18h30 ici à Paris, nous parlons de l'immigration en France ce soir dans le débat du jour. Le débat du jour. Romain Osoui. Eh oui, car les derniers chiffres dans ce domaine ont été annoncés ce mardi et ils étaient observés de près parce que le sujet est brûlant actuellement en France, ravivé d'ailleurs récemment par les propos de François Bayrou, le Premier ministre, sur, je cite, « un sentiment de submersion migratoire ».
En France donc, le nombre de titres de séjour délivrés est en hausse, mais celui d'expulsion l'est également. En deux mots, c'est ce qui ressort de ce bilan 2024 qui a été publié par le ministère de l'Intérieur. Notre question ce soir, est-ce que la France peut se passer d'immigration dans ces chiffres ? Quelle est la part d'immigration indispensable pour faire fonctionner économiquement le pays ? Quels risquent d'être les conséquences du durcissement politique qui est annoncé ? Soyez les bienvenus dans le débat du jour.
Et pour répondre à ces questions, nos trois invités en studio avec moi. Jean-Christophe Dumont, bonsoir. Bonsoir. Vous êtes chef de la division Migration de l'OCDE, l'Organisation de Coopération et de Développement Économique. Face à vous, Christophe Berthoussie, bonsoir. Bonsoir. Sociologue et politiste, directeur de l'IDEM, l'Institut pour la Démocratie, chercheur à l'Institut Convergence Migration. Et notre troisième invité, également à mes côtés, Lionel Rago, bonsoir. Bonsoir. Professeur d'économie à l'Université Paris-Nanterre, conseiller scientifique...
au CEPI, le Centre d'études prospectives et d'informations internationales. Merci beaucoup à vous trois d'avoir accepté l'invitation du débat du jour sur RFI, de vous être déplacés dans notre studio. D'abord, une réaction à ces chiffres, je vais en citer quelques-uns parce qu'il y en a eu beaucoup sur ce bilan 2024 de l'immigration en France.
4,3 millions de titres de séjour valides en France. Ça, c'est la situation. 4,3 millions de titres de séjour qui sont valides dans le pays. C'est à peu près 4% d'augmentation. Le nombre de premiers titres de séjour délivrés également en hausse, mais de manière plus mesurée. Mais dans le même temps, je le disais, le nombre d'expulsions en hausse, en forte hausse, plus 26%. Jean-Christophe Dumont, qu'est-ce qu'il faut en retenir ? Je vais poser une question simple. Est-ce qu'il y a de plus en plus ou de moins en moins d'immigrés en France aujourd'hui ?
En réalité, ces chiffres qui font état du nombre de primo-délivrance de titres, c'est-à-dire des titres qui sont donnés à des personnes qui n'en avaient pas précédemment, font état d'un niveau en 2024 qui est somme toute assez élevé parce qu'il est équivalent à 2023. Et on n'avait pas connu des chiffres de ce niveau même avant la période Covid. Donc on a une immigration qui est stabilisée en 2024, mais qui correspond à des niveaux relativement
élevée avec une légère augmentation des migrations économiques. Je pense qu'on va y revenir. Une baisse à peu près dans les mêmes proportions de l'immigration familiale, une augmentation du nombre de réfugiés qui fait suite à une augmentation de la demande d'asile en 2023.
Et pour le reste, une relative stabilité, notamment pour les étudiants. Une stabilité, ça veut dire qu'il y a à peu près autant... Quelle est la proportion d'immigrés en France ? On peut le rappeler aujourd'hui ?
Alors, il y a environ 10,2% d'immigrés en France au sens de l'INSEE, c'est-à-dire de gens qui sont nés à l'étranger. Quand on prend en compte tous les gens qui sont nés à l'étranger, on est plutôt autour de 13%, mais c'est en dessous de ce qu'on observe dans la plupart des pays de l'OCDE. Par exemple, en Suède, on est à plus de 20%, en Allemagne à 17%, en Belgique à 18%, en Irlande à 20%, aux Pays-Bas à 20%.
