18h30, ici à Paris sur RFI, nous parlons des réseaux sociaux et des jeunes ce soir dans le débat du jour. Le débat du jour, Romain Ozoui.
Oui, car le récent revirement de Meta n'en finit pas de faire des vagues. Le groupe qui notamment possède Facebook et Instagram jusque-là se démarquait de X en imposant des règles de modération en ligne. Mais Meta fait marche arrière, son patron Mark Zuckerberg se rangeant en effet derrière les autres géants et reculant sur la question de la régulation des contenus. Et les problématiques que cela soulève sont nombreuses. Dans ce cadre-là, notre débat ce soir, faut-il interdire les réseaux sociaux aux plus jeunes ?
C'est ce que vient de décider l'Australie. Mais dès lors, comment faire respecter cette interdiction ? Est-ce qu'il y a d'autres alternatives pour protéger la jeunesse face à des réseaux sociaux qui s'annoncent donc de plus en plus décomplexés à l'avenir ? Soyez les bienvenus dans le débat du jour. Et pour répondre à ces questions, nos deux invités à mes côtés en studio, Sophie Géel, bonsoir. Bonsoir. Vous êtes professeure en sciences de l'information et de la communication à l'université Paris 8.
chercheuse au Centre d'études sur les médias, les technologies et l'internationalisation, autrice du livre « L'adolescence au cœur de l'économie numérique ». On est en plein dedans. Face à vous, Michael Stora, bonsoir. Bonsoir. Psychanalyste, expert des mondes numériques, fondateur de l'Observatoire des mondes numériques en sciences humaines. Votre ouvrage, « Les réseaux asociaux » aux éditions Larousse. Merci beaucoup à vous deux d'avoir accepté l'invitation du débat du jour sur RFI. Pour commencer, je voudrais recueillir votre réaction à cette annonce de Mark Zuckerberg.
Donc il veut que les règles de modération en ligne sur Facebook et Instagram aux Etats-Unis soient simplifiées. Ça vous inspire quoi, Sophie Géel ? Disons que ça m'inspire le fait qu'il s'est plutôt engagé devant l'Union européenne à simplifier les modalités par lesquelles les usagers peuvent
peuvent recourir à des fonctionnalités, demander notamment que certains contenus soient supprimés, signalés de façon plus simple. La simplification de ce côté-là de l'Atlantique, c'est ça l'attente. Ce n'est pas la simplification en suite que...
Il veut solliciter davantage les utilisateurs, que les utilisateurs régulent. Il y a la fameuse communauté des utilisateurs pour remplacer aussi ce qu'on appelle les fact-checkers, les vérificateurs de fausses informations ?
Non, il ne s'agit pas de remplacer, en tout cas en Union européenne, l'idée ce n'est pas de remplacer... On précise bien que Mark Zuckerberg parle des Etats-Unis. Voilà, et je pense que peut-être qu'il faut attendre. Je veux dire, Mark Zuckerberg c'est quelqu'un qui sait aussi s'adapter, qui a su aussi s'adapter dans différentes régions du monde et faire appliquer ses règles de modération de façon très très différente quand il s'agissait de l'Inde, quand il s'agissait des Philippines, quand il s'agissait de l'Europe. Donc...
Admettons plutôt que les règles qu'il annonce, enfin, ou ce désir de se plier à une vision plus libertaire et plus favorable à l'extrême droite aux États-Unis, eh bien, gageons que ce n'est pas cela qu'il fera en Union européenne. En tout cas, pour vous, ce recul sur la régulation, c'est clairement un pas en arrière ?
Comment vous observez ça, justement, de l'Europe, où il y a une régulation qui est beaucoup plus importante, une réglementation, on en parlera. Il y a le fameux DSA, Digital Services Act, qui est une réglementation importante concernant les réseaux aux Etats-Unis. On n'y est pas et on va y être encore moins avec cette annonce-là.
