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cover of episode "La Princesse de Clèves" de Madame de La Fayette 5/5 : Dénouement

"La Princesse de Clèves" de Madame de La Fayette 5/5 : Dénouement

2025/2/24
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Le Feuilleton

AI Deep Dive AI Chapters Transcript
People
克莱夫先生
克莱夫夫人
内穆尔先生
旁白
知名游戏《文明VII》的开场动画预告片旁白。
玛蒂格夫人
Topics
旁白: 本集讲述了克莱夫夫人在得知丈夫克莱夫先生因嫉妒而重病后,以及与内穆尔先生的爱情纠葛中所面临的道德困境和最终的抉择。克莱夫先生的去世让她陷入深深的悲痛与自责,而与内穆尔先生的再次相遇,则点燃了她内心的爱火,但她最终选择了克制情感,过着虔诚而简朴的生活。 克莱夫先生: 我在临死前得知妻子与内穆尔先生的私情,这让我痛苦万分,但同时也让我解脱。我死后,她将获得自由,而我将带着对她的爱与恨离开人世。 克莱夫夫人: 我从未做过任何对不起丈夫的事,我的行为符合最严格的道德标准。虽然我爱着内穆尔先生,但我无法背叛我的婚姻和道德准则。丈夫的死让我痛苦万分,而与内穆尔先生的再次相遇,让我内心挣扎,最终我选择远离他,过着清心寡欲的生活,以赎罪并告慰亡夫。 玛蒂格夫人: 我观察到内穆尔先生似乎对爱情失去了兴趣,这或许与克莱夫夫人的事情有关。 内穆尔先生: 我深爱着克莱夫夫人,为了她,我愿意放弃一切。尽管我曾试图接近她,但她始终保持着距离,最终我尊重她的选择,并默默地守护着她。 supporting_evidences 克莱夫先生: 'Vous versez bien des pleurs, madame…' 克莱夫夫人: 'Moi, des crimes !…' 玛蒂格夫人: 'Pour M. de Nemours…' 内穆尔先生: 'Ne craignez rien, madame…'

Deep Dive

Chapters
Monsieur de Clèves's fatal illness is triggered by the revelation of Madame de Clèves's encounter with Monsieur de Nemours at Coulomiers. His dying words are filled with accusations and pain, while Madame de Clèves struggles to defend her innocence. His death leaves her heartbroken and deeply affected.
  • Monsieur de Clèves discovers Monsieur de Nemours' visit to Coulomiers.
  • Monsieur de Clèves falls gravely ill.
  • He confronts Madame de Clèves with his suspicions.
  • Madame de Clèves maintains her innocence.
  • Monsieur de Clèves dies, leaving Madame de Clèves devastated.

Shownotes Transcript

Translations:
中文

La princesse de Clèves de Madame de Lafayette. Épisode 5. Dénouement. Monsieur de Clèves est blessé au cœur lorsqu'il apprend par un de ses hommes, qui a suivi Monsieur de Nemours sous ses ordres, que celui-ci s'est rendu à Coulomiers et a passé la nuit dans le parc où se trouvait Madame de Clèves. Monsieur de Clèves ne put résister à l'accablement où il se trouva. La fièvre lui prit dès la nuit même, et il se trouva dans le parc où se trouvait Madame de Clèves.

et avec de si grands accidents que dès ce moment sa maladie parut très dangereuse. On en donna avis à Madame de Clèves, elle vint en diligence. Quand elle arriva, il était encore plus mal. Elle lui trouva quelque chose de si froid et de si glacé pour elle qu'elle en fut extrêmement surprise et affligée. Mais enfin elle pensa que c'était peut-être un effet de sa maladie. Cependant Monsieur de Clèves était presque abandonné des médecins

Un des derniers jours de son mal, après avoir passé une nuit très fâcheuse, il dit sur le matin qu'il voulait reposer. Madame Leclef demeura seule dans sa chambre. Elle s'approcha et se vint mettre à genoux devant son lit, le visage tout couvert de larmes. « Vous versez bien des pleurs, madame, lui dit-il, pour une mort que vous causez et qui ne vous peut donner la douleur que vous faites paraître.

« Je ne suis plus en état de vous faire des reproches, » continua-t-il, « avec une voix affaiblie par la maladie et par la douleur. Mais je meurs du cruel déplaisir que vous m'avez donné. » « Quelle action aussi extraordinaire que celle que vous aviez faite de me parler à Coulomiers eut si peu de suite ? Pourquoi m'éclairer sur la passion que vous aviez pour M. de Nemours, si votre vertu n'avait pas plus d'étendue pour y résister ?

