We're sunsetting PodQuest on 2025-07-28. Thank you for your support!
Export Podcast Subscriptions
cover of episode E159 La perfection est-elle notre nouvelle religion ?

E159 La perfection est-elle notre nouvelle religion ?

2024/12/4
logo of podcast InnerFrench

InnerFrench

AI Deep Dive AI Chapters Transcript
People
H
Hugo
Topics
Hugo: 我在这个节目中探讨了完美主义的起源、现代表现及其影响。从古希腊的几何学到基督教的信仰,再到现代社会对完美的物质化追求,完美主义始终存在,并以不同的形式影响着人们的生活。我个人也承认自己有完美主义倾向,这有时会成为一种拖延症的表现。完美主义虽然有时会被欣赏,但它往往是多种精神疾病的症状之一,会带来痛苦和焦虑。因此,我们需要学会放下压力,接受不完美,才能更好地生活。我们需要认识到,完美地掌握一门外语是不现实的,即使是母语人士也会犯错。学会庆祝阶段性成果,而不是追求完美,这才是更重要的。

Deep Dive

Chapters
Cet épisode explore l'obsession moderne pour la perfection, en la comparant à une religion. L'histoire commence par l'analyse de la conception de la perfection dans la Grèce antique, où elle était liée à la géométrie et à l'harmonie cosmique, avant d'étudier son évolution à travers le prisme de la philosophie platonicienne et du christianisme.
  • La perfection était liée à la géométrie dans la Grèce antique.
  • Platon et son allégorie de la caverne illustrent la quête de la connaissance et de l'idéal.
  • Le christianisme propose une perfection divine inaccessible, à atteindre par la foi.

Shownotes Transcript

Translations:
中文

La perfection est-elle notre nouvelle religion ? Salut à toutes et à tous ! J'espère que vous allez bien en ce mois de décembre. On sent que la fin d'année approche et je sais pas si c'est pareil pour vous mais moi je sens aussi une certaine pression monter. Je me souviens, quand j'étais enfant, cette période de l'année me semblait interminable parce que je comptais les jours avant l'arrivée du Père Noël

Mais maintenant, c'est le contraire. Les semaines passent à une vitesse folle. Au travail, il y a plein de sujets à boucler, à terminer avant le 31 décembre. Et le reste du temps, il faut organiser les fêtes de fin d'année. Installer les décorations, acheter les cadeaux, réserver les billets de train pour aller voir la famille…

Je me demande si c'est juste une question d'âge ou si c'est la pression sociale qui a évolué. À l'époque de mes grands-parents, Noël, c'était juste un bon repas en famille. Désolé de parler seulement de Noël, mais c'est la fête que je connais le mieux. Donc, je disais qu'avant, on fêtait Noël de façon plus simple, alors qu'aujourd'hui, il y a une longue liste de choses à préparer pour que tout soit parfait le jour J.

Mais en réalité, le reste de l'année aussi, on est assaillis d'injonctions à la perfection.

Être assailli, ça signifie être attaqué avec force. Qu'est-ce que j'entends par des injonctions à la perfection ? Eh ben tout simplement des ordres qui nous imposent de faire chaque chose parfaitement. Il faut avoir 20 sur 20 à l'école, ne jamais faire d'erreur au travail, trouver le ou la partenaire idéal, suivre la meilleure routine matinale ou encore, et je sais que ça concerne certains parmi vous,

Donc vous voyez, on est assailli par ces injonctions à la perfection dans quasiment tous les domaines de notre vie.

C'est ce qui m'a inspiré le sujet de cet épisode. La perfection est-elle notre nouvelle religion ? Alors, peut-être que cette comparaison vous semble exagérée ou bizarre. Peut-être que vous trouvez ça étrange de comparer notre obsession pour la perfection à une religion. Mais accordez-moi le bénéfice du doute et je vais essayer de vous convaincre que j'ai pas choisi ce titre par hasard.

Commençons par un petit voyage dans le temps, direction la Grèce au IVe siècle avant Jésus-Christ. À cette époque, les Grecs étaient polythéistes, c'est-à-dire qu'ils croyaient en plusieurs dieux et déesses. Et si vous connaissez un tout petit peu la mythologie grecque, vous savez que ces divinités étaient loin d'être parfaites.

En cela, les dieux grecs ressemblaient beaucoup aux humains. Ils avaient autant, si ce n'est plus, de défauts que de qualités. Donc, pour les grecs de cette époque, la perfection n'était pas à chercher du côté de la religion, mais plutôt dans la géométrie. Ils ont été les premiers à la considérer comme une science et pas un simple outil de construction.