Oui, ce qu'on entend, c'est cette annonce dont on comprend qu'elle est très politique aussi, puisqu'il s'agit pour lui de rentrer dans la stratégie de Trump, de sortir en tout cas de son collimateur et de soutenir...
les propositions de Trump qui ont changé, elles aussi, d'ailleurs, parce qu'à certains moments, il était pour un contrôle de la modération. Là, on ne sait pas trop. Donc, j'analyse plutôt ces propos de Mark Zuckerberg qui sont effectivement très inquiétants s'il s'agit de les appliquer
dans l'Union européenne dans lequel, au contraire, nous souhaitons collectivement organiser un contrôle plus étroit des réseaux sociaux numériques ?
Voilà, donc on va observer ça de près. Mais est-ce qu'on peut imaginer un deux poids deux mesures aussi opposé entre Europe et Etats-Unis ? Oui, je crois. Je crois que c'est la seule solution en réalité. Et en tout cas pour les Américains, après j'ai donné la parole à Michael Estora, quelles conséquences pour les jeunes ? Parce qu'on parle des jeunes ce soir. Notre question c'est est-ce qu'il faut interdire les réseaux sociaux aux plus jeunes ? Mais en tout cas, on va évoquer l'interdiction, mais face à des réseaux sociaux complètement qui ne sont pas régulés,
C'est très inquiétant. Quelle exposition ? Ça se traduirait comment pour la jeunesse de demain ? Il faut dire que ça se traduit déjà. Enfin, je veux dire déjà sur les réseaux sociaux aujourd'hui. Moi, je conduis de nombreuses études qui passent par des entretiens avec des adolescents.
Grâce à un partenariat aussi avec les CMA en Normandie, nous recueillons chaque année des milliers de réponses à un questionnaire. Et donc, je sais que déjà, aujourd'hui, ce n'est pas forcément le cas des adultes, mais le cas des adolescents, c'est qu'ils voient énormément de contenus hyper violents,
voire complotistes. Mais ce qui les choque le plus, c'est des contenus hyper violents sur tous les réseaux sociaux numériques et d'abord ceux sur lesquels ils sont le plus, c'est-à-dire Instagram, TikTok, y compris Snapchat, bien sûr. C'est vrai qu'on peut évoquer ça, Michael Stora. Quelles sont les menaces pour les jeunes aujourd'hui, déjà, avant d'évoquer les perspectives ?
sur les réseaux sociaux. Les contenus violents, nous dit Sophie Géel. C'est le principal danger pour les plus jeunes ? Je dirais que ça fait partie des dangers apparents. C'est-à-dire des vidéos qui, ouvertement, seraient violentes. Tout en sachant que moi, de mon côté, j'avais fait à l'époque une étude sur le désir de certains adolescents de voir des vidéos violentes
de manière presque cathartique, sans rentrer dans le détail, c'est-à-dire comme un moyen peut-être de voir ce que je peux vivre à l'intérieur de moi, c'est-à-dire l'adolescence comme processus un peu mortifère, pas toujours évident. Mais en tout cas, mes réflexions m'ont montré que souvent, les dangers sur certains réseaux sociaux destinés aux adolescents sont plutôt dangereux et inquiétants là où on ne les attend pas.
Premièrement, la puissance addictive des réseaux sociaux. Le fait est qu'on le sait.
Le but à travers leur modèle économique, c'est-à-dire l'économie de l'attention, étant qu'on y reste le plus longtemps possible. D'ailleurs, pas que pour les ados, les adultes aussi. Mais les ados, évidemment, sont aussi privilégiés. Oui, parce que d'un point de vue de la maturité, la capacité à s'autoréguler est beaucoup plus complexe chez un adolescent. Et les dommages plus importants. Et les dommages peuvent être plus importants parce que c'est cette période de fragilité, c'est là où je veux en venir,
C'est que l'autre chose que moi j'ai perçue, c'est que c'est un âge où la construction de l'image de soi fait partie du processus normal et que les repères qu'on leur donne à voir, c'est-à-dire souvent les influenceurs, ne les renvoient qu'au fait qu'ils ne seront jamais à la hauteur. Aussi bien pour les filles, on le sait, les effets toxiques des réseaux sociaux sur la construction adolescente, sur la santé mentale des jeunes est terrible. Frances Haugen, grande lanceuse d'alerte qui avait travaillé
chez Meta, qui est passé d'ailleurs devant le Sénat américain et aussi l'Assemblée nationale en France, a montré que Meta est totalement au courant des effets délétères qu'ils ont sur la santé mentale des adolescents. Donc souvent, ce sont des choses, et lorsqu'on en parle aux adolescents...
