France Culture Devant le commissariat, le Havre, samedi 4 avril. Inès ? Salut Alma. Salut. Comment ça va ? C'est chaud. Montre. Non attends, touche pas. T'inquiète, je fais gaffe. Ouais, t'as l'arcade ouverte. Je suis allée aux urgences. Ça fait mal. Aux côtes aussi. Mon frère il m'a détruite. Tes parents, qu'est-ce qu'ils ont dit ? Ils ont appris pour les nudes et ils ont vrillé. Mon père il m'a virée de la maison. Et ta mère ? Elle a rien dit.
François Zardi ?
Ouais, je te jure. Ta frange, ta grande bouche, je sais pas, t'as la tête de ta voix. Je préfère ça à Rihanna. Rihanna, pourquoi Rihanna ? Non, rien, t'inquiète. Allez, viens, on y va. Bonjour, madame. Bonjour. Affiche ton ex. Affiche ton ex. Écrit par Romain Weber, d'après une enquête de Constance Villanova,
Réalisé par Sophie O'Peaky. Tu en montres trop, on te traite de salope. Je ne sais plus à qui j'en veux. Est-ce que les policiers sont suffisamment formés ? Elle avait montré une photo dénudée de elle. Pour accueillir les gens qui ont été victimes de revenge porn. Sur Instagram. Au drame, parfois. C'est elle qui est montrée du doigt. Et après, elle s'est fait insulter par tout le monde au collège. Elle s'est usée sans son accord. Et après, elle a changé de collège. Si tu ne montres rien, tu passes pour une coincée. Quatrième épisode, je ne sais plus à qui j'en veux. Au commissariat, Le Havre.
Il n'y a pas trop de monde, on a pas de chance. Ouais, bah quand même, on n'est pas seuls. Oh, c'est une fille ! Mais qu'est-ce qui vous est arrivé ? On m'a frappée. Oh, ma pauvre ! Mais je vous en prie, passez devant moi. Allez-y ! Allez-y ! Merci. Merci, madame. Bonjour. Bonjour. Je... Je viens pour une plainte. Pièce d'identité, s'il vous plaît. Alors, tenez. Vous êtes mineure... Oui, mais je suis accompagnée. Bonjour, madame. Pièce d'identité ?
Vous êtes de la famille ? Non, je suis une amie. Vous n'avez pas de famille, mademoiselle Amdani ? Si. Pourquoi vous n'êtes pas avec un membre de votre famille ? Il ne pouvait pas. Ça change quelque chose ? Non, non. Salut Natacha. Salut François. Qu'est-ce qu'on a ? Tu peux prendre une plainte ? C'est quoi ? La jeune fille. Tu peux vapoter ailleurs, François, s'il te plaît ? Qu'est-ce qui lui arrive ? C'est pour ce qui vous est arrivé au visage, mademoiselle ? C'est pour ce qui s'est passé avant, surtout. Qu'est-ce qui s'est passé avant ?
Je dois le dire ici ? Vous êtes là pour ça, non ? Monsieur, il y a du monde. Vous êtes ensemble ? Je l'accompagne. Avec la pandémie, on a des priorités. Donc il faut me dire avant. Ben, j'ai été victime de... de revenge porn. Pardon ? De revenge porn. Revenge porn ? Oui, c'est mon ex, il a diffusé des photos de moi. Des photos porno ? De moi, nue, oui.
Vous êtes actrice pornographique ? Non mais pas du tout ! Elle n'y aura pas de honte. Elle n'est pas actrice porno, elle vous dit. Monsieur, je crois que cette jeune fille a besoin d'un petit peu d'intimité. Oui, une seconde madame. Donc vous auriez été victime d'un délit virtuel qui aurait occasionné une attaque réelle, c'est ça ? Oui, c'est ça.
