Il est 18h30 à Paris, l'heure du débat avec Romain Osoui. Bonsoir Romain. Bonsoir Véronique. Et ce soir dans le débat du jour, nous parlons de guerre hybride. Le débat du jour. Romain Osoui.
Oui, guerre hybride, ce terme qui s'impose dans la géopolitique actuelle. Un pays est soupçonné d'en être le grand chef d'orchestre, c'est la Russie. Plusieurs formes sont observées, la guerre informationnelle, les cyberattaques et récemment des dégradations de câbles sous-marins. Oh combien cruciaux ces câbles sous-marins dans notre monde actuel. Notre question ce soir, la guerre hybride est-elle la guerre de demain ?
Car la réponse s'intensifie actuellement. L'OTAN vient d'annoncer que suite aux dégradations de câbles, elle allait déployer des bateaux, des avions, des drones en mer Baltique. Que représente la guerre hybride aujourd'hui ? Jusqu'où peut-elle être menée ? Et face à cela, comment y répondre ? Quelles gardes fous sont possibles ? Soyez les bienvenus dans le débat du jour.
Et pour répondre à ces questions, nos trois invités à mes côtés en studio, Raina Stambolisca, bonsoir. Vous êtes fondatrice de RS Stratégie, qui est une société de conseil en cybersécurité et diplomatie numérique. Face à vous, François Delerue, bonsoir. Professeur en droit international à l'université IE de Madrid.
Votre ouvrage Cyber Operations and International Law, c'est en anglais. Chercheur associé également au Centre Géode à Paris 8. Et notre troisième invité est en ligne avec nous. Bonsoir, Christine Dugouin-Clément.
Bonsoir. Analyste en géopolitique, chercheuse à la chair risque de l'IAE Paris-Sorbonne, à l'Observatoire de l'intelligence artificielle de Paris 1, Panthéon, Sorbonne, votre ouvrage de la géopolitique de l'ingérence russe et sa stratégie des chaos à paraître en mars prochain. Merci beaucoup à vous trois d'avoir accepté l'invitation du débat du jour sur RFI. Pour commencer, François Delorue, comment on peut définir la guerre hybride ?
Alors, il existe beaucoup de définitions, il existe beaucoup d'approches et c'était un peu la discussion qu'on a eue avant d'entrer dans le studio. Quel était l'objet de cette discussion sur la guerre hybride ?
On utilise le terme hybride, de guerre hybride, pour faire référence à l'utilisation justement de nouvelles technologies dans les conflits, qui a été une première évolution. Et par l'utilisation de ces nouvelles technologies, on va avoir une dissolution, on va dire, d'une approche traditionnelle du conflit, avec justement des personnes qui vont être plus distantes par rapport à la zone de conflit qui vont pouvoir être impliquées. Et ça s'est multiplié, je pense que tous les trois, ça fait partie de notre expertise, avec le développement du cyber,
Et donc aujourd'hui, on utilise aussi le terme « guerre hybride » ou de nouvelles formes de conflictualité ou justement de dissolution du temps de conflictualité pour faire référence au fait que par les cyberopérations, par l'usage d'autres technologies, on n'est ni dans un état de paix ni dans un état de guerre, mais qu'on a des actions inamicales qui vont se dérouler, ce que vous mettez en lumière, tout un tas d'actions inamicales.
qu'on pourrait qualifier un peu de harcèlement, en quelque sorte, avec ce type d'action, qui reste sous l'intensité du déclenchement d'un conflit, mais qui permet justement d'envoyer des signaux, de maintenir un contact, de maintenir une pression sur des adversaires ou des concurrents. Mais le mot « guerre » est juste ? En droite à ciel, on ne dit plus le mot « guerre » depuis la Seconde Guerre mondiale. Oui, mais on comprend par rapport à la guerre conventionnelle. Est-ce que le mot « guerre »
quand on parle de guerre hybride, est adapté ? Dans certains contextes, je pense qu'il est adapté. Je pense qu'aussi le mot « guerre » conventionnel est un mot qui est un peu difficile à définir. Mais oui, il y a des conflits armés, il y a des guerres qui existent. Aujourd'hui, on a un conflit, par exemple, en Ukraine.