« Que ne me laissiez-vous dans cet aveuglement tranquille dont jouissent tant de maris ? » « Juste peut-être ignorer toute ma vie que vous aimiez M. de Nemours. » « Je mourrai, » ajouta-t-il, « mais sachez que vous me rendez la mort agréable, » « et qu'après m'avoir ôté l'estime et la tendresse que j'avais pour vous, » « la vie me ferait horreur. » « Même un mort vous laissera en liberté, » « et vous pourrez rendre M. de Nemours heureux, » « sans qu'il vous en coûte des crimes. » Mme de Clèves était si éloignée

de s'imaginer que son mari pût avoir des soupçons contre elle, qu'elle écoute à toutes ces paroles sans les comprendre et sans avoir d'autres idées, sinon qu'il lui reprochait son inclination pour M. de Nemours. Enfin, sortant tout d'un coup de son aveuglement, « Moi, des crimes ! » s'écria-t-elle, « la pensée même m'en est inconnue. La vertu la plus austère ne peut inspirer d'autres conduites que celles que j'ai eues, et je n'ai jamais fait d'action. »

« Dont je n'eusse souhaité que vous eussiez été témoin ? Eussiez-vous souhaité ? » répliqua M. de Clèves en la regardant avec dédain. « Que je l'eusse été des nuits que vous avez passées avec M. de Nemours ? Est-ce de vous que je parle, quand je parle d'une femme qui a passé des nuits avec un homme ? » « Non, M. » reprit-elle. « Non, ce n'est pas de moi dont vous parlez. Je n'ai jamais passé ni de nuit, ni de moment avec M. de Nemours. »

Il ne m'a jamais vu en particulier. Je ne l'ai jamais souffert ni écouté. Et j'en ferai tous les serments. N'en dites pas davantage, interrompit M. Declèves. De faux serments ou un aveu me feraient peut-être une égale peine. » Mme Declèves ne pouvait répondre. Ses larmes et sa douleur lui ôtaient la parole. Enfin, faisant un effort, « Regardez-moi du moins. Écoutez-moi, lui dit-elle. S'il n'y allait que de mon intérêt, je souffrirais ce reproche. »

« Mais il y va de votre vie, écoutez-moi, pour l'amour de vous-même. » « Il est impossible qu'avec tant de vérité, je ne vous persuade mon innocence. » « Plut à Dieu que vous me la puissiez persuader, s'écria-t-il. » « Mais que me pouvez-vous dire ? » « Monsieur de Nemours n'a-t-il pas été à Coulomiers avec sa sœur ? » « Et n'avait-il pas passé la nuit précédente avec vous dans le jardin de la forêt ? » « Si c'est là mon crime, répliqua-t-elle, il m'est aisé de me justifier. »

« Je ne vous demande pas de me croire, mais croyez tous vos domestiques, et sachez si j'allais dans le jardin de la forêt la veille que M. de Nemours vint à Coulomiers, et si je n'en sortis pas le soir d'auparavant deux heures plus tôt que je n'avais accoutumé. »

Et la vérité se perçoit si aisément, lors même qu'elle n'est pas vraisemblable, que M. de Clèves fut presque convaincu de son innocence. « Je ne sais, lui dit-il, si je me dois laisser aller à vous croire. Je me sens si proche de la mort que je ne veux rien voir de ce qui pourrait me faire regretter la vie. Vous m'avez éclairci trop tard, mais ce me sera toujours un soulagement d'emporter la pensée

« Que vous êtes digne de l'estime que j'ai eue pour vous. » Il voulut continuer, mais une faiblesse lui ôta la parole. Madame de Clèves fit venir les médecins. Ils le trouvèrent presque sans vie. Il languit néanmoins encore quelques jours et mourut enfin avec une constance admirable. Madame de Clèves demeura dans une affliction si violente qu'elle perdit quasi l'usage de la raison.