Ils ont théorisé des principes fondamentaux et des preuves logiques pour démontrer des théorèmes, ce qui a posé les fondations des mathématiques modernes. Pour les Grecs, l'idée de perfection était étroitement liée à la géométrie. « Étroitement liée », ça veut dire qu'il existe une connexion très forte entre deux choses, personnes ou idées.

Il considérait la perfection comme ce qui est fini, symétrique, équilibré et harmonieux.

Par exemple, à leurs yeux, la forme la plus parfaite était le cercle. Et ce qui est intéressant, c'est que la géométrie ne leur servait pas uniquement à calculer le périmètre d'un cercle ou l'hypoténuse d'un triangle. Elle leur servait à expliquer le cosmos, l'univers. Oui, les Grecs utilisaient la géométrie pour tenter de comprendre la réalité physique à travers des principes mathématiques.

comme par exemple les mouvements des planètes.

Quand leurs démonstrations étaient correctes, quand leurs calculs étaient justes, ils avaient l'impression de découvrir une vérité intemporelle et universelle. Selon eux, l'harmonie parfaitement géométrique du cosmos était forcément une manifestation de la volonté divine. Il n'y avait pas d'autre explication possible. Autrement dit, leur dieu n'était pas parfait, mais les lois géométriques du cosmos, si !

On pourrait presque dire que dans la Grèce antique, la géométrie était une religion. Certes, elle n'avait pas de divinité à vénérer ni de rituel collectif, mais elle était considérée comme quelque chose de divin qui permettait d'expliquer le monde de manière plus convaincante que la mythologie. Et comme je vous ai dit que la notion de perfection était étroitement liée à la géométrie,

On peut y voir les prémices, les premiers signes du lien entre perfection et religion.

Mais il y a un philosophe qui a poussé cette idée encore plus loin, et pas n'importe lequel, la star des philosophes grecs, Platon. Il faut savoir que Platon et ses collègues étaient férus de géométrie. Attention, petit mot de vocabulaire avancé, « férus », F-E accent aigu R-U. Être férus, ça signifie qu'on est passionné et qu'on a beaucoup de connaissances dans une discipline ou un domaine particulier.

Par exemple, elle est férue d'architecture. C'est plutôt un mot qu'on utilise dans la langue formelle et pour parler de quelqu'un d'autre que soi. Donc je vous déconseille de dire « je suis férue de cinéma français » si vous voulez pas passer pour un snob.

Bref, revenons-en à notre ami Platon. Platon était féru de géométrie. D'ailleurs, il croyait que le monde était composé de solides géométriques, autrement dit, de formes en trois dimensions, comme le cube, la sphère, etc. Platon considérait qu'il y avait cinq solides géométriques parfaits qui représentaient les briques fondamentales de l'univers.

Néanmoins, le plus intéressant dans l'œuvre de Platon, c'est pas son explication de la structure géométrique de l'univers, mais l'histoire qu'il a écrite pour illustrer le chemin vers la connaissance. C'est la célèbre allégorie de la caverne. Je sais pas si c'est le cas ailleurs, mais en France, c'est une des premières choses qu'on étudie quand on commence la philosophie au lycée.

Donc tous les lycéens français ont entendu parler de l'allégorie de la caverne, sauf peut-être ceux qui étaient malades ce jour-là. Platon raconte l'histoire de prisonniers qui ont passé toute leur vie dans une caverne. Ils sont enchaînés dedans depuis leur naissance. Ces prisonniers ne peuvent pas bouger. Ils ne peuvent même pas tourner la tête à cause des chaînes.

Ils sont donc obligés de regarder le mur, ou plutôt la paroi de la caverne, qui est face à eux. Derrière eux, il y a un feu qui projette des ombres sur la paroi, les ombres d'objets ou de personnes qui passent à l'extérieur de la caverne. De toute leur vie, les prisonniers n'ont vu que ces ombres. Donc, pour eux, elles représentent la réalité.

Mais un jour, un des prisonniers réussit à sortir de la caverne. Au début, il est ébloui par la lumière du soleil. Vous savez, quand on a le soleil dans les yeux, on est ébloui. Pendant quelques instants, on a du mal à voir. Imaginez que vous ayez passé toute votre vie dans une caverne sombre. Quand la lumière du soleil arrive à vos yeux pour la première fois, vous ne voyez rien.