à 15. Donc, en réalité, l'immigration, même si on prend l'ensemble des personnes qui sont nées à l'étranger, est plus faible en France qu'elle née dans les pays européens voisins. Donc, un peu plus de 10% ?
d'immigrés dans la population française, Christophe Berthossi, sur les renouvellements, c'est ce que disait Jean-Christophe Dumont, il y a une forte hausse des renouvellements pour des motifs économiques, plus de 10,5% de hausse, c'est important. Ça répond à des besoins ? Les besoins sont là. Pour faire fonctionner aujourd'hui des métiers, pas que des métiers en tension, pour faire fonctionner un commissariat ou un hôpital,
L'immigration fait partie du dynamisme économique et social de la société française. Ça a toujours été le cas. On peut faire un petit retour en arrière. L'évolution de l'immigration est forte depuis le début des années 2000. Elle était moins avant.
Écoutez, migration, on entend quoi par là ? Et là, on touche déjà à ce par quoi vous avez commencé quand vous disiez que c'est un sujet brûlant, qui a été ravivé par les propos. Donc, on est vraiment dans l'univers du récit, là. C'est-à-dire qu'il y a des chiffres qui nous racontent une réalité et à partir de là, il va y avoir des disputes sur comment on peut interpréter les chiffres.
Ce que donne la lecture politique dominante aujourd'hui, c'est qu'on prend ces chiffres comme la preuve que la France aura un problème avec l'immigration. C'est une manière de nier la réalité des besoins économiques qui demeurent. C'est une manière de ne pas regarder sur la durée
Ce qu'a été l'histoire migratoire française, on connaît l'expression de François Héran qui parle d'infusion lente et permanente. Donc ce n'est pas des à-coups, c'est la France vit dans un monde de mobilité internationale. Elle a des chiffres qui sont moindres que ses voisins européens. Oui, ce que dit Jean-Christophe Dumont. Mais qu'est-ce qui permet de dire avec ces chiffres ?
La France a un problème avec l'immigration. Vous dites que certaines personnes, à partir de ces chiffres, peuvent dire que la France a un problème avec l'immigration. Pourquoi ? Je dis qu'il y a un intérêt à la surenchère dans le débat. Et que cet intérêt à la surenchère dans le débat ne s'explique pas par la réalité décrite par les chiffres sur l'immigration aujourd'hui. Elle s'explique par quoi ? Par 40 ans
de tests de la rentabilité politique du thème de l'immigration. C'est un thème qui a été extrêmement politisé depuis le milieu des années 80 et le Rassemblement National et son ancêtre, le Front National, n'ont pas été pour rien dans cette forte politisation du sujet. Si c'était un sujet qui était moins politisé aujourd'hui, on n'aurait pas ce soir une discussion sur les chiffres du jour. Même si la question n'est pas politique ce soir ?
La question n'est pas politique. En revanche, parler de submersion, c'est un parti pris ?
qui annonce un récit, une manière de comprendre la réalité, qui prend, lui, parti. Alors, ce parti pris, c'est celui de François Bayrou. On va écouter justement ce qu'il avait dit, François Bayrou. C'était à la fin du mois de janvier, il s'exprimait sur LCI, et évidemment, vous allez réagir à cela. « Je pense que les apports étrangers sont positifs pour un peuple, à condition qu'ils ne dépassent pas une proportion. »
Je pense que la rencontre des cultures est positive. Mais dès l'instant que vous avez le sentiment d'une submersion, de ne plus reconnaître votre pays, de ne plus reconnaître les modes de vie ou la culture, dès cet instant-là, vous avez rejet. Christophe Berthosy, je vais rester avec vous, puisqu'on pose la question ce soir, est-ce que la France peut se passer ou non d'immigration ? Pourquoi François Bayrou dit cela ?
Donc la France ne peut pas se passer d'immigration parce que la France c'est une histoire d'immigration. Premier point. Deuxième point, s'il dit ça, c'est qu'on est dans un moment où les sujets, les controverses sur l'immigration, qui sont de plus en plus clivants comme sujet, ont servi de véhicule à se concentrer pas sur le phénomène de l'immigration, son apport ou
les obstacles au développement d'une société qui connaît beaucoup d'immigration, mais sur le souci de l'identité culturelle de la nation.
C'est-à-dire que parler d'immigration, c'est le meilleur moyen d'en appeler à malaise ressenti sur, finalement, la France aujourd'hui, c'est quoi ? Comment on la définit ? Et la surenchère, la politisation du thème de l'immigration, elle ne se comprend pas si on ne voit pas en même temps que c'est un discours de surenchère sur l'identité.