qui se déroule, qui est une guerre au sens conventionnel du terme où la Russie mène une guerre d'invasion sur le territoire de l'Ukraine contre l'Ukraine. Mais cette guerre fait tâche d'huile sur le continent européen et au-delà avec l'implication d'autres États. On a les informations qui circulent sur l'implication par exemple de la Corée du Nord
aux côtés de l'Ukraine sur un format plutôt conventionnel de participation. Mais par exemple, les États-Unis ont reconnu mener des opérations dans le cyberespace de type offensif, de véritables cyberattaques contre la Russie en soutien à l'Ukraine.
techniquement, il n'y a pas dans ce conflit d'opposition, on va dire conventionnelle, pour reprendre votre terme, entre la Russie et les Etats-Unis. C'est un peu le double aspect, effectivement, de la guerre hybride. Raina Stamboliska, c'est-à-dire que ça peut être...
l'évolution de la guerre conventionnelle, une autre forme d'eux, on pourrait dire, et aussi cette forme de guerre silencieuse, entre guillemets, qu'évoquait François Delerue, qui se traduit, par exemple, par des tentatives de déstabilisation des élections qui ont été observées en Moldavie et en Roumanie, par exemple, falsification des résultats en Géorgie. Il y a même eu une instrumentalisation dénoncée de filières de migrants. À chaque fois, c'est la Russie qui est montrée du doigt.
Alors, il y a différentes questions dans votre question. Il y a un aspect écosystème de ce qu'évoquait à l'instant François Delerue, qui est une diversification des moyens
Donc, ce qu'on mobilise, en fait, comment on fait les choses. Et après, il y a aussi une diversification de qu'est-ce qu'on obtient avec ça. Parce que dans la guerre, dans les conflits plutôt, dits conventionnels, vous avez, pour donner une image un peu familière, vous avez les gens qui débarquent avec les chars, avec les couteaux entre les dents.
quand vous envoiez un missile, on a relativement clairement en tête ce que ça provoque comme dégâts. Et on le maîtrise. On sait que ce qu'on appelle un moyen cinétique, donc à l'envoi d'un missile, on sait qu'il tombe, il fait boum, il n'y a plus de bâtiment.
Ça, c'est relativement clair. Quand vous faites une action ou une campagne plutôt de déstabilisation, ou quand vous déployez des moyens, ce qu'on appelle de la lutte informatique offensive, des cyberattaques plus conventionnellement,
On ne sait pas exactement déjà ce que cherchait l'auteur. Et qui est à l'origine ? Déjà, qui est à l'origine, ça c'est l'autre partie de votre question. Et on ne sait pas en fait qu'est-ce qu'on obtient à la fin. Est-ce que ce qu'on obtient à la fin, c'est de déstabiliser, de mettre le doute ? Parce qu'on pourrait se poser la question, si j'ai à ma disposition des moyens dits conventionnels de destruction, est-ce que je vais m'embêter ?
à déployer des moyens dont les impacts sont beaucoup plus incertains et qui coûtent beaucoup plus cher à développer et à déployer, tels que le cyber. Et après, on a
Quand la Russie, par exemple, mène une guerre hybride en Europe, ce qui est dénoncé, elle ne peut pas la mener de manière conventionnelle. Est-ce que ce n'est pas là où la guerre hybride trouve tout son sens ? En fait, si vous voulez, et je reviendrai à cette notion de qui fait quoi juste après, il est important de distinguer les outils conceptuels qu'on peut avoir en tant que chercheur ou professionnel
professionnels, etc., du domaine, et ce qui se passe dans la vraie vie des vrais gens. C'est-à-dire qu'il n'y a pas une idéologie de la guerre hybride qui circule, qui est doctrinaire,
figure dans une doctrine russe, etc. Mais c'est tout l'enjeu de cette diversification et de cette mobilisation de moyens différents qui, en fait, sont tous... C'est un écosystème de moyens pour projeter sa puissance. Et donc, c'est pour ça, je vous dis que nous, on peut très bien discuter pendant très longtemps sur est-ce que c'est une guerre hybride ? C'est quoi exactement les nouvelles conflictualités ?