Bref, le prisonnier est ébloui. Mais quand ses yeux s'habituent à la lumière du soleil, il découvre le monde extérieur et les objets dont, jusqu'ici, il connaissait seulement les ombres. Il se rend compte que les objets qu'il voyait dans la caverne n'étaient pas réels, qu'ils n'étaient que des ombres.

Cette allégorie de Platon représente le chemin vers la véritable connaissance, un chemin qui demande du temps et des efforts pour dépasser les illusions. Ok, alors tout ça c'est très bien, mais vous allez me dire « Hugo, quel est le rapport entre cette histoire et la perfection ? » Attendez, j'y arrive. Pour Platon, il existe deux mondes, le monde sensible et le monde des idées.

Le monde sensible, c'est le monde matériel dans lequel nous vivons. Il est fait de choses qui changent, qui se détériorent, qui disparaissent ou qui meurent. C'est donc un monde imparfait. En plus, nous le percevons à travers nos sens, la vue, l'ouïe, etc., qui, selon Platon, sont souvent trompeurs. Dans son allégorie, le monde sensible, c'est bien sûr la caverne.

Au contraire, le monde des idées, c'est un monde immatériel et immuable. C'est là que se trouvent les idées, ou ce que Platon appelle aussi les formes. Elles sont éternelles, universelles et parfaites. Par exemple, l'idée de beauté, l'idée de justice, l'idée de courage, etc.,

Ces formes ne dépendent pas des objets ou des situations particulières. Elles existent indépendamment de leurs représentations dans le monde sensible. La philosophie, c'est donc la méthode qui permet de passer du monde sensible au monde des idées, de dépasser les représentations physiques qui sont sous nos yeux pour nous rapprocher des idées dans leur forme parfaite.

Platon considère qu'avant de naître, notre âme vit dans le monde des idées. Mais quand elle s'incarne dans un corps, autrement dit quand nous naissons, l'âme oublie le monde des idées. Elle devient en quelque sorte amnésique. La bonne nouvelle, c'est que, toujours selon Platon, amnésie

Après la mort, notre âme retourne dans le monde des idées. Mais évidemment, il conseille plutôt d'essayer de s'en souvenir de notre vivant pour ne pas passer toute notre existence dans l'illusion. Il faut donc consacrer notre vie à cette quête de connaissances. Alors attention, n'allez pas croire que le monde des idées est une sorte de paradis.

Pour Platon, c'est simplement un concept philosophique, pas une promesse religieuse. Il ne promet pas aux Grecs une vie meilleure après la mort s'ils deviennent philosophes. Mais c'est vrai qu'on retrouve de nombreux concepts platoniciens dans certaines religions, en particulier le christianisme. Par exemple, dans le christianisme aussi, il y a cette dichotomie entre le monde terrestre imparfait, rempli de vices,

et le ciel où notre âme ira retrouver Dieu après la mort.

On retrouve aussi le concept de l'immortalité de l'âme. Et c'est pas surprenant parce que les idées de Platon ont beaucoup influencé les premiers théologiens chrétiens, comme saint Augustin. Mais une des grandes différences entre la pensée platonicienne et le christianisme, c'est que pour Platon, la perfection s'incarne dans les idées. Alors que pour les chrétiens, la perfection est incarnée par Dieu.

C'est écrit très clairement dans l'évangile de saint Matthieu. Il y a une parole attribuée à Jésus, une parole qu'il prononce après avoir fait une longue liste d'injonctions aux fidèles sur comment bien se comporter, comment traiter son prochain, etc. À la fin de cette liste d'injonctions, Jésus dit, je cite, « Soyez donc parfaits comme votre Père céleste est parfait. »

Ici, on trouve donc clairement l'idée que Dieu est un être parfait. Il est sans défaut ni limite et sa perfection est immuable, inchangeable. D'ailleurs, à l'origine, le monde qu'il a créé était parfait lui aussi. Mais cette perfection a été gâchée par le péché originel.

Donc, avec le christianisme, la perfection cesse d'être un concept géométrique ou philosophique. Elle devient un principe religieux et moral. Les chrétiens sont encouragés à vivre une existence moralement parfaite en suivant les enseignements de Jésus-Christ. Mais, et c'est important de le noter, la perfection ne peut être atteinte qu'avec la grâce de Dieu et seulement après la mort.

Autrement dit, les chrétiens savent que leurs efforts seuls ne suffiront pas à atteindre la perfection.