Et ça a après des conséquences très importantes en termes de quel est notre pacte de travail, de citoyenneté. Lorsque Bayrou parle de submersion, on a un ministre de l'intérieur de son gouvernement qui lui explique combien l'état de droit, ce n'est pas un acquis, ce n'est pas quelque chose d'inébranlable, ce n'est pas inscrit dans le marbre, donc ça peut se négocier.
Si vous additionnez toutes ces dimensions, on a vraiment un paysage où, idéologiquement, on met l'immigration dans une place où elle ne peut être qu'un problème. Lionel Arago, est-ce que vous diriez que la politisation, la surpolitisation, peut-être pour reprendre ce que nous dit Christophe Berthossi, de l'immigration, ça la détourne de son objectif majeur, de son premier enjeu ? Alors peut-être, justement, je voudrais revenir sur les propos du Premier ministre.
Car il faut faire attention à la sémantique. Il commence par dire que l'immigration, du point de vue économique, c'est un apport positif. Il parle après de l'aspect culturel. En tant qu'économiste, je ne me renoncerai pas sur l'aspect culturel.
Et puis, il conclut en disant qu'il y a un sentiment. Il précise bien. Il ne dit pas qu'il y a une submersion. Comme on parle du sentiment dans la sécurité. Il parle du sentiment. Et c'est un paradoxe. C'est-à-dire que les travaux des économistes, des académiques, montrent qu'effectivement, l'immigration a plutôt un apport positif sur les aspects marché du travail, y compris sur les finances publiques, qui va à rebours de...
de la perception, du sentiment. Et ça, c'est un vrai enjeu, un vrai défi auquel on est confronté. Dès qu'on pose la question de la perception sur le nombre de migrants dans un pays, spontanément, les personnes interviewées vont donner des chiffres deux à trois fois supérieurs aux statistiques réelles sur l'immigration. Donc, le discours d'un sentiment de submersion
crée lui-même ce sentiment de submersion. C'est un peu un effet performatif, comme ça, on crée une réalité. C'est contradictoire quand même, avec le fait qu'à chaque fois que vous posez la question aux Français quel est votre souci prioritaire, l'immigration ne figure pas, comme nous l'expliquent les responsables politiques du moment.
Vous vous rappelez des Gilets jaunes, vous vous rappelez des cahiers de doléances, etc. Où, lorsque il y a eu le mouvement social à propos de la réforme des retraites, les premiers sujets étaient sur le pouvoir d'achat, sur la mobilité sociale, sur le fonctionnement des institutions de santé, d'éducation, etc. L'immigration n'est pas ce premier souci des Français, mais il y a un traitement du phénomène migratoire qui donne pour acquis, pour évidence, que ça serait le souci prioritaire des Français.
Il y a beaucoup d'indicateurs qui montrent que ça ne l'est pas. Jean-Christophe Dumont, qu'apporte l'immigration en France et quels problèmes elle crée ? Déjà, pour revenir peut-être sur le débat, effectivement, je pense qu'il y a d'abord un décalage entre la réalité et la perception du phénomène migratoire. La perception, c'est que l'immigration...
Elle est incontrôlée, qu'on n'aurait pas de maîtrise sur le nombre de personnes qui rentrent sur le territoire. Alors on a compris qu'il y a une globale stabilité. C'est inexact. Le deuxième présupposé, c'est que cette immigration serait essentiellement irrégulière. Dans le dernier Eurobaromètre, il y avait 71% des Européens qui pensaient qu'il y avait au moins autant ou plus de gens en situation irrégulière qu'en situation régulière. Et ils pensent...
si on ajoute ces deux éléments, que l'immigration est coûteuse. Des études, des économistes... On rappelle la proportion entre l'immigration régulière et irrégulière ? Alors, on n'a pas de chiffre très précis sur l'immigration irrégulière, mais c'est au moins un facteur de 1 à 10. Donc, il n'y a pas de sujet. Il n'y a pas de sujet, oui. Ce point, si je peux me permettre... Effectivement, par définition, ils sont en situation irrégulière, donc on n'a pas de statistiques officielles pour les comptabiliser. Mais grosso modo, au niveau européen, dans
Dans les différents pays, on les estime autour de 1% de la population. Ce qui correspond à 700 000 en France. Si on prend la population française métropolitaine, on les estime entre 500 000 et 700 000 en France. Ce qui fait 1%. Jean-Christophe Dumont a rappelé les chiffres.