On peut. Mais est-ce que c'est vraiment ce qui importe de donner des définitions précises au moment T ? Ou est-ce que ce qui importe, c'est... Non, c'était pour camper le décor. Ce qui importe, c'est de savoir quelle est la portée de cette guerre hybride d'aujourd'hui. Donc, quelle est l'importance ?
Pourquoi il est... Parfois, en fait, c'est une action politique de nommer les coupables plutôt que de les chercher. Pour reprendre ce que disait Marcel Pagnol. Donc, c'est pour ça qu'on dit la Russie, l'Iran, etc. Mais de leur côté, en fait, on a la même démarche en miroir. De dire la France, les États-Unis, c'est tous des méchants. Ils nous agressent aussi, etc. Donc, il y a, en fait... Et c'est légitime, entre guillemets, parce que chaque pays...
souverain, cherche à protéger ses intérêts par les moyens à sa disposition. On peut, au regard du droit international, au regard d'un système de valeurs démocratiques ou autres, les voir comme acceptables, moyennement acceptables ou totalement inacceptables. Mais ça, c'est un autre sujet. Et après, on a le sujet, et je vous rends la parole, sur la notion d'intensité qui est extrêmement importante. Oui.
et sur laquelle j'aimerais vraiment vous donner un exemple précis. Cette notion d'intensité, c'est ce qui fait aussi qu'on peut avoir l'impression d'incapacité ou d'incapacitation de réagir. Pourquoi ? Parce que, encore une fois, si je vois débarquer des mecs armés dans un char, le couteau entre les dents, je sais à peu près que c'est une invasion étrangère. Hostile. C'est ce qui va se passer.
Si j'ai des gens qui propagent des fausses nouvelles, qui font des campagnes diverses et variées, etc., en fait, c'est à quel moment que ça devient ouvertement hostile ? Et donc, c'est là où on a cette difficulté, par exemple, vis-à-vis de l'OTAN, si on prend l'OTAN, puisque vous l'avez mentionné dans votre introduction. Oui.
Il y a une clause dans le traité de l'OTAN qui dit que toute agression contre un membre de l'Alliance atlantique, donc de l'OTAN, peut être considérée comme une agression contre l'Alliance dans sa totalité. Et donc là, on a une réaction de tous les membres de l'Alliance. Et en fait, dans le cas des conflictualités hybrides,
On n'a jamais discuté du seuil de cette intensité, c'est-à-dire à quel moment les âneries qu'on voit sur TikTok, sur X, sur ce que vous voulez, deviennent des menaces ou en tout cas des signaux de conflictualité suffisants pour susciter une réaction conventionnelle
Mais ce n'est pas uniquement ça. C'est Zanrientringen, comme vous dites. Évidemment, c'est ça, plus ça, plus ça. Exactement. On a dit la guerre informationnelle. Alors évidemment, on n'a pas encore évoqué les dégradations de câbles. Ça, c'est extrêmement important. Les dégradations de câbles qui ont été observées en fin d'année dernière. Il y a eu deux incidents qui ont touché des câbles sous-marins en mer Baltique. L'un au large de la Finlande qui a été qualifié d'accident par Helsinki. Et l'autre, en revanche...
qui a rompu deux câbles, l'un reliant la Finlande à l'Allemagne, l'autre la Suède et la Lituanie. Et les autorités suédoises ont suspecté un vraquier chinois. Et pour bien comprendre l'enjeu des câbles, il faut savoir qu'aujourd'hui, il y a plusieurs centaines de câbles sous les océans qui acheminent toutes les données et notamment des transactions financières pour 10 000 milliards de dollars par jour. Christine Dugouin-Clément, on ne vous a pas encore entendue.
