyens dans les rues, dans le nord comme dans le sud.
Et il y a un climat de méfiance et les citoyens sont encouragés à la délation. Ils sont encouragés à espionner leurs voisins, leurs amis et à les dénoncer à la police. Donc ça devient très pesant. Oui, de dire par exemple « Ah, je pense que mes voisins cachent des juifs. Je pense que mes voisins écoutent cette émission de radio de la Résistance. » Donc voilà, ces opérations de délation.
qui étaient encouragées par les nazis mais j'ai entendu dans une émission de radio qu'il y avait tellement de délations que les autorités nazies étaient débordées elles avaient trop de travail, elles n'arrivaient pas à traiter toutes ces délations tellement il y en avait parce que
Pour certains Français, c'était aussi un moyen de régler leur compte avec leurs voisins avec qui ils s'entendaient pas, avec des collègues de travail dont ils étaient jaloux. Voilà, certains ont utilisé cette délation pour régler leur compte. Malheureusement, c'est un peu triste.
Et justement, dans une troisième partie, on va faire un peu le point sur la population. Comment était la population à cette époque et quels ont été les différents grands groupes qui ont existé ? Alors d'abord, on va parler de la collaboration. Qui étaient les Français qui collaboraient avec les autorités nazies ?
Donc comme on l'a évoqué avant, il y avait une collaboration politique même plus qu'une collaboration, on peut dire que c'était une subordination du régime de Vichy aux autorités nazies
mais il y avait aussi une collaboration économique des grands groupes industriels qui étaient obligés de produire pour les Allemands mais qui profitaient aussi quand même de cette nouvelle réalité économique En fait, il faut essayer de se remettre dans le contexte de l'époque
une grande partie des hommes d'affaires pensaient que l'Allemagne allait gagner cette seconde guerre mondiale et que c'était la nouvelle réalité dans laquelle on vivait Et donc eux, ils se demandaient : « Comment je vais pouvoir profiter de cette nouvelle situation ? » Et c'est pour ça que certains grands industriels ont décidé de collaborer totalement avec les autorités nazies
Bon, par exemple, pour ne pas les citer, les marques Renault, Michelin, des grandes banques aussi qui ont financé l'armée allemande Donc voilà, il y avait d'abord tout un pan de collaboration économique
Et puis, il y avait aussi des personnes qui étaient convaincues par le régime, qui avaient des idées qui s'approchaient beaucoup des idées nazies et donc qui ont collaboré de façon intellectuelle. Il y a eu des écrivains, des journalistes, des artistes.
On a vu beaucoup de journaux antisémites, on l'a déjà dit, mais ce n'était pas forcément des journaux qui étaient imposés par le gouvernement. Il y avait des personnes qui produisaient des écrits vraiment sincères pour faire la promotion de ce type de régime et pour faire la promotion des valeurs du régime, donc travail, famille, patrie, rejet des étrangers, etc., etc.
Ensuite, il y avait évidemment une collaboration administrative, les personnes qui étaient fonctionnaires de la Troisième République et qui ensuite ont continué de travailler sous le régime de Vichy, encore une fois en étant plus ou moins proactifs, avec parfois la volonté de gravir les échelons, de monter dans la hiérarchie.
quitte à, pour ça, dénoncer encore une fois des Juifs ou en faire plus que les objectifs assignés. Oui, et j'ai vu que dans l'administration, il y avait beaucoup de personnes, des fonctionnaires à tous les grades, qui se considéraient ni comme résistants, ni comme collabos, mais tout simplement comme des fonctionnaires qui font leur travail.
Si le gouvernement change de bord, eh bien, ils exécutent ce qu'on leur demande et c'est tout. J'avais parlé un peu de ça dans mon épisode sur l'expérience de Milgram qui expliquait justement tout ce processus de soumission à l'autorité qui expliquait en partie ce qui s'était passé en Allemagne nazie, mais ça concerne aussi la partie des fonctionnaires et de l'administration française, évidemment.