Ils sont forcés de reconnaître leur imperfection et leur dépendance envers Dieu. En résumé, la perfection chrétienne est la quête d'une transformation spirituelle fondée sur la communion avec Dieu. Mais vous n'êtes pas sans savoir que les religions, dont le christianisme, sont beaucoup moins influentes aujourd'hui. Alors, est-ce que la perfection au sens moderne a encore une dimension religieuse ?

Avec l'essor de la modernité, autrement dit au XIXe et XXe siècle, on a assisté à une montée de l'individualisme et un recul de l'influence des religions. Résultat, la perfection a progressivement cessé d'être définie par des normes religieuses pour devenir une affaire personnelle.

D'un côté, c'est plutôt positif parce que ça permet de s'émanciper des modèles rigides imposés par la religion. Chacun est libre de définir sa propre version de la perfection en fonction de ses goûts, de ses ambitions, de ses désirs. Mais on va voir que cette liberté a un prix.

Comme je vous le disais, la perfection n'est plus un idéal abstrait comme avec Platon, ni l'image de Dieu comme dans le christianisme. Non, aujourd'hui, on en a une vision beaucoup plus terre-à-terre.

« Terre à terre », c'est une expression qui signifie « prosaïque », « matérialiste ». Quand on dit que quelqu'un est « terre à terre », ça veut dire que cette personne s'occupe seulement des choses de la vie quotidienne, qu'elle ne s'intéresse à rien d'autre. C'est plutôt utilisé de manière négative. D'ailleurs, il ne faut pas confondre ça avec l'expression « avoir les pieds sur terre » qui, elle, a un sens positif.

Avoir les pieds sur terre, ça veut dire qu'on est pragmatique, qu'on a le sens des réalités, qu'on a la tête sur les épaules. Alors pourquoi aujourd'hui la perfection est quelque chose de plus terre à terre ? Eh bien parce qu'on est bombardé d'exemples concrets de perfection toute la journée. Pas plus tard qu'hier sur YouTube, j'ai vu une pub pour, je cite, « le pull parfait ».

Donc, j'ai pas besoin d'imaginer le pull parfait tel qu'il existe dans le monde des idées parce que je l'ai là, sous les yeux. En tout cas, d'après l'entreprise qui le produit. C'est qu'un exemple parmi tant d'autres. À la télévision, dans les magazines et sur Internet, on essaye de nous vendre la perfection à longueur de journée. La voiture parfaite, l'appartement parfait, les vacances parfaites.

Peut-être même que quelqu'un vous a déjà promis la méthode de français parfaite. On se dit qu'il suffit de sortir sa carte de crédit pour accéder à cette perfection. Oui, car les entreprises ont compris depuis longtemps que la perfection fait vendre. Mais alors, si elle a perdu toute dimension spirituelle pour devenir une simple marchandise, est-ce qu'on peut encore la considérer comme une religion ?

Eh bien, je pense que oui. En tout cas, elle en a certains traits. Si on a envie d'acheter ses produits et services, c'est pas vraiment pour le plaisir de les posséder, mais pour la promesse implicite qui est faite, celle d'avoir une vie parfaite.

Donc, et c'est le premier point commun avec les religions traditionnelles, la perfection propose un idéal transcendant. Certes, cet idéal peut prendre différentes formes selon les personnes, mais dans les grandes lignes, nous le partageons. C'est particulièrement visible sur les réseaux sociaux. On a l'impression de voir des gens plus ou moins comme nous vivre leur meilleure vie.

Selon vos aspirations, c'est peut-être quelqu'un qui a le physique dont vous rêvez, quelqu'un qui passe son temps à voyager autour du monde, ou alors quelqu'un d'extrêmement riche. Bien sûr, au fond, vous savez que leur vie est mise en scène, ils en montrent seulement les meilleurs moments. Mais vous ne pouvez pas vous empêcher de penser qu'ils doivent être parfaitement heureux parce qu'ils ont ce qu'il semble vous manquer.

Deuxième point commun, la perfection moderne s'accompagne de nombreux rituels, comme une religion. Il y a bien sûr les routines pour devenir plus beau, plus productif, plus sportif, plus intelligent. On prend des compléments alimentaires et un chèque protéiné au petit déjeuner. On va courir ou à la salle de sport. On écoute un podcast dans le métro en allant au boulot.