La reine la vint voir avec soin et la mena dans un couvent sans qu'elle sût où on la conduisait. Ses belles-sœurs la ramenaient à Paris, qu'elle n'était pas encore en état de sentir distinctement sa douleur. Quand elle commença d'avoir la force de l'envisager et qu'elle vit quel mari elle avait perdu, qu'elle considéra qu'elle était la cause de sa mort, que c'était par la passion qu'elle avait eue pour un autre qu'elle en était cause,

L'horreur qu'elle eut pour elle-même et pour M. de Nemours ne se peut représenter. Ce prince n'osa, dans ses commencements, lui rendre d'autres soins que ceux que lui ordonnait la bienséance. Il connaissait assez Mme de Clèves pour croire qu'un plus grand empressement lui serait désagréable. Mais ce qu'il apprit ensuite lui fit bien voir qu'il devait avoir longtemps la même conduite. Un écuyer qu'il avait,

Lui compta que le gentilhomme de M. de Clèves, qui était son ami intime, lui avait dit, dans sa douleur de la perte de son maître, que le voyage de M. de Nemours à Coulomiers était cause de sa mort. M. de Nemours fut extrêmement surpris de ce discours. Mais, après y avoir fait réflexion, il devina une partie de la vérité. Et il jugea bien quels seraient d'abord les sentiments de Mme de Clèves,

et quel éloignement elle aurait de lui si elle croyait que le mal de son mari eût été causé par la jalousie. Il ne put s'empêcher néanmoins d'aller à sa porte pour apprendre de ses nouvelles. On lui dit que personne ne la voyait et qu'elle avait même défendu qu'on lui rendit compte de ceux qui l'iraient chercher. La douleur de cette princesse passait les bornes de la raison. Ce mari mourant, et mourant à cause d'elle,

et avec tant de tendresse pour elle, ne lui sortait point de l'esprit. Elle repassait incessamment tout ce qu'elle lui devait, et elle se faisait un crime de n'avoir pas eu de la passion pour lui, comme si c'eût été une chose qui eût été en son pouvoir. Après que plusieurs mois furent passés, elle sortit de cette violente affliction où elle était, et passa dans un état de tristesse et de langueur. Madame de Martigues fit un voyage à Paris,

et la vit avec soin pendant le séjour qu'elle y fit. Elle l'entretint de la cour et de tout ce qui s'y passait, et quoique Mme de Clèves ne parut pas y prendre intérêt, Mme de Martigues ne laissait pas de lui en parler pour la divertir. « Pour M. de Nemours, dit-elle, je ne sais si les affaires ont pris dans son cœur la place de la galanterie, mais il a bien moins de joie qu'il n'avait accoutumé d'en avoir. Il paraît fort retiré du commerce des femmes. »

Il fait souvent des voyages à Paris et je crois même qu'il y est présentement. Le nom de M. de Nemours surprit Mme de Clèves et la fit rougir. Elle changea le discours et Mme de Martigues ne s'aperçut point de son trouble. Le lendemain, cette princesse, qui cherchait des occupations conformes à l'état où elle était, alla, proche de chez elle, voir un homme qui faisait des ouvrages en soi d'une façon particulière.

Après qu'on l'ait lui montré, elle vit la porte d'une chambre où elle crut qu'il y en avait encore. Elle dit qu'on l'a lui ouvrie. Le maître répondit qu'elle était occupée par un homme qui y venait quelquefois pendant le jour pour dessiner de belles maisons et des jardins que l'on voyait de ses fenêtres. Elle alla vers les fenêtres pour voir où elle donnait. Elle trouva qu'elle voyait tout son jardin et la face de son appartement.

Et lorsqu'elle fut dans sa chambre, elle remarqua aisément cette même fenêtre où on lui avait dit que venait cet homme. La pensée que c'était M. de Nemours changea entièrement la situation de son esprit. Elle se sentit inquiète et agitée. Enfin, ne pouvant demeurer avec elle-même, elle sortit et alla prendre l'air dans un jardin hors des faubourgs où elle pensait être seule. Après avoir traversé un petit bois,

Elle aperçut, au bout d'une allée, dans l'endroit le plus reculé du jardin, une manière de cabinet ouvert de tous côtés, où elle adressa ses pas. Comme elle en fut proche, elle vit un homme couché sur des bancs, qui paraissait enseveli dans une rêverie profonde, et elle reconnut que c'était M. de Nemours. Cette vue l'arrêta tout court, mais ses gens, qui la suivaient, firent quelques bruits, qui tiraient M. de Nemours de sa rêverie.