Qui ont trouvé d'autre du côté des collaborationnistes ?
En général, il y avait aussi des personnes, même si elles ne représentaient pas la majorité, mais dans la population qui était fascinée par l'ordre nazi, qui avait des idées d'autoritarisme. Et notamment chez les jeunes et les jeunes garçons, on avait des pro-nazis, des pro-vichys qui avaient envie que ce régime s'installe sur la durée.
Maintenant, on va parler d'un autre groupe un peu plus glorieux : les résistants Alors après la Seconde Guerre mondiale le discours officiel notamment poussé par le général de Gaulle c'était de dire que tous les Français avaient participé d'une manière ou d'une autre à la résistance à part quelques exceptions
Mais en réalité, les historiens ont montré par la suite que ça représentait seulement 1% des Français et plutôt vers la fin du conflit qu'au début du conflit, pendant les premières années c'était seulement 0,2 à 0,3% de la population française qui participait à la résistance
Alors, en quoi ça consistait cette résistance ? Eh bien, ils faisaient des opérations d'espionnage, de sabotage contre les nazis Ils étaient en contact avec les alliés à l'extérieur notamment avec le régime du général de Gaulle au Royaume-Uni
Ils distribuaient des tracts autrement dit des petits papiers, des flyers avec des informations pour démentir la propagande officielle du régime de Vichy Ils essayaient de publier des journaux clandestins, etc. Donc c'était des opérations d'information
principalement, et aussi les opérations d'espionnage. Oui, c'était une organisation secrète, en fait, qui était très bien organisée, avec plusieurs groupes qui étaient en contact. Et quand on écoute des extraits de l'émission du Général de Gaulle « Les Français parlent au français », on peut entendre des messages codés. Par exemple, on dit souvent « les carottes sont cuites », des choses comme ça, et en fait, c'était des messages codés.
pour les résistants qui, comme tu l'as dit, faisaient de l'espionnage, du sabotage, etc. Ici Londres. Veuillez écouter tout d'abord quelques messages personnels. Gabriel garde l'anonyme.
Le manchot la serre dans ses bras. Nous disons, le manchot la serre dans ses bras deux fois. Le fantôme n'est pas d'avare. Il y en avait quelques-uns aussi qui combattaient physiquement, mais c'est vrai que ce n'était pas la majorité puisqu'on n'était pas dans un combat militaire frontal. Et donc ces résistants, qui représentent une petite partie de la population,
On commençait à partir de 1942, à partir de la fameuse rafle du Veldiv et de l'occupation totale des Allemands, à avoir un peu plus d'aide de la population. C'est pas massif non plus, mais on avait quand même un peu de collaboration entre les résistants et ce qu'on appelle les « justes ». Les « justes », ce sont les Français…
qui ont fait des petits actes de résistance sans faire partie des réseaux. Par exemple, ceux qui cachaient leurs voisins juifs dans leur cave ou ceux qui utilisaient leur matériel professionnel pour faire passer des messages aux résistants. Voilà, des choses comme ça. Oui, et donc après la Seconde Guerre mondiale, on a beaucoup célébré à la fois les résistants et les justes.
Et maintenant, avec le recul, c'est facile de critiquer les Français de l'époque et de dire pourquoi il n'y a pas eu plus de résistants Mais évidemment, il faut savoir que c'était une activité très dangereuse, très risquée Beaucoup de résistants ou même de personnes qui étaient soupçonnées d'être résistantes mais qui ne l'étaient pas étaient arrêtées, torturées, exécutées Et les gens avaient aussi très peur des conséquences pour leurs proches
C'est pour ça que parmi les résistants, c'était souvent des jeunes hommes, notamment des jeunes hommes qui avaient perdu le reste de leur famille, qui n'avaient pas peur de prendre des risques pour participer à ces opérations. Alors oui, il y avait des hommes jeunes célibataires dans le réseau de résistance, mais ce n'était pas la seule sociologie. En fait, justement, ce qui est intéressant dans ce réseau, c'est qu'il y avait énormément de femmes qui, d'ailleurs, ont été...