L'immigration au total, c'est plus de 10%. Nous, le rapport de 1 à 10. On va essayer de dépoussiérer le débat de cet enjeu politique et de cette politisation. Quel est l'impact de l'immigration ? En réalité, on peut déconstruire tous ces arguments un par un. D'abord, l'immigration, effectivement, elle a un apport démographique qui permet...
à l'Europe aujourd'hui de voir croître sa population d'âge actif et sans immigration celle-ci décroît très. En France ce n'est pas tout à fait le cas mais c'est près des deux tiers de la croissance de la population d'âge actif qui est imputable à l'immigration. Elle a un impact sur les finances publiques puisqu'on a montré, travaux de l'OCDE et ceux de Lionel et d'autres personnes du CEPI ont montré que
Les immigrés contribuaient plus en impôts et en taxes, en cotisations sociales qu'ils ne reçoivent en prestations individuelles. Quand on comptabilise tout, on arrive peut-être à un chiffre négatif, mais il est aussi négatif pour les natifs puisqu'on a un budget en déficit depuis...
plusieurs décennies, puis évidemment elle contribue au marché du travail par, disons, son importance dans un certain nombre de secteurs desquels les Français qui sont plus hautement qualifiés se détournent, que ce soit la construction, que ce soit les services au ménage, que ce soit le nettoyage, la sécurité, il y a tout un tas de secteurs où la présence de la main-d'oeuvre immigrée est importante. Une
Une fois qu'on a dit ça, il ne faut pas non plus nier qu'il y a des difficultés, qu'il y a des choses qui pourraient être améliorées, qu'il y a des enjeux notamment autour de la question de l'insertion sur le marché du travail, de l'intégration. Et donc il ne faut pas non plus avoir un discours angéliste qui tendrait à dire que l'immigration ne...
n'a pas des domaines où il faut faire plus d'efforts et on peut aussi en demander plus. Mais globalement, l'immigration n'est effectivement pas un problème à résoudre en France. Est-ce qu'elle peut créer plus de problèmes qu'à n'importe quelle solution ? Christophe Berthe aussi. Écoutez, la réponse est dans la question compte tenu de la configuration du débat.
il y a des gens qui vont dire oui. Les gens autour de la table ce soir, qui sont des spécialistes qui ont... Encore une fois, on dépolitise sur les faits. Qui ont travaillé beaucoup sur ce qu'est la réalité à la fois de l'immigration en France, de son évolution, de son impact, mais aussi des mobilités et des migrations internationales. Il y a
Il y a deux logiques qui ont du mal à communiquer. Il y a la logique de la recherche qui va expliquer qu'on vit dans un monde de mobilité, que l'immigration est une réalité du monde moderne. Si on regarde le nombre de migrants à l'échelle mondiale, l'Europe n'est pas non plus celle qui a affaire à la plus grosse pression.
que ce soit les déplacés ou les personnes en besoin de protection internationale, c'est pas dans le nord qu'on les trouve, ça va être dans le sud. Cette idée que l'immigration, c'est le sud qui vient au nord, elle est complètement biaisée, parce que les
les premiers pays d'accueil vont être des pays du Sud. Donc, on achoppe toujours à ce sentiment. Si on avait la possibilité de connecter le discours savant, de recherche, d'experts, etc., qui connaissent bien les mécaniques à l'œuvre, avec la réflexion publique des
des décideurs politiques, on parviendrait à trouver des solutions. On sait très bien que le problème du séjour irrégulier
est moins lié, et pas du tout, je veux dire proportionnellement, est presque pas lié aux entrées par voie terrestre ou maritime, mais que c'est une question de difficulté à se maintenir dans un séjour régulier. Donc plus vous allez renforcer les obstacles aux voies légales, à l'accès à un statut en situation régulière, plus vous allez...
plus vous allez créer des contingents de populations en situation irrégulière. Donc la première fabrique, j'exagère un petit peu, mais c'est pour que nos auditeurs comprennent, la première fabrique de l'immigration irrégulière en France, c'est la politique migratoire française. Et on a compris que la situation irrégulière, encore une fois, elle est minoritaire par rapport à la situation régulière. Et il faut le rappeler, concernant l'immigration, le premier besoin, ou en tout cas l'un des premiers besoins d'immigration en France, il est économique ?