Comment évaluer l'hostilité de la guerre hybride aujourd'hui ? C'est toute la beauté de la guerre hybride. Vous allez pouvoir jouer d'une partie de déni plausible, soit parce que vous allez utiliser des moyens numériques,
Alors là, on va penser à tout le volet informationnel et vous allez potentiellement pouvoir avancer derrière un faux-née, des faux-piles, des duplications et faire du type-scanning, c'est-à-dire reprendre par exemple l'image graphique d'un journal pour diffuser le narratif qui vous conviendra.
Et puis, il faudra des preuves techniques pour remonter. Vous allez pouvoir aussi mener des actions cyniques, mais que vous vous ponez sous ce qu'on appelle du false flag. Donc, on a énormément de choses. Ce que vous avez aussi dans tout ce qui va être du domaine de la confrontation hybride et qui va toucher au cognitif, il faut bien voir qu'on est sur un spectre extrêmement large. On ne peut pas penser uniquement sur une aire géographique,
Et on ne peut pas non plus penser sur un seul segment. Même si on parle d'un volet informationnel, vous allez pouvoir cibler, par exemple, une opinion publique au sens large. Et puis, vous allez pouvoir cibler des groupes sociaux plus spécifiques. Des décideurs, par exemple, des associations par des jeunes, etc. Ce genre de choses. Vous allez pouvoir essayer de semer des troubles pour arriver à avoir une division sociale.
Et ça, vous allez pouvoir essayer de jouer dans les processus démographiques. Là, c'est ce qu'on a vu sur notamment les influences dans les élections, dans de la perturbation sociale. Vous allez profiter d'éléments préexistants. Ça, c'est la Russie qui mène tout cela. Je disais en amont de cette émission, Christine Dugoin-Clément, que la Russie était le grand chef d'orchestre. Elle est l'unique, comment dire, elle est seule à la manœuvre de la guerre hybride aujourd'hui dans le monde ?
La guerre hybride, alors même si le terme en tant que tel est sujet à discussion, mais la Russie est un des grands représentants. Mais ce n'est pas le seul à jouer. Vous avez quelque part utilisé
des méthodes qui vont être différentes de la guerre conventionnelle, donc avec deux armées qui vont s'appronter, utiliser de la conflictualité en dessous du seuil de déclenchement de guerre traditionnelle, c'est quelque chose que d'autres acteurs vont pouvoir jouer. L'avantage...
Par exemple, la Chine a pu être active sur des actions informationnelles, notamment pendant la période du Covid. On va avoir des puissances comme les Asériques qui vont jouer, ou d'autres acteurs qui vont jouer, et sur lesquels les Occidentaux ou la France ne sont pas forcément la cible principale, parce que leurs objectifs géopolitiques ou leurs sujets de dispute ou de conflictualité sont différents. Christine Dugoin-Clément, je me permets de vous couper, parce que par ailleurs la liaison n'est pas parfaite. François Delauru...
Elle citait Christine Dugand-Clément, évidemment la Russie, la Chine, mais en fait, est-ce qu'il y a un accord Russie-Chine sur cette question-là de la guerre hybride ? Est-ce que des démocraties, au sens propre du terme, mènent une guerre hybride ? Alors, justement, je voulais rebondir sur ce point-là et sur la question de la définition avec ce qui a été dit par mes collègues précédemment, dans le sens où
On utilise, là dans le contexte où on l'utilise aujourd'hui, on utilise le terme guerre hybride après, après les événements, et pour essayer de catégoriser différents types d'activités qui peuvent être connectées. Et on va avoir des acteurs, et ce qui était mentionné juste à l'instant, des acteurs très différents qui conduisent des opérations qu'on peut qualifier de guerre hybride. Si ce qu'on entend par guerre hybride dans la manière dont on veut le décrire, c'est le fait d'utiliser d'autres formes,
de contacts, d'hostilités, d'actes inamicaux. Oui, et des États occidentaux conduisent ce type d'opérations. Des États occidentaux conduisent des opérations qui vont viser à, par exemple, à contrer des opérations informationnelles. Mais pour contrer une opération informationnelle, ça veut dire aussi que vous faites une opération où vous parlez d'information, vous diffusez de l'information. Donc ce que nous, on va qualifier d'une certaine manière peut être qualifié de guerre hybride par d'autres. Vous avez des exemples ?