Ils ne le voient pas, ils ne veulent pas le voir. Très rares sont ceux qui vont dire « Oui, c'est vrai que ça me déprime de voir ces filles aussi belles qui me renvoient. » Mais ce n'est pas que la beauté, c'est la réussite, c'est la consommation à tout prix qui fait que finalement cette forme d'idéalisation ne fait que renforcer le fait qu'on n'est pas à la hauteur. Ça crée ce qu'on appelle un sentiment de pression terrible aussi que l'on perçoit chez de plus en plus de jeunes adultes.
Et c'est vrai que les réseaux sociaux, malheureusement, sont des caisses de résonance de cette pression psychologique qu'ils exercent. Ça crée des complexes, évidemment, qui peuvent aller bien loin. Mais là, on parle de choses, finalement, entre guillemets, légales ou les... Enfin...
Vous parlez de ce qui se passe en Europe, où il y a une vraie régulation. Ça veut dire que finalement, des réseaux dérégulés comme le projettent les géants de la tech aux Etats-Unis, il n'y aurait pas de grande différence sur la jeunesse ? Sophie Gell l'a dit, c'est-à-dire que ce problème de modération existait déjà avant.
Ça va l'aggraver. On a déjà une enquête aussi, dont Le Monde s'est fait l'écho, qui montre que des publicités pornographiques, avec des contenus pornographiques, ont été diffusées sur le site de Meta. Alors que si vous regardez, c'est tout le problème de...
Et tout l'enjeu de la réglementation européenne, qui s'appelle DSA, c'est d'arriver à mieux comprendre ce qui se passe vraiment de l'autre côté de l'écran, si je puis dire. C'est-à-dire les choix qui sont réalisés par l'algorithme, par les algorithmes notamment de méta. Puisqu'on vient d'apprendre que ça remonte à quelques mois...
sur les serveurs de méta, un certain nombre de publicités à caractère pornographique ont pu être diffusées, alors même que dans les conditions générales d'utilisation de la plateforme, elle prétend interdire toute forme de nudité, etc.,
Ce que je veux dire par là, c'est que la plateforme, elle est en contradiction avec ses propres règles. Et que ceux qui apparaissent, et moi qui suis en contact permanent avec des étudiants, aussi parce que c'est très important d'être en contact avec des plus jeunes, parce qu'ils ne sont pas exposés au même contenu. Il y a une grande diversité de contenus qui peuvent être proposés.
Et ces plateformes sont très ambivalentes, pour ne pas dire autre chose, puisqu'à la fois, elles peuvent censurer des contenus qui sont publiés par des particuliers, et notamment, par exemple, des jeunes photographes qui ont envie de publier des photos avec de la nudité vont se voir censurés. Mais par contre, s'il s'agit d'une entreprise qui...
va proposer d'autres services, que ce soit des services commercialisation de produits ou bien commercialisation de contenus pornographiques. Là, ce sont des entreprises qui sont beaucoup plus tolérantes. Donc, on a beaucoup de mal à savoir comment fonctionne leur modération. Et c'est en ce sens que...
Si Mark Zuckerberg dit on va encore licencier des modérateurs, on va encore alléger le contrôle, c'est inquiétant. Mais est-ce que ce n'est pas tout le fonctionnement des réseaux à revoir ? Pour rebondir sur ce qu'évoquait Michael Estora, la réglementation européenne ne va pas changer. Le modèle de compétition que vous évoquiez, évidemment que les jeunes se confrontent aux réseaux sociaux et pour eux c'est une caisse de résonance qui peut être terrible ?