Et je vais détailler justement par rapport aux chiffres qui ont été annoncés aujourd'hui sur le bilan 2024 de l'immigration en France. On a évoqué les nouveaux titres de ces jours qui ont été délivrés, un peu plus de 336 000. On a le détail. Un tiers, c'est l'immigration étudiante. Un quart, les motifs familiaux. Et...
moins d'un titre de séjour sur six, c'est les motifs économiques. Lionel Arago, à quel point est-ce que c'est indispensable, cette immigration, pour répondre aux besoins économiques de la France ? Deux points par rapport à ça. Le motif économique, il est en augmentation par rapport aux années passées.
Vous avez bien fait de rappeler les chiffres. C'est que plus d'un tiers des nouveaux titres de séjour, ce sont des étudiants qui viennent se former dans les universités, dans l'enseignement supérieur français. Il faut bien avoir en tête que si vous voulez avoir un titre de séjour pour les motifs professionnels,
Il faut que vous ayez un employeur français qui est prêt à vous accepter, enfin, qui est prêt à vous embaucher, et qui a fait la démonstration qu'on ne peut pas lui opposer la situation du marché du travail en France. C'est-à-dire, il faut qu'il démontre...
qu'il a essayé de recruter quelqu'un qui est déjà présent en France et qui n'y parvient pas. Vous voyez, ce n'est pas simple, ce n'est pas facile. Et c'est ce qui explique le nombre de titres de séjour qui paraît assez réduit pour le motif de travail par rapport à la totalité. Après, il ne faut pas non plus se tromper. Ceux qui viennent pour le motif de recrutement familial, à peu près 90 000 sur les 336 000,
une grande partie d'entre eux vont travailler. Ce n'est pas parce que vous rentrez avec un titre de séjour au titre du remboursement familial que vous n'avez pas le droit de travailler sur le marché du travail français. Donc, ils vont aussi contribuer à la population active. On peut dire que la première raison, le premier besoin d'immigration, il est économique. On peut le dire aussi frontalement. Alors, pas nécessairement...
Ça répond à un besoin. Ça répond à un besoin. Jean-Christophe Dumont. Je crois qu'effectivement, on a tendance à utiliser ce terme générique de migrant ou de migration...
comme si c'était un concept relativement fermé et homogène, mais en réalité, ça recouvre des réalités individuelles qui sont très variées. Donc, il y a effectivement des gens qui rentrent parce qu'ils ont trouvé un emploi en France, ou des gens qui ont été étudiants, qui ensuite trouvent un emploi en France et restent suite à ce premier titre. Il y a des gens qui
viennent rejoindre des conjoints étrangers. Il y a pour 40 000 à peu près, sur les 90 000 de regroupement familial, sont des conjoints de Français, c'est-à-dire des Français qui se marient avec des étrangers. Il n'y a pas de motif économique à ça, c'est simplement les opportunités de la vie. Et puis il y a les plus de 50 000 personnes qui obtiennent un titre au nom de la protection internationale, qui étaient demandeurs d'asile. Il n'y a pas
un seul motif, il n'y a pas une seule raison, mais effectivement, une fois qu'on a un titre de séjour en bonne et due forme valable en France, dans la plupart des cas, on a effectivement accès au marché du travail, et donc du coup, on va contribuer. Même si le motif est différent à l'entrée, la contribution au marché du travail ne doit pas être sous-estimée. Christophe Berthossi, à quoi ressemblerait la France s'il n'y avait pas d'immigration ? Déjà, je ne serais pas là. Ça ne serait pas la même histoire ?
Et ça ne serait sans doute pas la même... La France ne serait pas la puissance économique qu'elle essaye d'être. C'est la première... Elle n'aurait pas sa tradition historique et politique aussi. Oui.
La France sans l'immigration, ce n'est pas la France, parce que ce n'est pas ça son histoire. L'histoire migratoire, encore une fois, c'est une dimension essentielle de l'histoire nationale. Les travaux de Gérard Arnoiriel, à la fin des années 80, ont mis le doigt là-dessus, en disant que l'immigration avait été un...
un non-lieu de mémoire, c'est-à-dire quelque chose qui n'existait pas dans le roman national. Il y avait tout ce travail à faire. Donc la réappropriation de cette migration dans le roman national, si on peut le dire comme ça, montre que parler de la France en immigration, c'est parler d'une fiction qui n'a pas de prise avec la réalité. ...