Non, là, je n'ai pas forcément d'exemple qui me viennent en tête parce que c'est vrai qu'on étudie plutôt d'autres exemples. Je rajouterais un acteur à ceux qui ont été cités. Je pense que oui, la Russie est aujourd'hui celui qu'on voit le plus, aussi peut-être parce que la Russie est celui qui est le plus proche de nous en France.
Mais l'État qui a conduit ce type de conflictualité pendant très longtemps et qui continue à le faire, c'est l'Iran. La particularité de l'Iran, c'est que l'Iran a eu des conflits armés conventionnels à divers moments de son histoire, mais a surtout été un État très impliqué dans différentes formes de soutien, d'instrumentalisation de groupes.
ce qu'on appelle des proxys dans différents états et donc c'est le cas du Hamas, c'est le cas du Hezbollah et d'autres groupes mais aussi beaucoup plus diffusés quand vous regardez aujourd'hui la carte des activités qui ont un lien plus ou moins direct, plus ou moins tenu avec l'Iran il y en a beaucoup et je rajouterais juste une chose euh...
Par rapport à l'OTAN, et ça rejoint un peu votre question sur les exemples, pourquoi l'OTAN parle de guerre hybride aujourd'hui et pourquoi ça nous intéresse, ça nous fascine ? C'est aussi parce que l'OTAN a été créée pour la guerre conventionnelle. Et aujourd'hui, l'OTAN, et je pense que tous les chercheurs cyber peuvent être d'accord sur ça, l'OTAN s'est intéressé au cyber parce que l'OTAN a un petit peu perdu son objet, ou en tout cas son objet a un petit peu...
diminué à la fin de la guerre froide. Et il y a justement aujourd'hui cette réalité, c'est que la plupart des enjeux de sécurité, même de sécurité nationale, vont être des enjeux qui vont être liés à des formes d'opposition qui ne sont pas de la guerre conventionnelle. Et donc il y a un besoin pour des organisations de ce type de se...
de se couvrir ce type d'action. La guerre hybride est-elle la guerre de demain ? La question qu'on pose ce soir alors que l'OTAN vient d'annoncer qu'elle déploierait des navires, des avions, des drones en mer Baltique suite aux dégradations constatées en fin d'année dernière de câbles sous-marins. La Russie est montrée du doigt. Mes trois invités sont François Delerue, que l'on entendait, qui est professeur en droit international à l'université IE de Madrid. Il
chercheur associé au Centre Géode à Paris 8, Raina Stambolisca, fondatrice de RS Stratégie, la société de conseil en cybersécurité et diplomatie numérique, et Christine Dugouin-Clément, analyste en géopolitique, chercheuse à la chaire risque de l'IAE Paris-Sorbonne, à l'Observatoire de l'intelligence artificielle de Paris 1, Panthéon-Sorbonne. Raina Stambolisca, je voudrais qu'on évoque les garde-fous, les réponses possibles à cette guerre hybride, mais
D'abord, d'un mot, elle n'a pas de limite, cette guerre hybride ?