Alors pour ce qui est de l'agression physique, je peux prendre la plainte. En revanche, les délits virtuels ne sont pas une priorité en ce moment. Mais c'est lié. On pourra pas donner suite malheureusement. Vous avez pas le droit de refuser une plainte. On est en pleine pandémie, vous n'imaginez pas le travail. Donc le virtuel, je suis navré mais ça passera quand j'aurai le temps. Mais on a pas demandé à passer avec vous en fait. François, regarde, il y a juste la dame après de toute façon. Ah mais je suis pas pressée. Occupez-vous de ces jeunes femmes, monsieur. Bon, euh, ok. Suivez-moi. Je le sens pas du tout. Moi non plus. Mais on y est.
Là, entrez. Bonjour, bonjour, bonjour mademoiselle. Mélanie, on a un cas de revenge porn. Je vous laisse dans deux minutes, j'ai un accident à Bléville. Hamdani Inès, né le 15 décembre 2003 au Havre. Je vous écoute. Ben, il y a deux semaines, j'ai quitté mon ex. Il s'appelle Anthony Porquet.
Et pour se venger, il a envoyé des nudes de moi à un compte Snapchat qui s'appelle Affiche ta pute le Havre et qui les a diffusées. Alors oui, on a vu passer ce compte. Donc on parle de photos volées ? Bah, à l'époque, elles n'étaient pas volées. Comment ça ? À l'époque, on était en couple. Ah, donc c'est vous qui les avez prises ? Oui. Je ne comprends pas si c'est vous qui les avez prises. Mais c'était juste pour lui. Ce n'était pas pour tous les maîtres du Havre, François. Elles sont toujours en ligne, ces photos ? Snapchat, c'est temporaire. Elles n'y sont plus.
Elles sont restées combien de temps ? Trois minutes. C'est pas grand-chose. Oui, mais c'est parce qu'on a fait fermer le compte après. Elles ont été vues par des milliers de personnes, monsieur. Il aurait peut-être fallu y réfléchir avant, non ? Bon, et... Ce que tu as au visage, Inès, c'est ton ex qui t'a fait ça ? Euh, non, c'est pas lui. C'est après, quand j'ai été fichée sur Telegram. Ok, raconte-nous, je reste encore une minute. Ben, en fait, je... Attendez, euh...
Je suis un peu perdue là. Prends ton temps. On a fait fermer la fiche ta pute, Inès. T'en étais là. Ouais. J'ai la tête qui tourne là, je me sens pas bien. Tiens, prends une gorgée. Merci. Donc, on a fait fermer la fiche ta pute, mais mon ex, il a encore les photos. Et hier, il a renvoyé mes nudes au plus gros compte fichat de toute la France. Il y a 210 000 personnes dessus. 210 000 ? Et il y a mon frère dessus.
Et quand il a vu les photos, il a voulu me punir. Ah donc c'est votre frère qui vous a fait ça ? Et ensuite, vos collègues l'ont arrêté. D'accord. Je leur demanderai de nous faire suivre le dossier. Et c'est quoi ces photos exactement ? C'est moi, toute nue quoi. Et ? Vous les avez là ? Bah oui, je les sais mais... François. Quoi ? C'est le cœur de l'affaire. Vous pouvez me les montrer ces photos s'il vous plaît ? Madame, s'il vous plaît, montrez-les à moi plutôt. Non mais c'est toi qui prends la plainte Mélanie ? Non !
Donc s'il vous plaît, Madame Ramdani, montrez-moi les photos en question. Tout de suite ? Oui. Je suis obligée ? Bah ça aussi, ce ne sont pas des éléments importants du dossier. Je fais quoi ? Montre-lui. Monsieur, c'est gênant de vous montrer. Vous avez beaucoup de courage de le faire. Je suis avec toi. Tenez. Ah bien. D'accord, donc on a une, deux, trois photos. Il y en a d'autres ? Non. Mais François, tu leur craches ta fumée dessus là. Ah pardon. Mais juste, tu trouves ça excitant d'envoyer ça ? Pardon ?
