France Info Junior maintenant, des questions d'enfants sur le mal-logement aujourd'hui et c'est vous qui allez y répondre. Manuel Domergue, bonjour. Bonjour. Vous êtes le directeur des études de la Fondation pour le logement des défavorisés, c'est le nouveau nom de la Fondation Abbé Pierre, qui publie aujourd'hui son rapport sur l'état du mal-logement en France.
Première question de Mélissande. C'est quoi le mal-logement ? Alors le mal-logement, il n'y a pas une définition absolue. C'est les gens qui ne sont pas bien logés. Et donc ça, ça évolue avec le temps. Mais aujourd'hui, nous, à la Fondation, on estime que les personnes mal logées, elles sont 4 millions. C'est les personnes qui n'ont pas de logement, qui sont à la rue, en hébergement d'urgence.
Les personnes qui vivent en surpeuplement accentué, c'est des gens à qui il manque deux pièces pour vivre correctement. Par exemple, si les parents dorment sur le canapé du salon et qu'il y a trois enfants dans la chambre d'à côté, c'est du surpeuplement accentué. Vous êtes mal logé et c'est aussi du logement inconfortable, dangereux pour la santé ou la sécurité des personnes qui y habitent. Notamment en termes de chauffage, par exemple. On en parle beaucoup en ce moment. Oui, tout à fait. La précarité énergétique, c'est aussi une réalité très forte. Il y a 12 millions de précaires énergétiques en France.
30% des Français qui disent qu'ils ont eu froid chez eux au cours de l'année. Et ça, c'est parce que les prix de l'énergie pour se chauffer, l'électricité, le gaz, ils ont beaucoup augmenté ces dernières années. Et aussi parce qu'il y a des logements qui ne sont pas très performants. Question de Gabi. Pourquoi des personnes sont mal logées ? Pourquoi les personnes sont mal logées ? Alors, c'est une bonne question. Il y a plein de réponses difficiles. C'est plutôt les personnes, elles sont mal logées parce qu'elles ont peu d'argent. Quand tu as moins d'argent pour payer ton loyer tous les mois ou pour acheter une maison ou un appartement...
évidemment, tu te ravas par défaut sur des situations, des logements qui sont moins bons. Et puis aussi, une des raisons pour lesquelles il y a du mal au logement, c'est qu'il y a une pénurie de logements en France. On n'a pas assez de logements vraiment pour tout le monde. Et donc, quand il y a un logement qui se libère, à la location, à l'achat, il y a plein de candidats pour l'acheter ou pour le louer et tout le monde ne l'a pas.
Dans ce dernier rapport paru aujourd'hui, vous soulignez notamment qu'être porteur de handicap peut être une cause de mal logement. 6% des personnes en situation de handicap sont mal logées contre 4% dans la population générale. Mathilde Nansker pour France Info est allée sur le terrain pour comprendre pourquoi. On écoute son reportage et puis on vous retrouve juste après avec les enfants. Les difficultés débutent dès la recherche du logement. De très nombreux sites sont inaccessibles, même à
avec un ordinateur adapté. Je vais essayer de trouver une ville et c'est là que ça commence. Manuel Pereira travaille à l'association Valentin AUI et il est lui-même aveugle. On va taper un code postal 94 600. Là, il faudrait cliquer pour confirmer mais comme le site n'est pas adapté, son ordinateur ne peut pas le lui dire. Résultat ? 22 400, une annonce de location de maison ou d'appartement en Ile-de-France.
Là, j'ai 22 000 annonces. Et je n'aurais d'autre alternative que de demander l'aide d'une personne voyante. Ce n'est pas satisfaisant. Autre impératif pour les personnes déficientes visuelles, être en centre-ville pour rester proche des transports et des magasins. Il faut que je sois moi en capacité de m'orienter. Jean-Pierre cherche un appartement depuis des années. Pour lui, ce qui bloque, c'est surtout les revenus. Mais on lui a déjà refusé un logement pour d'autres raisons. Quand on creuse un peu...
Oui, mais de toute façon, vous ne pouviez pas accéder parce qu'il y a des marches, donc ça va être difficile. Donc là, on comprend qu'en fait, à l'origine, il est aveugle, donc non, on ne peut pas lui louer l'appartement. Autre exemple, une propriétaire lui a un jour refusé une location à cause de son chien guide, prétextant que l'animal allait abîmer son parquet.
Ce reportage de Mathilde Anscaire, Manuel Domergue, de la Fondation pour le logement des défavorisés, être porteur de handicap, ça peut être une source de mal logement, vous avez voulu le souligner. Oui absolument, on a fait toute une enquête là-dessus. Les personnes handicapées, elles ont moins de revenus, elles sont plus souvent pauvres à 30%.
Donc forcément, quand on est plus pauvre, on a plus de mal à trouver un logement. Et elles sont victimes de discrimination, comme on l'a entendu dans le reportage, avec des idées reçues. On a entendu un bailleur qui disait « Vous êtes sourde, vous ferez beaucoup de bruit la nuit ». Voilà, ça repose sur rien, mais il y a des choses comme ça. Et puis, il n'y a aussi pas assez de logements qui sont adaptés aux différents types de handicaps.
Et donc, il y a beaucoup de personnes handicapées qui se reportent sur des logements qui ne sont pas adaptés, où elles ont du mal à faire entrer leur fauteuil roulant, à se repérer dans l'espace, etc. Donc ça, c'est aussi des formes de mal-logement particulières aux personnes handicapées dans des logements inadaptés. Allez, on passe à une autre question. Bonjour, moi c'est Louane.