Oui, évidemment. Je voudrais faire réagir sur ce sujet parce que vous vous êtes exprimé, ça m'intéresse. Non, mais tout à fait. Sur la question de l'addiction, en tout cas, sur la question de la captation de l'attention, c'est évidemment un élément fondamental. Ce n'est pas nouveau non plus. C'est la question aussi des algorithmes qui, encore une fois... C'est la question des algorithmes qui choisissent, qui confrontent. Et donc, il n'y a pas que Meta. Je veux dire, il faut l'étendre à d'autres réseaux sociaux, notamment TikTok, qui est connu pour avoir un algorithme encore plus... Addictif.
oui, plus addictif au sens où il ressemble vraiment à un système de casino, c'est-à-dire qu'à la fois, il est possible très vite de monter en visibilité de façon extrêmement forte et donc ça, c'est un problème parce que ça attire aussi, ce qui attire aussi un certain nombre de jeunes, très jeunes, c'est l'idée qu'ils vont pouvoir être très célèbres avec une... Ça ne veut pas dire qu'ils publient beaucoup, mais ça veut dire que
ils peuvent publier une vidéo et s'ils mettent la bonne musique, elle peut devenir extrêmement populaire. Donc ça aussi, ça fait partie des risques parce que ça engendre une captation, ça engendre une fréquentation, une consultation extrêmement lourde, longue de ces réseaux.
Et à côté de ça, il y a ce dont parlait Michael Stora, c'est-à-dire le fait que ça vient renforcer des injonctions à la beauté, un certain nombre de normes qui peuvent être très pesantes. Et aussi, ça peut aussi enfermer l'autre problème de ces consultations, de cette consommation extrêmement longue de ces plateformes, c'est le fait que
enfermer des personnes, et surtout des très jeunes personnes, sur des contenus qui vont jouer sur leur fragilité. Donc les fragilités, c'est pas seulement la jonction à la beauté, ça peut être des problèmes d'anorexie, ça peut être des problèmes des penchants suicidaires, à la scarification, etc. Et ça, ça a été montré aussi sur TikTok, notamment par une grosse étude d'Amnesty International. Michael Stora, avant de passer à la seconde partie du débat, vous qui êtes psychanalyste, je vais poser la question frontale. Franchement,
Est-ce que selon vous, les réseaux sociaux font plus de bien ou plus de mal à la jeunesse aujourd'hui ? Malheureusement, mon constat est de penser qu'ils font plutôt du mal. Parce que c'est quand même censé être une évolution technologique, un progrès. Oui, mais c'est censé être un puissant distracteur. Mais on se rend compte que derrière cette distraction, il y a de l'influence. D'ailleurs, c'est le terme qui est employé pour parler des personnes qui influencent.
qui n'est pas toujours positive, pas forcément dans l'idée de faire rire ou d'amuser, parce qu'on a le droit, et je pense que ne soyons pas trop moralisateurs sur « c'est pas bien de passer trop de temps », parfois on a envie de passer trop de temps, mais c'est plutôt sur la question de se dire que
petit à petit, ce nivellement par de la dopamine à excès fait que le monde, lorsqu'on éteint son portable, est beaucoup moins goûtu. Il est plus dur.
et qu'on perçoit cette capacité à supporter la frustration à force d'y être, lorsque vous enlevez le portal, bah oui, évidemment. Et puis il y a les dérives qu'on perçoit, et j'aimerais peut-être moi aussi réagir sur cette décision de Mark Zuckerberg, qui est quand même une décision qui est avant tout politique, et surtout financière.
Parce qu'on sait très bien qu'Elon Musk est devant et que finalement, il a très peur avec X. Il a très, très peur. Et donc, c'est pour ça que même les fact-checkers, entre autres, son grand bureau va être déplacé au Texas, qui est quand même un des pays où concrètement, puisqu'il a maintenant ouvertement, il critique la culture woke. Et c'est là où, d'un point de vue culturel, ça va être intéressant parce que lorsqu'on, moi, ce qui est le cas, je reçois plutôt des ados.
les ados autour de nous, sauf évidemment exception, sont très woke dans leur culture. Et je pense que paradoxalement, il se peut que Instagram, si cette nouvelle modération est en cours, va devenir ringard. Instagram qui est utilisé aujourd'hui par 2 milliards d'utilisateurs, TikTok 1 milliard et Facebook 3 milliards.