Non, je dis, tu trouves ça excitant ? Tu crois que c'est sexy ? À qui vous parlez ? À Inès. Tu trouves ça excitant ? Ben, c'est lui qui voulait. Et donc, quand on te demande un truc, tu le fais ? Je sais pas. Tu veux voir, Mélanie ? Non, non, François, je veux pas voir. Bon, écoutez, mademoiselle Amdani, moi, je sais pas si ça vaut le coup que je mette ça dans le dossier, vos photos, là. Hein ? Si ça va au tribunal, j'ai peur qu'elle dégoûte les juges. C'est pour vous que je dis ça. Mais quoi ? Ok, je peux partir à la masse, s'il te plaît ? Non, on reste. Mélanie ? Oui ? On vous demande pour l'intervention ? Ok, j'arrive.
Madame, s'il vous plaît. La voiture part dans une minute. S'il vous plaît. Je reviens. Je vais pas tenir. Bien. Donc on en était à... Au moment où vous lui disiez que ces photos étaient dégueulasses et que vous alliez pas les mettre dans le dossier. Ah, c'est pas ce que j'ai dit, mademoiselle. Et vous vous rendez compte ? De ? Vous savez comme c'est dur de venir raconter à un policier la façon dont on s'est fait humilier ? Hein ? La honte qu'on éprouve quand on est victime de ça, putain !
Eh, on va descendre d'un tronc. Vous avez une fille de 17 ans en face de vous qui s'est fait détruire, qui s'est fait afficher devant 200 000 personnes, qui s'est fait tabasser par son frère et qui s'est fait chasser de chez elle. Elle vient vous demander de l'aide et vous, vous trouvez rien de mieux que de lui répondre qu'elle est dégueulasse. Moi, je vais vous demander de sortir, mademoiselle. Elle est pas venue savoir ce que vous pensez de ces photos, putain. C'est son ex qu'il faut juger. C'est les mecs sur le groupe. C'est son frère qui lui a pété la gueule. Qu'est-ce qu'il y a de compliqué à comprendre là-dedans ? Un peu d'empathie, ça vous arracherait la gueule ?
Bordel, y'a même des oiseaux qui ont de l'empathie ! Allez, ça suffit, là, sortez. Et toi ? Tu trouves ça excitant ? Pardon ? Je suis sûre que t'étais dessus. Sur quoi ? Y'avait 12 000 personnes. Je comprends pas. Y'avait 12 000 personnes sur la fiche d'apute quand on l'a fait tomber. On est 170 000 au Havre. 85 000 mecs. T'as quel âge, toi ? Eh, tu me tutoies pas. Je suis sûre que t'étais dessus. C'est pas la première fois que tu les vois, ces photos. François, on te demande pour l'accident à Bléville. Hein ? Y'a besoin de toi pour Bléville ?
Je m'occupe de la plainte. Pour Bléville, il y a besoin de moi ? Oui, maintenant. Ok. Si on a besoin de moi, mademoiselle. Merci François. Connard. Bien. On va reprendre depuis le début, mais dans le calme. Merci madame. Bureau de Pharos, Nanterre, samedi 4 avril. Putain, mais j'hallucine. Quoi ? La meute. Ça fait 10 réclamations que j'envoie à Telegram pour qu'ils le ferment. Aucune réponse. Et les gars, on sait même pas qui c'est. C'est des fantômes.
Ça sert à rien de toute façon. Hein ? J'en peux plus. Quoi ? Me battre contre une armée de malades qui recommence tous les jours les mêmes horreurs. Tous les jours. Tous les jours. J'en peux plus. Ça va ? Non. Viens, on va prendre l'air, viens. Ok. T'en veux une ? T'as vu mon ventre ? Pardon, j'avais oublié. Alors ? Qu'est-ce qu'il se passe ? C'était la goutte d'eau là ce matin. Pourquoi ? Je croyais que j'étais blindée. Et là, avec le bébé qui arrive... Ce matin, j'ai eu un signalement pour un tweet. Ouais ?