Sans regarder qui avait causé le bruit qu'il avait entendu, il se leva de sa place pour éviter la compagnie qui venait vers lui et tourna dans une autre allée en faisant une révérence fort basse qui l'empêcha même de voir ceux qu'il saluait. Quel effet produisit cette vue d'un moment dans le cœur de Madame de Clèves ? Quelle passion endormie se ralluma dans son cœur et avec quelle violence ! Elle alla s'asseoir dans le même endroit d'où venait de sortir M. de Nemours

Et elle y demeura comme accablée. Ce prince se présenta à son esprit, aimable au-dessus de tout ce qui était au monde, l'aimant depuis longtemps, avec une passion pleine de respect et de fidélité, méprisant tout pour elle, respectant jusqu'à sa douleur, songeant à la voir sans en être vue, citant la cour dont il faisait les délices pour aller regarder les murailles qui la renfermaient, pour venir rêver dans les lieux où il ne pouvait prétendre de la rencontrer.

Enfin, un homme digne d'être aimé par son seul attachement et pour qui elle avait une inclination si violente qu'elle l'aurait aimé quand il ne l'aurait pas aimé. Mais de plus, un homme d'une qualité élevée et convenable à la sienne. Plus de devoirs, plus de vertus qui s'opposassent à ses sentiments. Tous les obstacles s'étaient levés et il ne restait de leur état passé que la passion de M. de Nemours pour elle et que celle qu'elle avait pour lui.

Toutes ces idées furent nouvelles à cette princesse. La présence de M. de Nemours les amena en foule dans son esprit. Mais quand elle se souvint que ce même homme qu'elle regardait comme pouvant l'épouser était celui qu'elle avait aimé du vivant de son mari et qui était la cause de sa mort, que même en mourant, il lui avait témoigné de la crainte qu'elle ne l'épousa, son austère vertu était si blessée de cette imagination

qu'elle ne trouvait guère moins de crimes à épouser M. de Nemours qu'elle en avait trouvé à l'aimer pendant la vie de son mari. Elle passa une des plus cruelles nuits qu'elle eût jamais passées. Le matin, son premier mouvement fut d'aller voir s'il n'y aurait personne à la fenêtre qui donnait chez elle. Elle y alla, elle y vit M. de Nemours. Cette vue la surprit et elle se retira avec une promptitude qui fit juger à ce prince qu'il avait été reconnu.

Il avait souvent désiré de l'être, depuis que sa passion lui avait fait trouver ses moyens de voir Madame de Clèves. Et, lorsqu'il n'espérait pas d'avoir ce plaisir, il allait rêver dans le même jardin où elle l'avait trouvé. Lassé enfin d'un état si malheureux et si incertain, il résolut de tenter quelques voies d'éclaircir sa destinée. Il songea aux moyens dont il devait se servir pour la voir. Il crut qu'il n'y avait plus rien qui l'obligea à cacher sa passion au vidame de Chartres.

Monsieur de Nemours alla donc chez le Vidam, fit un aveu sincère de tout ce qu'il lui avait caché jusqu'alors, à la réserve des sentiments de Madame de Clèves, dont il ne voulut pas paraître instruit. Le Vidam reçut tout ce qu'il lui dit avec beaucoup de joie, et il assura que sans savoir ses sentiments, il avait souvent pensé, depuis que Madame de Clèves était veuve, qu'elle était la seule personne digne de lui.

M. de Nemours le pria de lui donner les moyens de lui parler et de savoir quelles étaient ses dispositions. Ils trouvèrent qu'il fallait que M. Levidam l'appriât de venir chez lui sur quelques prétextes et que M. de Nemours y vint par un escalier dérobé afin de n'être vu de personne. Cela s'exécuta comme il l'avait résolu. Mme de Clèves vint, Levidam la la recevoir et la conduisit dans un grand cabinet au bout de son appartement. Quelques temps après,

M. de Nemours entra comme si le hasard lui conduit. Mme de Clèves fut extrêmement surprise de le voir. Elle rougit et essaya de cacher sa rougeur. Le vidame parla d'abord de choses indifférentes et sortit, supposant qu'il avait quelque ordre à donner. L'on ne peut expliquer ce que sentirent M. de Nemours et Mme de Clèves de se trouver seuls et en état de se parler pour la première fois. Ils demeurèrent quelque temps sans rien dire.