Faut-il interdire les réseaux sociaux aux plus jeunes ? La question qu'on pose ce soir dans le débat du jour, évidemment quelques jours après l'annonce du patron de Meta, de reculer sur la question de la régulation des contenus. Mes deux invités, Michael Storac, on l'entendait, qui est psychanalyste, expert des mondes numériques.
fondateur de l'Observatoire des mondes numériques en sciences humaines, Sophie Géel, professeure en sciences de l'information et de la communication à l'Université Paris VIII, chercheuse au Centre d'études sur les médias, les technologies et l'internationalisation. Merci beaucoup à vous deux. Alors, on en vient à la question centrale du débat, puisqu'il
Le mois dernier, début décembre, l'Australie a donc, conformément à ce qu'elle avait annoncé, voté pour interdire les moins de 16 ans de comptes sur les réseaux sociaux. La mesure va entrer en vigueur dans 12 mois. Ça vous inspire quoi, Sophie Géel ? Est-ce que c'est une bonne idée ? Je trouve que c'est catastrophique parce que
On a pris du temps en Europe pour construire, élaborer un cadre législatif un peu serré, mais qui tienne compte des enjeux. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, les réseaux sociaux numériques, on peut dire qu'ils sont mauvais, on peut dire qu'ils ont des défauts, etc. Ils irriguent toute la vie sociale de la population européenne, c'est-à-dire à la fois les vies amicales,
les vies familiales, la vie professionnelle, les activités économiques, les achats, etc. Donc, je trouve que l'idée de les interdire, pour moi, c'est complètement hors sol. C'est prendre le problème par le mauvais biais ? Complètement le mauvais biais. C'est démissionner, en fait ? C'est tout à fait démissionner. Ce qu'il faut, c'est arriver, et c'est un enjeu politique qui va être le test, en fait, de l'Union européenne. Est-ce qu'elle a les moyens de ses intentions ?
Elle s'est rendue compte un peu tardivement que ce qui se passait avec la transition numérique, c'était une mise sous tutelle de l'Europe vis-à-vis des grandes firmes américaines. Et elle a décidé de leur imposer un certain nombre de règles. Donc, interdire aux mineurs, c'est privatiser complètement la question de la régulation en disant nous, les États, bon déjà, on n'est pas capables de protéger vos identités numériques, on n'est pas capables de protéger vos données personnelles, alors que
Ça fait partie notamment cela, ça fait partie des droits fondamentaux. Mais en plus, on ne va pas être capable d'imposer à ces grandes firmes un certain nombre de principes qui sont conformes à nos droits fondamentaux. Notamment le fait de protéger les mineurs. Et donc, on va renverser la responsabilité sur les parents. Mais c'est catastrophique.
Aujourd'hui, la règle, c'est qu'à partir de 15 ans, en France, on a décidé une forme de majorité numérique. Le terme est assez flou en réalité, mais qui signifie quand même qu'à partir de 15 ans, les adolescents ont le droit de s'inscrire tant que les parents n'y voient pas un inconvénient majeur. Ils s'inscrivent beaucoup plus tôt, généralement. Mais bien entendu. Mais ils s'inscrivent beaucoup plus tôt, mais avec, bien souvent, l'assentiment des parents.
On va évoquer la responsabilité évidemment de l'éducation. Je voudrais entendre Michael Estora aussi sur ce vote, cette proposition. C'est une réalité en Australie. Est-ce que pour vous aussi c'est une catastrophe, je reprends le mot de Sophie Géel, interdire les réseaux aux moins de 16 ans ?
Je ne sais pas si c'est une catastrophe, mais moi, déjà, la question, c'est pourquoi ? Alors, est-ce que vous savez pourquoi ? Est-ce que l'Australie veut interdire ? Alors, pourquoi interdire ? Je vais reprendre votre réponse. Parce que vous avez dit que ça fait plus de mal que de bien. Alors, oui, mais quel type de mal ? Parce que finalement, lorsqu'on entend ce qu'ils disent précisément, souvent, disons les choses, le temps d'écran. Bon, le temps d'écran, donc là, à nouveau, les parents sont convoqués dans leur capacité à réguler.