C'est même pas une image ou une vidéo. C'est un mec. Il a juste écrit « besoin de Smarties ». Besoin de Smarties ? Avec un smiley. C'est un code chez les pédos. Ça veut dire qu'il veut des photos. Et je l'ai dans la tête, ce putain de smiley. Quand je l'ai vu, c'est comme ça. T'as soufflé avant de cliquer ? Non, j'ai oublié. J'ai signalé à Twitter, ils disent que c'est pas contre leurs règles. Ouais, parce qu'ils parlent de Smarties. Ça m'a achevé. On se bat pas que contre des malades, Rebecca. C'est une hygiène.
Y a les agresseurs, c'est la partie visible. Les pédos, les mecs qui affichent. Y a ceux qui partagent, y a ceux qui tiennent les groupes. Et à la racine, y a les plateformes. Ouais. Américaines, chinoises, russes, ils s'en tapent. Oui. Les saloperies. Si ça leur apporte des utilisateurs, ça leur va. C'est comme un champ de pétrole. Tant pis si c'est dégueulasse. Ils pompent jusqu'à la dernière goutte. Je peux plus supporter ça. Protège-toi. Je vais arrêter. Le Havre, samedi 4 avril. On sort du commissariat avec Inès.
J'ai encore l'odeur de la clope élect de l'autre con. Un parfum caramel qui me donne envie de gerber. On se pose au jardin japonais. C'est le parc où j'ai quitté Alex. On est hyper énervés, mais quand même vachement fiers. Comment tu l'as défoncé ce vieux pervers là ? Il savait plus où se mettre. T'as pas baissé le regard, bim ! T'es trop forte meuf. Heureusement qu'elle était là l'autre. Franchement j'aurais jamais tenu si elle l'avait pas virée. Avec sa vieille odeur là putain. Bon maintenant on va prier pour qu'ils emmerdent ton ex. Tu crois que ça va marcher ? J'en sais rien.
Trop cool, il y a Shanley sur Konbini. Ah ouais ? Ça intéresse les gens ce que vous faites ? Pas beaucoup. Il n'y a presque rien, c'est ouf. Mais là, Konbini, t'en viens, on regarde. Alors, je m'appelle Shanley, j'ai 21 ans et depuis le début du confinement, je traque les comptes de Revenge Porn sur Snapchat. Ça fait deux semaines et quelques jours, depuis le 23 mars, qu'on lutte contre ces comptes. On a dû en faire sauter plus de 150. Ah !
Les filles, elles nous envoient les captures d'écran. Mais il y a d'autres filles qui sont enfermées dans un mutisme lié au confinement parce que c'est de l'isolement psychologique mais aussi physique. Et donc il y a énormément de filles qui n'osent pas en parler parce qu'elles ont trop honte. Moi, cette vidéo, c'est clairement un appel à l'aide. On fait de l'autogestion et on fait justice par nous-mêmes. Mais malheureusement, ça ne suffit pas parce qu'on n'a pas assez d'outils. On en veut aux personnes qui tiennent ses comptes, mais aussi aux spectateurs ainsi qu'aux personnes qui alimentent ses comptes avec les photos de leur ex.
J'aimerais vraiment passer un message aux victimes. Vous n'êtes pas seules. On est là, on est toutes ensemble. Et on continuera de lutter. Si vous souhaitez nous contacter, n'hésitez pas à nous envoyer un petit email. Nous, on est en contact avec l'avocate en charge de l'affaire et on vous aidera. Oh là là, c'est une reine cette fille. Grave. L'avocate, c'est Rachel. C'est elle qui va s'occuper de toi. Ok. T'es courageuse d'avoir porté plainte. Tu vas avancer. Moi, j'avance pas. Comment ça ? Il m'est arrivé la même chose que toi.