Combien y a-t-il à peu près de personnes sans abri dans la France ? Vous avez fait le décompte dans votre rapport publié aujourd'hui. Oui, alors on estime qu'il y a 350 000 personnes en France qui sont sans domicile, c'est-à-dire soit sans abri, qui vivent à la rue, soit dans des hébergements, des hébergements d'urgence, des hôtels. Les personnes vraiment sans abri, puisque c'est la question, c'est les gens qui dorment vraiment à la rue, dans la rue.
dans une voiture, etc. Ça, on a plus de mal à les compter. La Cour des comptes a estimé il y a quelques années qu'il y en avait 40 000. Et pour ce qui est des personnes sans domicile, 350 000 aujourd'hui, c'est un niveau inédit et c'est un chiffre qui a doublé en 10 ans ?
Oui, 350 000 personnes sans domicile, on n'a jamais connu ça. En 2012, la dernière enquête de l'INSEE disait qu'il y avait 143 000 personnes sans domicile. Donc on est passé de 143 000 à 350 000, ça a plus que doublé en quelques années. Donc c'est une aggravation très rapide et très inquiétante.
Question d'Elina sur les personnes mal logées ou sans domicile. Est-ce qu'on peut leur construire des logements ? Oui, bien sûr. La solution pour les personnes mal logées, c'est d'avoir des logements en plus. On n'a pas assez de logements en France. Après, c'est compliqué de construire des logements. Il faut un terrain.
ils font des matériaux, il faut de l'argent pour le construire et il faut que les personnes qui sont mal logées aient aussi de l'argent pour se payer un loyer ou l'acheter. Donc ça, c'est compliqué. C'est pour ça qu'on a inventé le logement social. Le logement social, c'est des loyers plus bas pour les personnes qui n'ont pas beaucoup
de revenus. Sauf que c'est compliqué à construire aussi et parfois il y a des résistances, il y a des réticences de certains maires, parfois de certains voisins qui ne veulent pas avoir un programme de logement sociaux à côté de chez eux parce que ça leur fait peur, parce qu'ils pensent que ça va faire baisser les prix des logements, ça va créer... Il y a beaucoup de préjugés, beaucoup de clichés sur les habitants des logements sociaux et c'est ça qu'il faut réussir à combattre chacun dans son quartier aussi. On passe maintenant, Manuel Domergue, à ces questions de Lucien et Liam.
Est-ce qu'un logement mal logé est compté comme une arnaque ? Les mal logés se font-ils rembourser quand ils remarquent qu'ils sont mal logés ? Oui, alors effectivement, si vous louez un logement qui ne répond pas aux normes obligatoires de décence, etc., vous pouvez demander à votre propriétaire bailleur soit de ne pas payer le loyer si c'est vraiment très dégradé, soit d'avoir une baisse de loyer. Donc ça, c'est la loi, le prévoit. Il y a assez peu de locataires qui s'en emparent.
Et puis aussi, si vous êtes mal logé, vous pouvez attaquer l'État en justice. Ça s'appelle le droit au logement opposable. On fait une démarche et puis si l'État ne vous a toujours pas relégé au bout de quelques mois, l'État doit vous donner de l'argent à vous. Bon, ça ne marche pas tout le temps, mais en tout cas, théoriquement, ça existe. On a une idée du nombre de personnes qui, chaque année, trouvent un logement convenable grâce à ce droit au logement opposable ?
Oui, il y a plusieurs dizaines de milliers de relogements chaque année grâce aux droits aux logements imposables, mais on sait qu'il y a encore plus de 100 000 ménages qui sont en attente alors qu'ils ont été reconnus droits aux logements imposables. Ils ont fait condamner l'État et pour autant, ils ne sont toujours pas relogés. Et ce chiffre, il augmente chaque année parce qu'il y a une pénurie de logements sociaux importante en Europe.
On construit de moins en moins, on en attribue de moins en moins chaque année, donc forcément, c'est difficile de résoudre cette équation. Et enfin, cette question d'Agathe sur votre mission. À vous, la Fondation pour le logement des défavorisés auprès des mal logés et des sans-abri. Comment faites-vous pour les aider ? Notre fondation, elle cherche à récolter de l'argent de la générosité du public.
des gens qui nous donnent un peu de leur argent pour aider les personnes mal logées. Avec cet argent, nous, on va financer des actions concrètes sur le terrain, soit directement nous, soit par des associations de terrain qui vont accompagner les personnes à la rue pour les accompagner vers un logement, faire les démarches, reprendre des soins, etc. On construit des logements aussi nous-mêmes, on finance des logements vraiment pas chers pour les gens qui n'ont quasiment rien pour payer un loyer.
Aussi, on essaie d'éviter les expulsions locatives. Donc, quand il y a des gens qui n'arrivent pas à payer leur loyer, ils sont menacés d'expulsion par la police. Et donc, on les accompagne pour qu'ils trouvent des solutions pour payer leur dette, pour trouver un logement moins cher, etc. Donc ça, on a 900 projets associatifs qui sont financés chaque année par notre fondation. Merci beaucoup, Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation pour le logement des défavorisés, nouveau nom de la fondation AB Pierre. Vous publiez votre rapport.
rapport sur le mal-logement en France. 4 millions de personnes mal logées, 12 millions de personnes fragilisées par la crise du logement, 350 000 personnes sans domicile en France. Merci d'avoir répondu aux questions des enfants de France Info Junior. Une émission à podcaster sur l'appli Radio France, préparée par Marie Mougin et Estelle Faure.