Tout ça, toujours dans l'optique de se rapprocher de la vie parfaite dont on rêve. Et, pour être certain de respecter ces rituels, nous avons mis en place un système très efficace, l'évaluation. C'est simple, nous sommes constamment évalués. À l'école, au travail et même dans nos loisirs.

Par exemple, de plus en plus de gens évaluent leurs performances quand ils font du sport, quand ils apprennent une langue. On a l'impression qu'en améliorant notre score, on se rapprochera un peu de cette perfection. Oui, car contrairement au christianisme, cet idéal semble accessible ici et maintenant. Il suffit de faire des efforts et d'avoir le portefeuille bien rempli.

Tous les outils sont à portée de main. Les livres de développement personnel, les formations en ligne, les tutoriels YouTube, les applications sur notre téléphone, les montres connectées. Et si on n'obtient pas les résultats promis, on se met immédiatement à chercher la prochaine méthode miracle ou le prochain gadget qui, cette fois, nous aidera à atteindre la perfection.

Malheureusement, nous sommes comme Sisyphe dans la mythologie grecque. Cet homme condamné à recommencer sans cesse à pousser son rocher jusqu'en haut d'une montagne.

Pourquoi je nous compare à Sisyphe ? Eh bien parce que nous sommes condamnés à recommencer cette quête pour la perfection encore et encore. Oui, car tout va de plus en plus vite. Les tendances s'enchaînent à une vitesse folle. Ce qui était parfait hier est déjà obsolète ou dépassé aujourd'hui.

Moi, si j'achetais ce pull parfait qu'on essaye de me vendre sur YouTube, je suis sûr qu'il ne serait plus parfait l'année prochaine parce qu'il serait déjà démodé. Donc, il faudrait que j'en cherche un nouveau.

Enfin, dernier point commun entre la perfection moderne et les religions, la perfection a ses croyants et ses fanatiques. Les croyants, ce sont toutes celles et ceux qui sont lancés dans cette quête de perfection, que ce soit dans un domaine spécifique ou, pour les plus ambitieux, dans leur vie.

Si cette quête fait tellement d'adeptes, tellement de fidèles, c'est parce qu'elle nous donne l'impression qu'au milieu du chaos de notre existence, du cirque de la politique, des catastrophes climatiques et des guerres, il y a une chose que nous pouvons contrôler. On peut toujours essayer de mettre en place la routine matinale parfaite, d'améliorer son temps de course ou d'être plus productif.

Ça permet de donner un but à notre vie, car pour le reste, on a souvent l'impression d'être impuissant. On a parlé des croyants, maintenant intéressons-nous aux fanatiques, les perfectionnistes. Ce sont des personnes pour qui la perfection est une véritable obsession.

Elles passent leur vie à essayer de l'atteindre. Mais, contrairement aux fanatiques d'autres religions, les perfectionnistes sont plutôt appréciés. Par exemple, dans des domaines comme le sport ou l'art. On admire celles et ceux qui sont prêts à répéter les mêmes gestes des millions de fois jusqu'à en avoir une maîtrise totale.

Il y a quelques semaines, je suis allé voir le film « Monsieur Aznavour » au cinéma, un biopic sur le célèbre chanteur Charles Aznavour.

D'ailleurs, c'est pas mal du tout, même si vous n'êtes pas fan de sa musique, je vous le recommande. Bref, il y a une scène où Charles Aznavour enregistre une chanson en studio. Mais il y a toujours quelque chose qui ne va pas. Soit c'est sa voix, soit c'est un musicien qui joue trop vite, un autre qui ne joue pas assez fort. Donc il force tout le monde à recommencer encore et encore.

Alors, on peut penser que ce perfectionnisme lui a été utile parce qu'il a eu une carrière exceptionnelle. Mais dans le film, on voit que malgré ce succès, Charles Aznavour ne semblait pas très heureux. Comme il n'était jamais complètement satisfait de ses performances, il passait tout son temps à travailler pour essayer de faire mieux.

Mais je dois vous avouer que moi aussi, j'ai un côté perfectionniste. La preuve, je m'étais promis de ne pas passer plus d'une journée sur cet épisode, de simplement lire deux ou trois articles, faire un plan et enregistrer. Résultat, ça fait quasiment une semaine que je travaille dessus. Et ce que vous entendez là, c'est la troisième version.