Enfin, M. de Nemours rompant le silence, « Ne craignez rien, madame. Personne ne sait que je suis ici et aucun hasard n'est à craindre. Écoutez-moi, madame, écoutez-moi. Si ce n'est par bonté, que ce soit du moins pour l'amour de vous-même et pour vous délivrer des extravagances où m'emporterait infailliblement une passion dont je ne suis plus le maître. »

et en le regardant avec des yeux pleins de douceur et de charme. « Mais qu'espérez-vous, lui dit-elle, de la complaisance que vous me demandez ? Vous vous repentirez peut-être de l'avoir obtenue, et je me repentirai infailliblement de vous l'avoir accordée. Moi, madame, lui dit-il, cherchez le bonheur ailleurs, et y en a-t-il d'autre que d'être aimé de vous ? Quoique je ne vous ai jamais parlé, je ne saurais croire, madame, que vous ignoriez ma passion,

« Et que vous ne la connaissiez pour la plus véritable et la plus violente qui sera jamais. » « Puisque vous voulez que je vous parle et que je m'y décide, » répondit Madame de Clèves en s'assaillant, « je le ferai avec une sincérité que vous trouverez malaisément dans les personnes de mon sexe. » « Je ne vous dirai point que je n'ai pas vu l'attachement que vous avez eu pour moi. » « Peut-être ne me croiriez-vous pas quand je vous le dirai. » « Je vous avoue donc non seulement que je l'ai vu, »

mais que je l'ai vu tel que vous pouviez souhaiter qu'il m'ait paru. — Et si vous l'avez vu, madame, interrompit-il, est-il possible que vous n'en ayez point été touché ? — Vous en avez dû juger par ma conduite, lui répliqua-t-elle, mais je voudrais bien savoir ce que vous en avez pensé. — Il faudrait que je fusse dans un état plus heureux pour vous l'oser dire, répondit-il. — Tout ce que je puis vous apprendre, madame, c'est que j'ai souhaité ardemment

« Que vous n'eussiez pas avoué à M. de Clèves ce que vous me cachiez, et que vous lui eussiez caché ce que vous m'eussiez laissé voir. » « Comment avez-vous pu découvrir, reprit-elle en rougissant, que j'ai avoué quelque chose à M. de Clèves ? » « Je l'ai su par vous-même, madame, répondit-il. » Il commença à lui conter comment il avait entendu sa conversation avec M. de Clèves, mais elle l'interrompit avant qu'il eût achevé.

« Ne m'en dites pas davantage, lui dit-elle. Je vois présentement par où vous avez été si bien instruit. Vous ne me le parut déjà que trop chez Madame la Dauphine, qui avait su cette aventure par ceux à qui vous l'aviez confiée. » « Monsieur de Nemours lui apprit alors de quelle sorte la chose était arrivée. » « Ne vous excusez point, reprit-elle. Il y a longtemps que je vous ai pardonné sans que vous m'ayez dit la raison. »

« Mais puisque vous avez appris par moi-même ce que j'avais eu dessein de vous cacher toute ma vie, je vous avoue que vous m'avez inspiré des sentiments qui m'étaient inconnus devant que de vous avoir vu, et dont j'avais même si peu d'idées qu'ils me donnèrent d'abord une surprise qui augmentait encore le trouble qui les suit toujours. « Croyez-vous, madame, lui dit M. de Nemours en se jetant à ses genoux, que je n'expire pas à vos pieds de joie et de transport ?

« Je ne vous apprends, lui répondit-elle en souriant, que ce que vous ne saviez déjà que trop. » « Ah ! madame, répliqua-t-il, quelle différence de le savoir par un effet du hasard ou de l'apprendre par vous-même, et de voir que vous voulez bien que je le sache. » « Il est vrai, lui dit-elle, que je veux bien que vous le sachiez et que je trouve de la douceur à vous le dire.

Je ne sais même si je ne vous le dis point plus pour l'amour de moi que pour l'amour de vous. Car enfin cet aveu n'aura point de suite, et je suivrai les règles austères que mon devoir m'impose. Ah, madame, dit M. de Nemours, quel fantôme de devoir ! Opposez-vous à mon bonheur ? Quoi ? J'aurais pu concevoir l'espérance de passer ma vie avec vous ?

Ma destinée m'aurait conduit à aimer la plus estimable personne du monde, et je n'aurais trouvé dans sa conduite que tout ce qui peut être à désirer dans une femme. Car enfin, Madame, vous êtes peut-être la seule personne en qui ces deux choses se soient jamais trouvées au degré qu'elles sont en vous. Tous ceux qui épousent des maîtresses dont ils sont aimés tremblent en les épousant,

et regardent avec crainte, par rapport aux autres, la conduite qu'elles ont eue avec eux. « Je veux vous parler encore avec la même sincérité que j'ai déjà commencé », reprit-elle. « Mais je vous conjure de m'écouter sans m'interrompre. Je crois devoir à votre attachement la faible récompense de ne vous cacher aucun de mes sentiments et de vous les laisser voir tels qu'ils sont. Ce sera apparemment la seule fois de ma vie que je me donnerai la liberté de vous les faire paraître. »

Je sais que vous êtes libre, que je le suis, et que les choses sont d'une sorte que le public n'aurait peut-être pas sujet de vous blâmer, ni moi non plus, quand nous nous engagerions ensemble pour jamais. Mais les hommes conservent-ils de la passion dans ces engagements éternels ? Monsieur de Clave était peut-être l'unique homme au monde capable de conserver de l'amour dans le mariage. Ma destinée n'a pas voulu que j'aie pu profiter de ce bonheur.