Je dirais que non, dans le sens où... Et dans le sens où elles peuvent finalement faire plus de ravages qu'une guerre conventionnelle ? En fait, j'ai envie de donner une réponse de Normand, ça dépend. Oui, bien sûr. En fait, c'est toujours qui décide, qui regarde, qui apprécie, qui qualifie. Et quand on regarde, ou une réponse, si vous voulez, de chef d'entreprise, quel est mon investissement pour avoir quel impact, donc quel est mon retour sur investissement, si vous voulez ?
Dans les exemples qui ont été évoqués, je suis ravie que François Deloreux ait parlé de l'Iran, parce qu'effectivement, c'est un des grands exemples. Mais on a de nouveaux entrants, tels que l'Inde.
D'un côté, qui est très... qui a un genre un peu similaire que l'Iran, où il y a, si vous voulez, un écosystème d'outsourcing de ce genre d'activité qui est très intéressant. Donc Russie, Chine, Iran, Inde ? Tout le monde. Et de l'autre côté, si on veut être un peu, on va dire, taquin, on peut parler de notre grand allié frontièreur qu'est les États-Unis. Oui.
qui dans sa doctrine, si vous voulez, a des notions telles que « defend forward » et des choses comme ça, qui sont en fait, en français simple, « je vais aller chez toi ».
vérifier que tu as bien bien réparé toutes tes fenêtres et toutes tes portes si je me rends compte qu'il y a un pet sur ta fenêtre ou ta porte c'est moi qui vais la réparer ça se traduit comment ? ça se traduit que on peut se retrouver dans des situations où sur des infrastructures critiques européennes nous avons en fait une intervention américaine qui est certes
de bonnes intentions, mais qui ne devraient pas être là. Parce qu'encore une fois, il y a des sujets de souveraineté, etc. Et donc on a aussi ce genre de sujets qui sont très complexes à évoquer, parce qu'encore une fois, c'est notre allié. Donc il y a ce genre de discussions qui sont complexes et délicates à avoir,
Et où, effectivement, si vous regardez ce qui sort en termes de recherche par les sociétés de renseignement sur les menaces cyber occidentales, ça va être quasi exclusivement dirigé vers les acteurs qu'on a cités plus tôt, mais très peu, voire pas du tout, vers l'activité d'autres pays pourtant très actifs sur ce plan-là,
mais qui sont des alliés. Évidemment, on peut penser que la guerre hybride ne peut qu'être appelée à se développer. Je vais donner la parole à Christine Dugon-Clément. Avec le progrès technologique...
Qu'est-ce que vous pensez, vous, de la réponse pour l'instant qui est avancée ? Donc j'évoquais le déploiement annoncé en mer Baltique, annoncé hier par l'OTAN. Il y a une vraie accélération, une vraie agitation côté européen. Le président finlandais qui a dit « Voilà, les vacances sont terminées ». Est-ce que l'Europe, est-ce que l'OTAN est capable de faire face à cette guerre hybride menée par la Russie ? Christine Dugoin-Clément ?
Oui, excusez-moi, pardon. En tout cas, c'est tout l'enjeu. Vous avez eu plusieurs niveaux. Déjà, il y a eu une première prise en compte de la réalité, du renouveau de cette réalité-là. Un des gros moments de réveil, ça a été 2014, avec le début du conflit dans le Donbass et l'utilisation qui a été faite de méthodes informationnelles, notamment par la Russie.
Ce que l'on a aussi, c'est que là, on remonte à 10 ans maintenant. Vous avez une évolution technologique qui permet d'avoir une contraction du temps, c'est-à-dire de produire beaucoup plus rapidement des opérations informationnelles, par exemple, à un coût qui sera plus modique, et de les déployer à peu près partout. Ce qui fait que vous allez avoir une capacité de faire une montée de pression horizontale. Et ça, ça a permis d'avoir un objet qui a été décuplé.
Ce que l'on va avoir sur la capacité, par exemple, de falsification de voix, qu'on va avoir en faisant des deepfakes audio par les GAN, c'est quelque chose qui n'avait pas le même essor il y a dix ans. On comprend qu'évidemment, c'est pour ça que je disais que selon nous, je pense que vous partagez cet avis, la guerre hybride ne peut qu'être appelée à se développer avec le progrès technologique. La question, c'est est-ce que la réponse européenne vous semble adaptée ?