Mais après, les autres choses, c'est aussi en lien avec ce que je vous ai dit tout à l'heure sur les effets néfastes, toxiques sur la construction adolescente. Là, ce qu'on évoque, c'est les messageries. Bon, Snapchat, les ados utilisent Snapchat. Ils utilisent parfois les messageries. Mais finalement, les contenus en eux-mêmes,
Je pense que c'est pour ça, moi, la question du pourquoi m'intéresse. Pourquoi est-ce qu'on interdit ? En soi, interdire n'est jamais une excellente idée. Ça dépend. Non, non, ça dépend. Moi, je ne suis pas sur cette ligne-là. Ça dépend de ce qu'on interdit, ça dépend à quel âge, ça dépend... Mais quand on prend...
Parler à l'adolescence, parce que souvent, ça attise la transgression. C'est ça que je voulais dire. C'est que dès qu'on interdit... En soi, cette diabolisation autour des écrans, même avec la commission écran qu'il y a eu, etc., avait un effet totalement contre-productif, puisque ça en faisait un objet de convoitise et de valeur incroyable. C'est surtout complètement hors-sol. On vous a entendu sur ce point, Sophie Gell. Mais Michael Stora... Est-ce que c'est catastrophique ?
Est-ce que c'est catastrophique ? Non, je ne dirais pas que c'est catastrophique parce que finalement... Est-ce que ça déresponsabilise ? Moi, ça fait maintenant 25 ans que je travaille sur ces mondes numériques.
Je trouve qu'il y a une dégradation totale de ce qui est en train de se passer sur ce qu'on nous montre. Étrangement, on a parlé de TikTok. J'ai presque parfois, même si ça paraît fou, je préfère TikTok. Je trouve que... Oui, non, mais je sais. Mais je trouve que, justement, les contenus... Parce qu'il faut savoir que les techniques de captation d'attention sont terribles. Mais néanmoins...
Néanmoins, je trouve qu'il y a une forme de diversité que je ne trouve plus sur Instagram. Je trouve qu'Instagram est devenu... Ça, ça dépend. C'est très personnel. Ne nous éloignons pas. Je ne parle qu'avec mon point de vue subjectif. Votre point de vue est intéressant, mais ne nous oublions pas, la question, c'est les jeunes et les réseaux. Et comment faire pour mieux protéger la jeunesse des réseaux ? Bien sûr, je termine juste
Ce que je pense, c'est que oui, protégeons les jeunes. On n'interdit pas ? On n'interdit pas. Et alors, on fait quoi ? On les protège. Eh bien, il y a peut-être une voie qui est plus longue, comme toujours. C'est ce qu'on appelle l'éducation numérique. L'éducation numérique qui, normalement, devrait se faire dans les collèges-lycées, mais qui est souvent abordée à peu près toujours de la même manière. Et je pense qu'il faudrait créer des vrais
Des vraies réflexions où les adolescents seront eux-mêmes convoqués dans leur capacité à penser ce qu'ils pensent être intéressant, pas intéressant. Et je pense que, comme à l'époque avec l'éducation aux images, mettre des mots. Déjà, le fait de mettre des mots sur les pratiques est nécessaire. Et je crois que c'est ça qui est le plus important. Qui porterait cette éducation numérique ? Les professeurs ? Normalement, c'est les professeurs à l'école, évidemment. C'est quand même pas du con du serein. Je voudrais vous poser la question.
Sophie Giel. Est-ce que la balle n'est pas dans le camp ? Est-ce qu'on n'est pas face à la question centrale, face au danger des réseaux pour les jeunes ? Plutôt que de responsabiliser les plateformes, plutôt que d'interdire les plateformes, la question de la responsabilité avec cette éducation numérique, qu'est-ce que vous en pensez ? Et vous avez commencé à évoquer le rôle des parents, il est aussi clé.