Peut-être aussi que sa passion n'aurait subsisté que parce qu'il n'en aurait pas trouvé en moi. Mais je n'aurais pas le même moyen de conserver la vôtre. Je crois même que les obstacles ont fait votre constance, et mes actions involontaires ou les choses que le hasard vous a apprises vous ont donné assez d'espérance pour ne vous pas rebuter. Ah, madame, reprit M. de Nemours, je ne saurais garder le silence que vous m'imposez. Vous me faites trop d'injustice !

et vous me faites trop voir combien vous êtes éloigné d'être prévenu en ma faveur. J'avoue, répondit-elle, que les passions peuvent me conduire, mais elles ne sauraient m'aveugler. Rien ne me peut empêcher de connaître que vous êtes né avec toutes les dispositions pour la galanterie et toutes les qualités qui sont propres à y donner des succès heureux. Vous avez déjà eu plusieurs passions, vous en auriez encore, je ne ferai plus votre bonheur,

Je vous verrai pour une autre comme vous auriez été pour moi. J'en aurai une douleur mortelle et je ne serai pas même assuré de n'avoir point le malheur de la jalousie. Je vous croirai toujours amoureux et aimé et je ne me tromperai pas souvent. Dans cet état néanmoins, je n'aurai d'autre partie à prendre que celui de la souffrance. Je ne sais même si j'oserai me plaindre. On fait des reproches à un amant.

« Mais en fait-on à un mari quand on n'a qu'à lui reprocher de n'avoir plus d'amour ? » « Il n'y a point d'obstacle, madame, reprit M. de Nemours. » « Vous seuls vous opposez à mon bonheur. » « Vous seuls vous imposez une loi que la vertu et la raison ne vous sauraient imposer. » « Il est vrai, répliqua-t-elle, que je sacrifie beaucoup à un devoir qui ne subsiste que dans mon imagination. » « Attendez ce que le temps pourra faire. »

et cet objet funeste est trop proche pour me laisser des vues claires et distinctes. Adieu, voici une conversation qui me fait honte. » Elle sortit en disant ces paroles sans que M. de Nemours pût la retenir. Les raisons qu'elle avait de ne point épouser M. de Nemours lui paraissaient fortes du côté de son devoir et insurmontables du côté de son repos. La fin de l'amour de ce prince et les mots de la jalousie

Elle lui montrait un malheur certain où elle s'allait jeter. Mais elle voyait aussi qu'elle entreprenait une chose impossible que de résister en présence du plus aimable homme du monde qu'elle aimait et dont elle était aimée, et de lui résister sur une chose qui ne choquait ni la vertu ni la bienséance. Elle jugea que l'absence seule et l'éloignement pouvaient lui donner quelques forces

et résolut de faire un assez long voyage. Elle se retira, sur le prétexte de changer d'air dans une maison religieuse, sans faire paraître un dessein arrêté de renoncer à la cour. À la première nouvelle qu'en eut M. de Nemours, il sentit le poids de cette retraite et en vit l'importance. La perte de ses espérances ne l'empêcha pas de mettre tout en usage pour faire revenir Mme de Clèves.

Mais tout fut inutile. Enfin, des années entières s'étant passées, le temps et l'absence ralentirent sa douleur et éteignirent sa passion. La dame de Clèves vécut d'une sorte qui ne laissa pas d'apparence qu'elle pût jamais revenir. Elle passait une partie de l'année dans cette maison religieuse et l'autre chez elle. Mais dans une retraite,

et dans des occupations plus saintes que celles des couvents les plus austères. Et sa vie, qui fut assez courte, laissa des exemples de vertus inimitables. La princesse de Clèves, de Madame de Lafayette, épisode 5, Dénouement. Lus par Marcel Bozonnet, prise de son, montage et mixage, Antoine Vieuxat et Étienne Collin. Assistant à la réalisation, Pablo Valero.

Sélection des extraits et réalisation : Sophie-Aude Picon