En tout cas, elle se met en place. Vous avez plusieurs approches. Pour la France, on va travailler... Alors, on a eu d'abord la LID, la ILIO et maintenant la L2I, c'est-à-dire qu'on assume le fait de pouvoir rentrer dans ce type de conflictualité, mais avec un cadre éthique extrêmement strict. Là, vous allez vous retrouver avec des compétiteurs qui n'ont pas forcément le même souci.
Néanmoins, il y a une prise en compte. On est en train de s'armer sur les différents pays aussi bien pour essayer de se prémunir et de détecter les actions que de pouvoir avoir les moyens techniques potentiellement de travailler dans ce niveau de conflictualité.
François Delorue, il nous reste quelques minutes. Est-ce que finalement les populations doivent se préparer ? Parce que la différence, on peut penser, entre la guerre conventionnelle et la guerre hybride, c'est qu'elle peut toucher tout le monde, avec la guerre informationnelle, les réseaux sociaux, notamment, évidemment, les cyberattaques.
Est-ce que, par exemple, en Suède, c'est un pays de tradition pacifique, la Suède est un pays de non-alignement historique, chaque habitant a reçu une brochure pour apprendre à se préparer à une guerre. Ça vous inspire quoi ? Est-ce que c'est une réponse appropriée, selon vous, au développement annoncé de la guerre hybride ? Mais justement, pour faire le lien entre cette question et ce qui était dit avant...
Les exemples que vous prenez, que ce soit le développement des activités de l'OTAN, que ce soit cette question, c'est à chaque fois ce qu'on peut faire rentrer dans la guerre hybride, mais qui nous ramène à la guerre conventionnelle. L'OTAN déploie des navires en mer Baltique dans l'idée qu'il peut y avoir un conflit qui, à un moment, s'ouvre en mer Baltique. Et dans l'idée que, justement, c'est pour...
pour avoir un effet de dissuasion par rapport à un risque qui existe. La Suède se prépare à un conflit relativement conventionnel avec ses prospects. Ça ne veut pas dire qu'il va arriver, ça ne veut pas dire qu'ils disent qu'il va arriver, mais ils veulent que les populations en aient conscience qu'il faut se prévenir, faire des stocks et ainsi de suite.
Au niveau de la population, sur l'aspect, on va dire, de la plus faible intensité sur la guerre conventionnelle, oui, il faut que les populations, et pas que sur ce qu'on appelle aujourd'hui la guerre hybride, mais sur toutes les questions, en fait, de désinformation, toutes les questions de cybersécurité, qu'on les fasse rentrer dans cette boîte ou non.
Il y a un vrai enjeu d'éducation, il y a un vrai enjeu de compréhension de ce qu'on fait, il y a un vrai enjeu de compréhension que passer sa journée à scroller des images sur des réseaux sociaux. Et malheureusement, quand on enseigne, c'est ce qu'on voit aussi avec nos étudiants qui nous le disent, on en parlait avant l'émission, ou des étudiants qui peuvent nous demander d'avoir des vidéos et ainsi de suite, ils regardent beaucoup de contenu vidéo. Le problème d'un contenu vidéo, à l'inverse par exemple d'un contenu écrit, c'est qu'on n'a pas les sources.
Vous ne voyez pas les sources, vous n'avez pas des références aux sources. Et aujourd'hui, il y a un vrai problème qui est moins présent en Europe, mais par exemple aux États-Unis, où c'est connu que la population se renseigne en ne regardant que des titres, sans regarder le contenu des informations. Les titres sont souvent trompeurs. Aujourd'hui, les titres sont générés par des intelligences artificielles pour pas mal de médias, surtout ceux qui cherchent à faire du chiffre.