Oui, non mais tout le monde est clé. Je veux dire, il s'agit justement de ne pas interdire aux mineurs ou aux moins de 16 ans parce qu'il faut responsabiliser les plateformes.
C'est elles qui sont responsables du contenu. C'est elles qui éditorialisent les contenus. C'est elles qui choisissent les fonctionnalités dont nous parlons, qui sont ces fonctionnalités qui captent l'attention. Mais c'est l'encadrement de l'enfant aussi, parents et école, qui apprennent aussi à se servir de l'outil numérique. Le problème, c'est que si jamais on interdisait, et c'est ça un des effets très négatifs, à mon avis, du rapport « Éducation aux écrans, le temps perdu »,
c'est que si on interdit, on ne peut plus en parler à l'école. Or, c'est le lieu de la réflexivité. Moi, je mène avec un certain nombre de collègues, nous menons des actions. Puis voilà, il y a quand même le Clémy aussi en France, qui est une institution qui aide les enseignants et qui les forme pour travailler sur les médias et notamment sur les médias numériques. Dès lors que vous interdisez, vous empêchez complètement
l'éducation à l'école sur le numérique. Vous avez répondu à la question de l'interdiction tous les deux, vous n'êtes pas pour, vous avez répondu à la question du débat, la question c'est maintenant comment, à partir de là, on protège les jeunes des réseaux. Et c'est pour ça que je voudrais vous faire réagir à cette éducation numérique qu'évoque Michael Estora. Oui, c'est une voie, si vous voulez, sur laquelle je travaille. Notamment, j'ai monté un projet qui s'appelait Adoprivacy avec 15 autres chercheurs enseignants. Nous allons publier les résultats.
Et ce que nous avons proposé, qui a beaucoup plu, mais qui demande des moyens, c'était à la fois, nous faisions une enquête sur la manière dont les jeunes envisagent la protection de leur vie privée sur les plateformes numériques. Donc déjà, ça les met en situation de parler de choses dont ils ne parlent pas. Ils peuvent recevoir quelques conseils, mais ils ont peu l'habitude d'en parler. Et ensuite, nous les avons accompagnés, nous avons accompagné les enseignants sur des scénarios pédagogiques
autour de micro-fictions dans lesquelles on les faisait travailler sur les enjeux éthiques et juridiques des situations dans lesquelles un petit personnage va voler des données ou va être géolocalisé. Et ça a suscité beaucoup d'intérêt. Donc, petit débat à l'intérieur de la classe et puis qui permet aussi des apprentissages de droits.
Un minimum de droits est absolument nécessaire aussi pour comprendre comment se protéger sur les réseaux sociaux numériques ou sur les grandes plateformes. Et puis ensuite, nous leur proposions de mener eux-mêmes une enquête. Et je peux vous dire que ça demande des moyens, mais quand on le fait, ça suscite beaucoup d'enthousiasme, y compris au collège. Donc on avait des classes entre la cinquième et la terminale qu'on accompagnait dans ce projet Adopriacique.
Et ça, c'est une des façons de former, mais donc d'accompagner. Il faut voir que les enseignants eux-mêmes se sentent mal formés sur ces questions. Donc, il y a tout un enjeu. Et puis, on parle de la France, comment ça se passe ailleurs ?
Et en France, c'est peut-être un des pays dans lequel les ressources sont en tout cas disponibles pour les enseignants qui voudraient s'en emparer. Mais il n'y a pas que les enseignants. Il y a les médiateurs, il y a les éducateurs spécialisés, il y a les éducateurs de façon plus générale. On a aussi beaucoup d'associations d'éducation populaire en France qui s'emparent aussi de ces questions.
Et donc, oui, l'éducation, oui, mais il faut des moyens. Et donc, il faut surtout penser que l'éducation ne peut pas remplacer la régulation. Il faut de la régulation pour que l'éducation... L'éducation numérique, la réglementation, le DSA en Europe. C'est ça. Il faut tenir là-dessus. Michael Stora, on a entendu l'expérience de Sophie Gell en tant que professeur. Vous, en tant que psychanalyste,
Est-ce qu'auprès des jeunes que vous pouvez rencontrer, vous préconisez un encadrement autour de cette question des réseaux sociaux ? Est-ce que c'est un sujet qui est abordé ? Oui, évidemment. Moi, j'appelle ça la médiation numérique. La médiation numérique, ça commence déjà par le fait d'en parler.