Je le savais. C'est pas allé aussi loin que toi, mais moi aussi mon ex il a mis des photos. Enfin, c'est pas lui je crois. Et t'as porté plainte ? Non, c'était à une soirée. Y'a trop de suspects, ils trouveront pas. Mais maintenant y'a un mec qui me fait chanter. Quoi ? Y'a un type, il a mes photos. Et vu que je lui renvoie d'autres trucs, sinon il m'affiche. Et t'en as parlé à quelqu'un ? Non, t'es la première. Mais Alma, pourquoi tu m'aides et tu fais rien pour toi ? J'ai peur de décevoir les gens.
Et ton ex, là, tu crois qu'il a peur ? Non, eux, ils ont jamais honte. Tu lui as envoyé des photos au type ? Ouais. Il t'a renvoyé quelque chose ? Tout à l'heure, ouais. Montre. Salut, je reviens faire un tour dans la savane, mais cette fois, je veux te voir en vrai. Pourquoi il parle de savane ? C'est un malade. Mais genre, il s'est cru dans un documentaire animalier ? Il est fou, le gars. Et la saison 2, c'est quoi ? C'est l'Amazonie ? Au pôle Nord, peut-être, ouais. Putain, me fais pas.
Ça fait mal. Mais il est cinglé ce type en fait. Mais attends, c'est un mec du Havre s'il veut te voir. Bah j'imagine ouais. Et tu sais pas qui c'est ? Bah non. Faut lui foutre une grosse pression. Le traumatiser genre. T'as une idée ? Les flics ça suffit pas. Il peut balancer tes photos après. Faut autre chose. Quoi ? Le défoncer. Le défoncer ? Ouais. Y'a que ça qu'ils comprennent. Tu connais pas quelqu'un ? Si peut-être. T'as raison.
C'est quoi ça ? Quoi ? C'est une pote là, elle m'envoie un article. C'est sur une fille au Havre. Fais voir. Mercredi 1er avril au Havre. Élise, une ado de 16 ans, s'est suicidée en se jetant du 4ème étage. Au lendemain du drame qui a coûté la vie à sa fille, Cindy ne peut pas retenir ses larmes.
Je n'ai pas encore de réponse précise, mais je sais que ma fille s'est suicidée en grande partie à cause des réseaux sociaux. Elle a été victime de harcèlement sur YouTube, Snapchat et TikTok. Des photos ont circulé. Je sais bien qu'elle n'est pas la seule à avoir vécu ça. C'est tombé sur nous. Chez Laure, Paris. Journal de confinement. Samedi 4 avril, la plainte d'Inès s'est mal passée. Shanley a fait une interview sur Konbini aussi. Depuis, elle tourne sur les groupes Ficha. Et ils deviennent dingues. Exemple ?
Si cette traînée fait sauter mon groupe, je m'occupe d'elle. C'est elle qui veut nous faire sauter, les frérots. Shanley, elle s'appelle. Quelqu'un a un truc sur elle ? Nique sa mère, on veut juste se branler, nous. Et pire ! Au Havre, chez Alma et Inès, il y a une jeune qui s'est tuée. Elles se reconnaissent en elle. C'est elles qui nous ont envoyé l'article. Ce soir, on fait tout pour faire sauter la meute. On devrait être 600 à se connecter. Faro s'est télégramme, ils pourront plus fermer les yeux. Après, j'arrête.
Bureau de Pharos, Nanterre, lundi 6 avril. Entrez à Raphaël. Capitaine, on vient de recevoir une info du Havre. Je vous l'ai imprimée. Qu'est-ce que c'est ? Une ado qui s'est tuée après s'être fait harceler sur les réseaux. On nous avait signalé quelque chose qui la concernait ? Non. Bon alors c'est triste, mais qu'est-ce qu'on aurait pu faire ? Avec plus de moyens, on n'attendrait pas les signalements pour agir. Mais ça arrivera, Raphaël.