D'ailleurs, ça a fait rire Ingrid que je choisisse ce sujet parce qu'elle sait que j'ai ce défaut. Quand je lui ai dit que j'en étais à la troisième version, elle m'a rappelé une phrase de Voltaire « Le mieux est l'ennemi du bien ». Autrement dit, on peut gâcher une chose en essayant de l'améliorer sans cesse. Il y a un autre dicton similaire que j'essaye de me rappeler pour soigner mon perfectionnisme « Fait vaut mieux que parfait ».

À un moment, il faut savoir dire stop. Il faut accepter de montrer son travail même s'il y a des détails qui ne vont pas. D'ailleurs, je pense que j'avais moins ce problème quand j'ai commencé le podcast. Je crois que mon perfectionnisme est apparu progressivement, peut-être comme une forme de procrastination, je sais pas. Bref, ça me permet de faire la transition vers la dernière partie de cet épisode. On va parler des dangers du perfectionnisme.

Bien que certains perfectionnistes soient admirés, cette qualité est souvent une source de souffrance. Il faut savoir que le perfectionnisme est un symptôme que l'on retrouve dans de nombreuses maladies mentales, comme la dépression, le burn-out, l'anorexie, les troubles obsessionnels compulsifs. Toutes ces maladies ont en commun le fait d'avoir le perfectionnisme dans la liste de leurs symptômes. Alors, comment le combattre ?

Bien sûr, si vous avez une de ces maladies, il faut consulter un professionnel. C'est pas à moi de vous donner des conseils. Mais pour les autres, je pense qu'il faut avant tout changer notre façon de voir les choses. Ici, je vais citer un philosophe français contemporain, Charles Pépin.

Il a un excellent podcast sur Spotify intitulé « Une philosophie pratique ». Il anime aussi une émission de radio sur la station France Inter. Ça s'appelle « Sous le soleil de Platon ». Mais c'est un peu plus difficile que son podcast parce qu'il discute avec des invités. Bref, Charles Pépin dit que le perfectionnisme traduit un manque de confiance en soi. On est perfectionniste quand on doute de ses capacités.

On se dit « je ferai ça uniquement quand je serai capable de le faire parfaitement ». Par exemple, peut-être que vous vous dites « je chercherai un partenaire de conversation français uniquement quand je parlerai sans faire d'erreur ». Mais en réalité, et j'imagine que vous le savez bien, on ne peut pas apprendre une langue sans faire d'erreur. Autrement dit, le perfectionnisme est un obstacle à votre progression.

En plus, cette quête de perfection nourrit notre frustration. Peut-être que vous êtes tellement focalisés sur l'idée de parler français parfaitement que vous ne voyez pas toutes les petites victoires que vous remportez quotidiennement. Or, apprendre une langue, c'est un processus qui demande des années. Donc, si on ne célèbre pas les victoires intermédiaires, il y a de grandes chances qu'on abandonne.

Et puis, et ça aussi je suis sûr que vous le savez, parler parfaitement une langue, ça veut pas dire grand-chose. Si vous pensez que ça signifie parler sans faire la moindre erreur, je peux déjà vous dire que ça n'arrivera jamais. Même les natifs font des erreurs. Des erreurs entre guillemets. Et même si vous atteignez un niveau C2, il y aura forcément des jours où vous serez fatigué et où vous aurez l'impression de mal parler français.

Alors autant accepter cette réalité dès maintenant Vous serez plus détendu, plus relax et peut-être que grâce à ça, vous ferez moins d'erreurs Même les grands sportifs et les artistes disent qu'ils réalisent souvent leur meilleure performance quand ils arrivent à lâcher prise Lâcher prise, ça signifie arrêter de s'accrocher à quelque chose de vouloir tout contrôler

On relâche la pression et on abandonne les pensées ou émotions négatives qui nous empêchent d'avancer. Lâcher prise, c'est parfois aussi important que l'entraînement. Donc si vous aussi vous en avez marre de votre perfectionnisme, il est temps d'apprendre à lâcher prise. Par exemple, peut-être que vous vous dites que cette année, vous n'avez pas progressé autant que vous le souhaitiez en français.

Mais si vous écoutez cet épisode, ça veut dire que vous n'avez pas abandonné et que vous êtes capable de comprendre beaucoup de choses en français, ce qui est déjà une belle victoire. Donc moi, je vous dis bravo pour votre courage et votre persévérance.

Ça donne un peu l'impression que c'est le dernier épisode de 2024, mais non, je reviens dans deux semaines en compagnie d'Ingrid et Anya pour finir l'année ensemble. Alors bon courage si vous êtes dans les préparatifs des fêtes et à bientôt !