sous-estimé à la fin de la guerre parce qu'on ne comptait pas forcément toutes les personnes qui participaient au réseau, notamment qui faisaient passer les messages, qui s'occupaient de l'intendance, qui fournissaient des lieux, qui faisaient de la surveillance, etc. Il y avait aussi des enfants, il y avait aussi des vieillards. On peut citer par exemple à Toulouse, il y en a une qui est assez connue, c'était une vieille dame qui avait son atelier de couture et
Et qui faisait passer des messages à travers ça. Donc voilà, juste pour préciser, c'était loin, loin d'être seulement des jeunes hommes qui allaient au combat. C'était au contraire toute une organisation sociale, des tout petits enfants aux adolescents, en passant par les femmes, les vieillards, les vieilles femmes, etc., etc.,
D'ailleurs, c'est un sujet qui, même s'il concerne une minorité de Français de l'époque, qui reste un sujet hyper intéressant à mettre en scène dans les livres, dans les films, etc. Parce qu'il y a beaucoup d'éléments et c'est un bon sujet à explorer. Juste pour me défendre, j'ai cité les jeunes hommes plutôt pour dire que c'était des personnes qui n'avaient...
Plus grand chose à perdre, qui avaient peut-être déjà perdu le reste de leur famille, mais j'imagine que c'était le cas aussi pour certaines jeunes femmes qui avaient peut-être perdu leurs parents, qui n'avaient pas encore d'enfants, et qui donc étaient prêtes à prendre des risques, à risquer leur vie, parce qu'elles savaient qu'elles ne risquaient pas la vie de leurs enfants ou de leurs proches. Mais la majorité de la population, c'était quand même une majorité qu'on appelle attentives.
C'est-à-dire des personnes qui n'étaient ni collaborationnistes ou pro-vichy, pro-nazi, ni des résistants, ni des justes. Mais en fait, des personnes qui simplement essayaient de survivre, qui avaient peur, qui ne savaient pas vraiment comment réagir et qui ont laissé un peu le temps passer. Parce que c'est vrai que la vie dans la France occupée, elle n'était pas facile.
Ouais, effectivement, il y avait des pénuries de nourriture parce que la grande majorité des productions des récoltes étaient utilisées pour nourrir l'armée nazie Donc voilà, il y avait des pénuries de nourriture Il y avait la police un peu partout que ce soit la Gestapo ou la milice française Les maisons étaient régulièrement fouillées pour voir si les habitants ne cachaient pas des Juifs ou ne faisaient pas partie de la résistance
Et il y avait ce climat de peur aussi à cause de la délation. On avait toujours peur que nos voisins nous dénoncent ou que nos collègues nous dénoncent. Et on ne savait pas vraiment à qui on pouvait faire confiance. Voilà, on va s'arrêter là. Je pense qu'on a fait un bon résumé de ce à quoi ressemblait la France entre 1940 et 1945. Au-delà de ce qu'on peut imaginer
Imaginez, au-delà des histoires qu'on se raconte, il y a une réalité qui est beaucoup plus nuancée. Et du coup, moi je me demandais, après notre introduction, dans vos pays, dans votre éducation, que vous soyez des étrangers qui habitent en France ou que vous soyez seulement des francophiles qui habitent à l'étranger ?
Qu'est-ce que vous savez sur cette période ? Qu'est-ce que vous aviez appris ? Est-ce que vous aussi, comme les Français, vous aviez cette idée qu'il y avait beaucoup de résistance ? Ou est-ce que vous étiez plutôt comme les Anglo-Saxons ? Vous pensiez que les Français n'avaient pas du tout combattu et étaient simplement des collaborationnistes ? Voilà, qu'est-ce que vous saviez de ça ? Dites-nous tout ça dans les commentaires, on est très curieux de vous lire !
Merci de nous avoir écouté jusqu'au bout et on se retrouve dans deux semaines. Salut !