Peut-on se passer d'immigration en France ? La question qu'on compose ce soir, alors que le bilan 2024 de l'immigration a été annoncé aujourd'hui par le ministère de l'Intérieur, le nombre de titres de séjour délivrés est en hausse, celui des expulsions est également en forte hausse. Mes trois invités, Christophe Berthocycle, on l'entendait, qui est sociologue et politiste,
directeur de l'Institut pour la démocratie, chercheur à l'Institut Convergence Migration, Lionel Rago, professeur d'économie à l'Université Paris-Lanterre, conseiller scientifique au CEPI, et Jean-Christophe Dumont, chef de la division Migration de l'Organisation de Coopération et de Développement Économique. Je vous donne la parole à présent, Jean-Christophe Dumont, parce qu'on a évidemment évoqué le contexte politique européen.
les mesures annoncées, il y a un durcissement de la politique migratoire qui est annoncé par le ministre de l'Intérieur Bruno Rotailleau, il y a une circulaire qui a changé à la fin du mois de janvier. Qu'est-ce que ça augure sur le changement ? Quelles conséquences ? Sachant que, par exemple, je vais citer le MEDEF, c'est le patronat français, qui a dit que d'ici 2050, la France aura besoin de près de 4 millions de salariés étrangers. Ce n'est pas compatible ?
Alors, le durcissement, pour l'instant, il concerne les conditions de l'admission exceptionnelle au séjour, donc la fameuse circulaire Vals qui a été abrogée et remplacée effectivement par des conditions plus restrictives.
qui donne d'ailleurs beaucoup de marge de manœuvre au préfet pour décider si la personne qui sollicite cette autorisation, cette admission exceptionnelle au séjour est suffisamment intégrée ou dispose d'un contrat de travail qui serait éligible. Il y a un
en résultant de la loi d'immigration de janvier 2024, une autre procédure de régularisation nouvelle qui a été mise en œuvre, qui permet à des personnes qui exercent dans des métiers en tension à aussi se prévaloir de cette admission exceptionnelle au séjour. Disons, la possibilité d'être admis à ce titre est liée à une liste de métiers en tension.
qui n'a pas été actualisée en 2022 et pour laquelle un certain nombre d'employeurs exigent qu'elle soit révisée d'une façon plus réaliste et notamment que les métiers de l'hôtellerie-restauration soient inclus, qu'un certain nombre de métiers de la construction... Qu'elle soit élargie. Voilà, qu'elle soit élargie et en tout cas plus en adéquation avec la réalité...
des besoins, des difficultés de recrutement, telles qu'ils sont aussi identifiées par l'enquête Besoin de main-d'oeuvre. Mais là, toute la question, pour répondre à votre interrogation, toute la question est de savoir si le ministre de l'Intérieur va...
cette liste vers ces emplois-là, auquel cas, ce qu'il a durci d'un côté sera peut-être assoupli de l'autre, ou s'il va rester sur la même ligne et donc également réduire cette liste. Donc, tant qu'on n'a pas la liste, c'est un petit peu difficile de répondre à la question. Mais ce qui est sûr, c'est qu'il y a un certain nombre d'autres décisions qui pourraient potentiellement être prises, qui étaient dans le projet de loi du Sénat qui est porté à l'époque par
l'actuel ministre de l'Intérieur, qui amènerait à un durcissement beaucoup plus important, notamment sur le groupement familial, sur les étudiants. On n'y est pas encore. Et a contrario, c'est à l'opposé évidemment d'une réalité économique qui s'impose. Zolene Rago, on pose ce soir la question de est-ce que la France...
Je vois que vous voulez réagir, mais je voudrais juste poser la question. Est-ce que la France peut se passer d'immigration ? Vous nous dites non, clairement, tous les trois. La question, c'est est-ce que le niveau d'immigration sera suffisant pour répondre aux futurs besoins ? Alors, justement, j'allais y venir. Je ne vais pas être sur le marché du travail à court terme, comme l'a fait Jean-Christophe Dumont. Je vais me projeter sur le plus long terme, comme l'a fait le chef du...
du MEDEF, le président du MEDEF. 3,9 millions de salariés étrangers nécessaires d'ici 2050. Voilà, 2050. C'est un chef d'entreprise. Quand ils font des investissements, ils se projettent à 20-30 ans. Ils construisent une usine, il faut qu'ils s'assurent. Et pourquoi, effectivement, ils se projettent à cet horizon ? Et qui fait que la réponse va être, on va peut-être avoir besoin encore plus d'immigrés qu'avant, à cause du changement démographique qu'on connaît la France depuis deux ans.
