France Culture. L'affaire Beaumane. De Nicolas Henry et Zéphiriel Casini. Un podcast original en 10 épisodes. Réalisation. Laurence Courtois. Épisode 1. L'appel du passé. Allemagne 1944. Intérieure nuit. Avion de l'armée US. Au-dessus d'une forêt en hiver. Zone de largage dans 2 minutes !
Bon les gars, je le répète une dernière fois, il s'agit d'une exfiltration, pas d'un sabotage. Alors on infiltre, on sécurise la cible et on se tire. Pas de zèle. Plus on sera discret, plus on aura de chances de rentrer en un seul morceau. Et on reste groupé, c'est clair ? Oui, lieutenant Baker. Pas de questions ? Pas mal. Vous ouvrez le bal. Allez, allez, on se pose le cul !
Putain de merde
Quand une radio militaire muette depuis la fin de la guerre se met à émettre juste après votre dernière cuite, soit vous accusez le bourbon de la veille, soit vous êtes barge, et vous répondez à l'appel. Ici Beaumane. Je répète, Alpha, ici Beaumane. Vous recevez ? Décart, c'est toi ? Ici Beaumane. Décart !
Tu peux répéter lentement ? Oh, arrête tes conneries. C'est quoi ces histoires d'oiseaux ? Qu'est-ce qui se passe ? Décaire ! Décaire ! Décaire ! Cinq ans. Ça fait cinq ans que je laisse cette foutue radio allumée sur la même fréquence. Dans l'attente d'un miracle qui me permettrait de passer une vraie nuit de sommeil sans avaler ces putains de pilules. Névrose post-traumatique, cœur du soldat. On peut coller tous les mots qu'on veut dessus. C'est comme des pansements sur une plaie ouverte. Ça n'empêche pas de saigner.
Emili est une pure fille de l'Illinois, le pragmatisme d'un méthodiste, la générosité d'une madone et la détermination d'un berger allemand.
Elle n'a pas besoin d'élever la voix pour obtenir ce qu'elle veut, il lui suffit de le répéter en boucle, jusqu'à ce que l'un de nous deux finisse par craquer. « Lili, bonsoir, oh, baisse les stores, ça va me filer encore plus mal au crâne. Tu peux me dire ce que tu viens faire ici ? » « Ça fait deux semaines que j'essaye de te joindre, ta boîte aux lettres déborde en bas. Ton assistante est en vacances. » « J'ai été un peu dépassé ces derniers temps. »
Mademoiselle Martinez a démissionné. C'est déjà un miracle qu'elle ait tenu si longtemps. Elle au moins, elle pensait au chèque de la pension alimentaire. T'as deux semaines de retard. Et le docteur Meierman a téléphoné parce qu'il te voit plus au groupe de parole. Je peux savoir pourquoi c'est moi qui l'appelle ? Il aurait dû garder ton numéro après notre divorce. Je me fous de Meierman et de ses théories à la croute. Et moi, je me fous que tu y ailles ou pas. Mais il a réveillé Elisabeth pendant sa sieste. Tu sais, ta fille... Tu te souviens que t'as une fille ? Oh, arrête-moi...
Bien sûr que je sais. Écoute, je fais tout ce que je peux. J'ai du mal à remplir le frigo en ce moment. Donne-moi une semaine et je t'envoie tout ça, promis. Le frigo ou le bar ? Encore cette radio ? Tu peux pas continuer comme ça, t'avais promis ! Il faut que t'arrêtes de ressasser ces vieilles histoires. Je sais que tu vas pas me croire, mais j'ai reçu un appel de Decker. Decker ? Si Decker voulait reprendre contact avec toi, pourquoi il passerait par cette radio ? Ça n'a aucun sens. Oui, je t'assure. Qu'est-ce que tu fais encore ? Mais oui, c'est ça.
Des coordonnées, Descartes m'a transmis des coordonnées. 41 nord, 87 ouest. Et y'en est, Carl. C'est à Dearborn Street, dans le Loupe. Un quartier de mafieux, dans quelle merde il allait se fourrer ? Hein, Millie, attends ! La prochaine fois, c'est les huissiers qui te réveilleront. J'ai plus la force. Hé, je t'envoie le chèque dans la semaine, promis ! Les coordonnées de Descartes me conduisent au Singing Echoes, une boîte de jazz pour Starlet en devenir.
La première marche vers Broadway. Mais il y a quelque chose qui cloche. Descartes n'a jamais été trop musique. Il n'a jamais vraiment été bouteille non plus d'ailleurs. Excusez-moi monsieur, mais c'est sur invitation. Non, on m'attend à l'intérieur. Désolé, ça ne va pas être possible. Je connais Golfi. Dites-lui que Bowman est là. Il connaît mon nom, il sait qui je suis. On va voir le patron. Dépêche-toi.
Carl Beaumont ! B*tch, c'est pas vrai ! Le Carl Beaumont ! Bon, comment va le meilleur flic de Chicago ? Toujours occupé à boire ta puce dans le caniveau ? Ah non Vinny, tu vois, je me suis trouvé un nouveau job et je fais le gigolo pour ta maman. Espèce d'ouf !
Hé, retire tes mains dégueulasses tout de suite ! Je vais t'affoncer la gueule moi ! Hé, arrête ! Toi et moi on a mieux à faire, allez dégage ! Vinny, Vinny, tu fais pas le con ! Tu fais peur au client ! Qu'est-ce que c'est que ce bordel ? Patron, c'est lui ! Vinny, il serait mieux de t'occuper de tes filles. On a une qui est complètement fuite au bar. C'est un mauvais effet. Oui patron, j'y vais tout de suite. Toi tu paies rien pour attendre. Ah ouais, moi aussi Vinny, je t'embrasse. Et surtout, prends bien soin de ta petite gueule. Hum hum !