Ce genre d'événement et ce collectif qui fait parler de l'huile, Stop Ficha... C'est des ados qui font le travail à notre place. Dans la police, c'est en passant les tempêtes qu'on nous donne le plus gros bateau. J'en peux plus de vos métaphores, capitaine. Habituez-vous, parce que j'ai besoin de vous. Vous savez que Rebecca prend son congé maternité en avance ? Oui, je sais. Elle part à la fin de la semaine. Où est-ce que vous en êtes de ce nouveau groupe Ficha sur Telegram ? La meute ? Ils sont presque 230 000 et Telegram répond pas. À part insister, je ne vois pas ce qu'on peut faire.
Vous arriverez peut-être à le faire sauter avant que Rebecca s'en aille. J'espère. Elle s'appelle comment cette petite du Havre ? Élise. Faites-le pour elle. On va essayer. Bonne soirée, capitaine. Bonsoir, Raphaël. Allez ! Ça fait tellement longtemps qu'on ne s'est pas vus, meuf. Ça fait grave plaisir. On s'en fout du Covid, on se fait la bise. Attends, meuf, viens, on va se planquer parce que j'ai pas mon attestation. Au cas où les flics passent, ça marche. Tu veux une clope ? Ouais, je suis chaud.
Quoi ?
J'aurais chopé une meuf 5 points, il s'en tape une 15 points, etc. Attends, et Alex, il a fait ça ? Ouais, meuf. Mais non, c'est pas possible, ça lui ressemble pas. Mais il l'a fait, Alma. Et pour gagner des points, il faut montrer des preuves. Quoi comme preuves ? Des messages, des photos. Attends, il leur avait montré mes youdes avant ? Mais tu te rappelles quand Lily ? Elle t'a sorti tous les détails là devant le lycée. Ah, mais il avait tout montré même avant que ça tombe sur Snap. Exactement.
Mais avec qui je suis sortie ? Non mais dans un groupe, c'est pas les mêmes les mecs. Même un gentil peut devenir méchant. Et ça sert à rien de chercher celui qui a pris le portable d'Alex ? C'est toute une équipe de foot qui m'a affiché en fait. Mais c'est un peu ça le concept. C'est même pas parce que j'ai quitté Alex. Ils attendaient juste une excuse. Ta mère elle le sait ? Pas encore non. Putain mais comment on fait pour faire confiance à un mec après ça ? Je sais pas, je sais quoi. Juliette, ce soir on attaque le plus gros compte fiché de France. C'est un tableau de la Ken, mais avec 230 000 mecs. Tu le fais avec nous ? Mais bien sûr. Cool.
Putain, c'est bizarre. Quoi ? Je sais pas. Je crois que je sais plus à qui j'en veux. Bureau de Pharos et Stop Ficha, lundi 6 avril. 19h58. On va recevoir des signalements en masse. Ils sont à combien ? 230 000 membres. Oh putain. Il va falloir un max de signalements pour le faire tomber. Focus sur les signalements de mineurs. Y'a que ça qui les fait chier de télégramme. On va les avoir. Les meufs, c'est historique. On est 658 pour faire fermer la meute. C'est pas mal. C'est ouf.
659, j'ai une pote qui vient de se connecter. J'ai envoyé les liens. Chaque photo, on signale à Pharos et direct à Telegram. Vous êtes prêtes ? Ready, chaud bouillant. On les met à terre. Alors attendez, ça commence. Il y en a un qui dit, les frères, ce soir on affiche tout le monde ou juste les putes ? Et il y en a un autre, juste les meufs qui trompent mec. Respect pour celles qui respectent. Et il y en a un qui dit, affiche tout le monde fraté, nique sa mère. Ouvrez bien vos gueules, la barbac arrive. La barbac ? 3, 1, 20h.