Et c'est un vrai enjeu, c'est l'enjeu de l'éducation, l'enjeu de la capacité à avoir un recul critique sur ce qu'on vous dit, ce qu'on vous montre, ce que vous entendez. C'est la spécificité selon vous, je vais vous poser la question Reina Stambolis, qu'à chaque fois que vous levez la main, ce sera vraiment ma dernière, il nous reste une minute, c'est la spécificité de la guerre hybride selon vous, c'est qu'elle mobilise tout le monde ?
Oui, et elle fait douter tout le monde. Mais j'aimerais bien aller sur le volet européen. La réponse européenne. La réponse européenne, parce qu'on a besoin déjà d'une part à ce que les gens qui nous dirigent parlent et pensent le long terme. Parce qu'en fait, moi je suis franco-bulgare, donc si vous voulez j'ai les deux sons de cloche.
Et tout à l'heure, François Delorue disait que l'OTAN s'est trouvé un intérêt sur le cyber parce qu'il était en manque d'inspiration, mais aussi parce qu'il y a des choses qui sont arrivées de la part des pays d'Europe centrale et de l'Est, et les pays baltiques, qui ont mis la pression pour que ça évolue. Et aujourd'hui, quand on a la Pologne qui prend la présidence tournante de l'Union européenne, quand vous regardez...
le parti pris sur la lutte contre la désinformation et la cybersécurité, dont des établissements de santé, etc., là, vous voyez, en fait, une autre réflexion. Donc, il y a une chose à faire, c'est que si on veut survivre,
à titre individuel, mais aussi national, il faut qu'on fasse front commun. Et ce front commun, il se fait à 27. Eh bien, votre appel est lancé. Et pour bien comprendre que finalement, la guerre hybride est la guerre de demain, mais déjà la guerre d'aujourd'hui, en vous entendant, je vais citer ce qu'avait dit le Premier ministre suédois il y a quelques jours. La Suède n'est pas en guerre, mais pas en paix non plus. Merci beaucoup à vous trois. Raina Stambolisca, François Delerue et Christine Dugouin-Clément. Et merci à Florence Ponce qui était à la préparation de ce débat. Et Claude Batista...
à sa réalisation. Merci à vous de nous avoir écoutés. 18h58 ici à Paris, dans...
Une minute, ce sera le grand journal du soir et on évoquera évidemment l'accord pour un cessez-le-feu à Gaza qui a été annoncé il y a quelques minutes. Nous serons notamment à Jérusalem et aux Etats-Unis. Et puis après ce grand journal du soir et notre tranche d'infos, ce sera l'heure d'Afrique soir, la première édition. Bonsoir Zéphirin Kouadio. Bonsoir Romain, bonsoir à tous. Allez coudez au programme ce soir du football pour commencer. Oui, du football avec le tirage au sort du Chan, le championnat d'Afrique des Nations Unies.
Il a lieu en ce moment même à Nairobi au Kenya. L'événement prévu en février a été reporté de 6 mois. Eric Mamrut du service des sports nous expliquera tout en début de journal. A de la politique avec la prestation de serment du président mozambiquain Daniel Chapout. Absolument, cérémonie d'investiture dans un climat de tensions inédites puisque l'opposant venant de sur Mondlane.
avait appelé à trois jours de grève nationale. Récit à suivre. Et puis le président angolais qui est attendu demain à Paris pour une visite d'État. Eh oui, João Lourenço sera reçu à l'Élysée à la mi-journée pour un déjeuner de travail, avant un dîner d'État en soirée, une visite pour renforcer, nous dit-on, les liens bilatéraux et faire le point sur les grands sujets régionaux et internationaux. Selon la présidence française, je rappelle que l'Angola prendra le mois prochain la présidence tournante de l'Union Afrique.
Merci Zéphirin. On vous retrouve dans 30 minutes. Restez à l'écoute de RFI. Dans 30 secondes, c'est le grand journal du soir.