Et c'est vraiment important, cette idée de mettre des mots sur une pratique qui est souvent solitaire, qui n'est même pas partagée en famille. C'est un autre drame. Je pense qu'il faudrait plus partager nos pratiques, en parler. Et à partir de ce moment-là, étrangement, déjà même au sein de la dynamique familiale, comme avec les profs, parfois certains profs, disons les choses, ont des préjugés.
Ce qui est normal, ils ont aussi leurs propres enfants. Ils sont très peu formés. Au-delà d'être formés, parce que moi je travaille avec des soignants, les soignants c'est la même chose, ils sont formés en tant que soignants, mais par rapport au numérique, ils ont des ados, et parfois ils sont pris dans ce qu'on appellerait leur subjectivité pas toujours positive, ils en ont peur, ils sont inquiets, et tout ça n'aide pas au dialogue.
Au fond, c'est ça la question, c'est les problématiques aussi d'opinion qui finalement empêchent le dialogue. Et c'est vrai que très souvent, puisque dans les cours d'éducation civique et morale, c'est souvent à ce moment-là que les collégiens abordent la question du numérique. Et très souvent, c'est toujours les éternelles mêmes histoires, c'est-à-dire faites attention à votre réputation, etc. Ce qui est très...
Alors que justement, le fait d'aborder les deepfakes, d'aborder l'IA, d'aborder tout ça, d'aborder évidemment les tests complotistes ou autres,
C'est des choses qu'il faut inventer et je pense qu'il y a des gens qui se travaillent sur ces questions-là. Parlons des réseaux aux jeunes, mais en tout cas n'interdisons pas les réseaux sociaux aux plus jeunes, c'est ce que vous préconisez. Parlons-en et puis évidemment renforçons, en tout cas comme l'Europe le fait, la réglementation. Loin évidemment de ce qui se passe aux Etats-Unis. Merci beaucoup à vous deux, Sophie Géel et Mickaël Stora. Merci beaucoup à Florence Ponce qui était à la préparation de ce débat. Et Hélène Abril à la réalisation. Restez à l'écoute de RFI.
coup d'œil à la pendule. Il est 18h58 ici à Paris. Alors dans un peu plus d'une minute, ce sera le grand journal du soir et on va revenir, ce sera le dossier d'Adrien Delgrange. On va revenir évidemment sur la déclaration de politique générale qui a été prononcée aujourd'hui en France par le Premier ministre.
François Bayrou, juste après, il sera 19h30, ce sera la première édition d'Afrique Soir. Bonsoir Célie Bérouet. Bonsoir Romain, bonsoir à tous. On jette un coup d'œil au programme de ce soir ? Oui, nous irons en Afrique du Sud où les macabres opérations de secours se sont poursuivies sur le site d'une mine illégale. C'est un puits désaffecté. 36 corps sans vie de mineurs clandestins ont été remontés à la surface.
Au Mozambique, deuxième jour de grève générale à l'appel de l'opposition. Un mouvement, vous l'entendrez, très suivi à Maputo, à la veille de l'investiture du président Daniel Chapout. Le football, et c'est important car le Shand 2025 est reporté au mois d'août. Figurez-vous que la compétition devait se jouer en Tanzanie, au Kenya, en Ouganda en février. Elle est donc reportée, mais alors mystère, le tirage au sort de la compétition. Et lui, bel et bien maintenu à Nairobi, demain au Kenya. Et puis l'ancien sélectionneur du Cameroun, Rigobertson, que l'on ne présente plus sur RFI,
a été nommé hier. C'est une surprise à la tête de l'équipe nationale de Centrafrique. Merci Sylvie. On vous retrouve dans 30 minutes sur Radio France Internationale. Bientôt 19h ici à Paris. Restez à l'écoute le journal.