Allez, ça démarre. Ok, il y a les photos qui sortent. On entre dans le groupe, les meufs. 600 nouveaux membres en 10 secondes, ils comprennent rien. On signale, les meufs, on signale. Je screen tout. Margot, Lille, 19 ans, signalé. Jo, 22 ans, signalé. Mélissa, 17 ans, Lyon, signalé. Clara, 14 ans, putain. Signalé à Pharos.
Attendez, il y a un mec, il a sorti. 14 ans, vous abusez les frères, il est où le respect ? Et t'en as un autre qui répond, mec, fais pas genre, 14 ou 32, on n'est pas là pour respecter. Ça y est, on s'est fait cramer. Il y en a un qui dit, d'où il y a 600 nouveaux membres qui arrivent d'un coup, putain. Mélissa, 17 ans, bim, pédopornographie. Clara, 14 ans, pédopornographie. 14 ans. On envoie les deux à Télégramme.
On va les avoir. Attends, qu'est-ce qu'ils disent ? Euh, chaud les gars, ça signale en masse sur le groupe. On s'est fait infiltrer les mecs, la meute, vous êtes bêtes. Ce soir c'est la fin, on vous encercle et on fout le feu. Élise, ça vous dit quelque chose ? On fait ça pour elle, allez crever sale bâtard. Ça parle d'une fille qui s'appelle Élise, c'est pas la petite du Havre ? C'est Stop Ficha. Attends, je mets un truc, pour Élise, signer une barque.
dans une tempête de merde. T'es con. Qui parle de barque, là ? Tempête de merde ? J'avoue, c'est chelou. C'est vous, les meufs ? Pas moi. Non plus. Ça vient pas de chez nous, ça. Attendez. Quoi ? Bah...
Mais ouais ! Ça marche plus ! Vous ne pouvez pas accéder à ce canal parce qu'il y a été diffusé du contenu illicite. Y'a plus de canal, les filles. Ça a sauté ! On l'a fait sauter ! 200 000 cafards d'un coup ! T'es dead, la meute, t'es dead ! On a réussi ! On a réussi, putain ! Raphaël, y'a plus de canal. Hein ? La meute. Telegram l'a fermée. On l'a fait sauter. C'est terminé. T'entends ? Y'a plus de signalement. Tu sais, je comprends pas. La nouvelle génération...
Ils sont censés être un peu plus féministes, non ? Censés. C'est pire qu'avant, non ? 230 000 mecs, c'est la population de l'île. Ouais, peut-être. C'est pas de leur faute à ces filles, t'as raison. Et c'est con d'appeler ça « revenge porn ». Est-ce que c'est frustrant de ne pas pouvoir fêter ça ensemble, en vrai ? On le fera après le confinement. Faut continuer après, faudra pas s'arrêter. Moi, je prends une pause. Par contre, je veux bien bosser sur la partie justice avec Rachel. Parce que l'étape d'après, c'est les procès. Maintenant, il faut qu'ils payent.
Faut que j'y aille les meufs. Ok. Salut Alma. Salut Alma. Et encore bien joué. On est des reines. Merde c'est Safari. Salut Gazelle, 23h au jardin japonais. T'y es pas, j'envoie tout. Ok, à tout à l'heure. Alex, Alex, Alex. T'es mort mec. T'es dead. Les frères, ce soir on affiche tout le monde ou je ne sais plus. 14 ans, vous appuyez les frères, il est où le respect ? 14 ou 32, on n'est pas là pour respecter. Allô Alma ? Ouais Alex ?
Affiche ton ex de Romain Weber, d'après une enquête de Constance Villanova, avec...
Frédéric Pierrot. Juliette.
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Prise de son, montage et mixage, Bastien Varigo et Kevin Delcourt. Assistante à la réalisation, Florine Perenès. Réalisation, Sophie Haute-Picot.