Vous savez que, et ça peut expliquer d'ailleurs qu'on a un taux d'immigrés en France un peu plus faible que beaucoup d'autres pays européens, c'est qu'on était à peu près préservés dans la transition démographique. On a une population qui vieillit, mais qui vieillit moins que la plupart des autres pays européens.
Tout le monde vit plus longtemps. Donc ça, heureusement, en France, c'est comme dans les autres pays européens. Mais, la différence des autres pays européens, on avait un taux de natalité qui restait assez élevé. Et depuis 2-3 ans, on commence à retrouver des taux de natalité qui se rapprochent des autres pays européens. Donc on va veillir encore plus. On va veillir plus. Ce qui fait que ça pose un problème, c'est que ta population active va diminuer. La population active va diminuer, d'où le problème de financement des retraites. Et un moyen d'éviter...
de faire baisser cette population active qui répond aux besoins des entreprises, c'est justement l'apport sous forme, l'apport de main-d'oeuvre qui vient de l'extérieur à travers les immigrés. Qui contribuait déjà, qui contribuait à éviter qu'on ait un ratio de dépendance qui se dégrade beaucoup par rapport aux pays européens, mais qui là, avec les taux de natalité qui chutent actuellement en France, ça va être plus compliqué. Et donc...
C'est l'inverse. C'est à l'imposé surtout des politiques actuelles, des politiques annoncées. Mais ce n'est pas l'horizon d'un ou deux ou trois ans. Là, on se projette sur deux décennies. Mais alors si on se projette sur deux décennies, on peut se projeter aussi sur 2027 et la possibilité que l'extrême droite soit au pouvoir en France avec les conséquences sur l'immigration ?
C'est tout le paradoxe. On est parti d'un paradoxe au tout début. Le Premier ministre dit, regardez, c'est très bien du point de vue économique, mais tout le monde pense que ce n'est pas bien. Et là, c'est exactement la même chose qu'on a. C'est à nouveau un paradoxe. Paradoxe entre la politique monnaie et la réalité économique
Donc en tout cas, la France ne peut pas se passer d'immigration. Clairement, c'est ce que vous me dites tous les trois ce soir. Merci beaucoup Lionel Rago, Christophe Berthossi et Jean-Christophe Dumont. Merci beaucoup à vous trois. Merci à Florence Ponce qui était à la préparation de ce débat et Tiffany Manta à sa réalisation. 18h58 ici à Paris.
Dans un peu plus d'une minute, ce sera le grand journal du soir sur RFI et un dossier consacré à la réponse de la Chine aux mesures de Donald Trump. Juste après, ce sera à 19h30 dans 30 minutes, la première édition d'Afrique Soir. Bonsoir Zéphirin Coadio. Bonsoir Romain, bonsoir à tous. Allez, on jette un coup d'œil au programme. La RDC, le Parlement réunit en congrès ce mardi. Eh oui, une session extraordinaire avec à l'ordre du jour la situation dans l'Est du pays, une semaine après l'enquête.
L'offensive du M23 et de l'armée rwandaise qui occupe désormais la ville de Goma, capitale de la province du Nord-Kivu. Autre titre, la fin du Conseil National de Transition au Tchad. Et oui, retour de l'Assemblée Nationale. Ce mardi 4 février 2025, les députés élus le 29 décembre dernier ont tenu leur première séance plénière aujourd'hui avec à la clé...
la désignation du président de la nouvelle assemblée. Et puis la mobilisation pour la libération définitive de l'artiste malienne Rokia Traoré. Objectif, mettre fin à ce feuilleton judiciaire, un aidant différent entre l'artiste et son ex-conjoint belge autour de la garde de leur enfant. Ce mardi, à Bamako, ses soutiens ont annoncé des actions concertées avec d'autres mouvements en France et en Belgique. Merci Zéphir Nekwadio. On vous retrouve à 19h30 heure française dans 30 secondes, le Grand Journal du Soir.