Ce petit con n'a jamais su faire la différence entre une mine d'or et son trou de cul. Alors, reconnaître un héros de guerre... Un héros de guerre ? C'est seulement... Qu'est-ce que vous racontez ? Allez, suivez-moi. Ce soir, vous êtes mon invité. Artie, resserre-nous un whisky, tu veux ? Tout de suite, monsieur Golfi.
Vous avez de la chance, Bowman. Vous arrivez pour la meilleure partie du spectacle. Bordel. Je ne pensais pas que les anges existaient pour de vrai. Je vois que la môme vous a tapé dans l'œil. Comment elle s'appelle ? Birdie Rivers. Gros potentiel pour Broadway. Birdie ? Oui. Vous l'entendez, son chant est incroyable.
Presque hypnotique. On est sur terre, bon man ! Je ne joue pas dans votre ligue. Merci ! Merci à tous ! Golfi, vous n'auriez pas croisé un gars du nom de Decker ? Steve Decker ? Ça ne me dit rien. Tenez, ce gars-là !
Grand, mince, le menton qui ressort un peu, le blond. Non, non, j'ai jamais vu. Artie, jette un oeil sur la photo, là, ça te dit quelque chose ? Prêt de voir ? C'est vous, là ? La vache, vous aviez la classe, les Marines ? Les paras, avant de partir en Allemagne, l'officier, là. Il vous dit rien ?
Ah si, je m'en rappelle ! Un gars du genre discret, un peu bizarre aussi. Toujours à commander un club soda. C'est pour ça que je m'en souviens. Un mec qui boit pas d'alcool, ça se remarque. Il vous a pas laissé un message pour moi ? Karl Bauman ? Non, ça fait plusieurs semaines que je l'ai pas lu. Il venait seul ici ? Seul, oui. Surtout, je me rappelle, il cherchait à aborder les chanteuses. Sans doute qu'il aurait bien aimé rentrer avec l'une d'entre elles. Un peu comme vous ce soir, Bauman, hein, si je peux me permettre. Un mec rédélien, hein ?
Vous êtes aussi quelques obsessions communes. Peut-être, oui. Pardon, vous auriez du feu ? J'ai l'air d'en avoir. Pardon, excusez-moi, c'est dur. Il n'y a pas de mal. Qui vous a permis de passer par les loges pour arriver jusqu'ici ? C'est réservé aux artistes ? Disons que je suis un artiste, à ma manière. Flic ? Ex-flic, détective privé. Dites-nous, vous avez du flair. Et sur quoi enquêtez-vous, détective ? Cet homme-là, ça vous dit quelque chose ?
Non. Mais moi je suis arrivée ici il y a deux semaines seulement. Demandez aux autres filles, peut-être qu'elles sauront vous dire. Ah oui, c'est déjà fait. Et alors ? Rien. J'avais un briquet en fait. Vous m'avez fait perdre mes moyens. Ça vous rend d'autant plus adorable. Avec un faux air d'un frais Bogart en prime. Tant mieux si mon physique peut vous faire oublier que ma vie de détective tient plus de léboueur que du cow-boy. Vous êtes marrant vous. Et en plus vous avez un briquet qui marche. Ça vous fait deux bons points. Si vous aviez une voiture, ça ferait trois.
Comment ça ? Une voiture, un moteur, quatre roues. Oui, j'ai une voiture. Alors trois bons points. Et ça vous embêterait de me déposer ? Un très beau garde. À moins que vous n'ayez une autre poubelle à fouiller. Non, je n'ai pas d'autre. Enfin, je veux dire, oui, si vous voulez. Je suis garé de l'autre côté, devant le club. N'allez pas croire que je cède à votre charme, détective. J'aimerais seulement éviter de croiser un pauvre type qui me colle au basque. Depuis que je suis arrivée ici, il veut me ramener...
Vinnie, ça vous dit quelque chose ? Vaguement. Je préfère encore rentrer avec un parfait inconnu. Je comprends. Dans ce cas, je n'ai pas d'autre choix que d'accepter d'être votre chauffeur ce soir. Merci, on veut être chaud. Je repasse par les loges et je vous retrouve devant l'entrée du club dans cinq minutes. Au fait, comment vous vous appelez ? Bowman. Karl Bowman. Et vous êtes Birdie Rivers. Je vous ai entendu sur scène. Incroyable. Merci. Mais Birdie, c'est mon nom de scène. Lizzie sera parfaite.
Enchanté, Lydie. Enchantée aussi. A tout de suite, Carl. A tout de suite, Lydie. Saleté de pluie. L'amour me prend son temps. Tout va bien, M. Bowman ? Ça fait bien dix minutes que vous attendez sous la pluie et les clients commencent à vous regarder bizarrement.
J'ai oublié un truc au bar, ça vous dérange si... Allez-y, monsieur le maire. Merci. Pardon. Laissez-moi passer. Pardon, s'il vous plaît. Pardon, pardon, pardon. La porte de sa loge, avec un oiseau dessus. Elle est entreouverte. Pas de lumière à l'intérieur. Lizzie ?
Dans l'air, le parfum de Lizzie se mélange avec autre chose de plus lourd. Du chloroforme. Elle a dû prendre un vase pour se défendre, mais elle l'a lâché sous l'effet du produit. Lizzie a perdu un petit pendentif argenté. Un oiseau en cage.
L'oiseau mentionné par Decker dans son appel radio. A suivre, retrouvez le générique complet sur le site de France Culture.